Le sel (ou chlorure de sodium, NaCl)

Synonymes :

  • Sel de terre : sel gemme, sel fossile, halite (mot forgé par Ernst Friedrich Glocker (1793-1858) en 1847 : du grec hals, « mer » et lithos, « pierre »).
  • Sel de mer : sel marin, sel commun, sel blanc, sel de cuisine, sel de cuisson, sel de table.

Derrière toutes ces appellations se dissimule celui qu’en l’absence de toute précision l’on appelle le sel, alias chlorure de sodium, anciennement muriate de soude (ou de sodium ; murias sodae en latin), et dont la formule chimique a été établie par le chimiste anglais Humphry Davy en 1810.

Salt (anglais, suédois), sals (letton), salz (allemand), sal (espagnol, portugais), sale (italien), sole (russe), sól (polonais), sare (roumain), etc. Tous ces mots sont « parmi d’autres, des témoignages manifestes de la présence du sel dans toutes les civilisations »1. Présent à toutes les mers et toutes les terres du globe, tentons aujourd’hui de tracer dans le détail le caractère universel du sel, puisque la propagation de l’être humain à travers tous les territoires viables que lui offrit son environnement, le plaça nécessairement face aux mers et aux océans, à ces mers intérieures et ces lacs qui le sont tout autant, reliquats de ce qui fut, autrefois, une mer ouverte, à toutes ces anciennes étendues d’eau salée dont on ne peut deviner la nature archaïque que par la quantité de sel qu’elles ont accumulée çà et là avant de disparaître : les mines de sel terrestre sont de celles-là. Cela explique que, presque partout dans le monde, l’être humain ait pu bénéficier des bons offices du sel, et cela qu’il stationne auprès des côtes ou qu’il se renfonce plus à l’intérieur des terres. Procédons maintenant à un petit aperçu historique des rapports liant l’homme au sel et à sa quête.

Cette attraction pour le sel remonte bien avant l’invention de l’écriture. Cela signifie qu’il faut savoir se tourner du côté des vestiges préhistoriques pour écrire plus précisément l’histoire conjointe du sel et de l’homme. En ces époques reculées, prit-on connaissance de l’importance du sel d’un point de vue physiologique ? Le nomadisme de l’homme ne fut-il pas conditionné par l’absorption d’apports continués de sel ? Si, de tout temps, l’être humain a eu, métaboliquement parlant, besoin de sel, gageons qu’il ait fait le nécessaire pour survivre, afin de pourvoir son économie de ce précieux minéral. Cela impose donc, au minimum, une exploitation régulière du sel en des points connus et reconnus comme sources d’approvisionnement et sans doute son transport et son troc subséquents en des régions où l’être humain, dépourvu de sel, compte sur ce trésor qu’un autre lui apporte de fort loin et qu’il échangera contre ce qui représente de la valeur pour son fournisseur saunier, c’est-à-dire les richesses locales qu’on ne déniche pas ailleurs.

L’homme exploita-t-il tout d’abord le sel marin ou bien son homologue terrestre ? Je ne possède pas la réponse à cette question (bien que mon intuition me fasse pencher en direction de la seconde solution), mais je sais néanmoins qu’il y 3500 ans, l’on extrayait le sel en Autriche (Salzkammergut) et qu’un peu plus tard, toujours en Autriche, près de Hallstatt, les hommes de l’Âge du fer (et probablement même du bronze) s’improvisèrent mineurs et descendirent dans les entrailles de la terre par le biais de galeries creusées que l’on a retrouvées en compagnie de matériel en parfait état de conservation (pelles, échelles, instruments miniers). Le corps d’un mineur (du premier millénaire avant J.-C.) y a également été retrouvé au XVIIIe siècle. On observe, ailleurs en Europe, comme à Wieliczka (Pologne), d’autres gisement anciens de sel gemme et de gypse, ainsi qu’en Espagne (Catalogne : Cardona) ou dans d’autres parties du monde (en Inde, à l’époque des campagnes d’Alexandre le Grand menées au IVe siècle avant J.-C.). En plus de cette extraction minière, on peut remarquer une autre méthode d’exploitation du sel, celle qui se pratique encore du côté de Guérande par exemple, c’est-à-dire l’obtention du sel par évaporation de l’eau de mer dans des marais salants, ce qu’entreprennent les paludiers depuis au moins l’époque de Pline qui décrivit la manière dont on procédait pour tirer hors de l’eau le sel marin. Cette évaporation solaire fut quelque peu concurrencée par celle de l’eau issue des fontaines salées par le feu d’une chaudière : ainsi fit-on à Lons-le-Saunier, par extraction du sel du bassin salifère comtois. Dans un cas comme dans l’autre, il s’agit de récupérer le résidu sec, celui-là même qui est indiqué en milligrammes par litre sur la plupart des bouteilles d’eaux minérales, c’est-à-dire ce qui ne peut brûler et demeure au fond d’une casserole quand l’eau qu’on y a mise s’est entièrement évaporée : les sels minéraux dont, bien évidemment, le sodium. Parfois, il n’y a pas même besoin du feu nourri d’une chaudière pour obtenir le sel : au Tibet, les lacs salés de la région de Tang déposent naturellement sur leurs berges du sodium, du potassium et du bore. Ainsi, le sel de Byang-Thang est-il très apprécié des Népalais qui le transportent à travers les montagnes à dos de yacks (on voit ça très bien dans un film sorti en 1999, Himalaya, l’enfance d’un chef). Mais ce n’est pas là le plus gros de la production saline, celle-ci ayant été pendant longtemps assurée par les sauniers marins dont les méthodes restèrent identiques pendant de nombreux siècles (du Moyen âge jusqu’à l’avènement de la révolution industrielle du XVIIIe siècle, on note guère d’innovations à ce sujet). Il y a environ deux siècles, le travail saisonnier qu’on effectuait dans les salines de la mer Méditerranée ou bien dans les marais salants océaniques se propagea à d’autres zones du globe (Afrique, Amérique du Sud), ce qui permit d’accroître la production de sel marin de manière substantielle. Cependant, depuis les années 1970, on note une forte régression de l’extraction du sel par évaporation de l’eau des marais salants au profit du sel extirpé des mines terrestres.

Devant les difficultés que l’on pouvait avoir à se ravitailler en sel marin, on procédait de tout autre manière, comme en Afrique centrale, par exemple : on entreprit la culture de plantes à sel dont les cendres possèdent une haute teneur en chlorure de potassium (KCl), succédané du sel. C’est notamment le cas de la laitue d’eau (Pistia stratoties) et de Hygrophyla spinosa. Ce mode de fabrication n’est pas circonscrit qu’au seul territoire africain, puisqu’on fit de même en Europe : en effet, faire appel aux plantes halophytes ne date pas d’hier, cela pour en obtenir un ersatz de sel ou bien quantité de cendres bonnes pour faire la lessive. Pour cela, on brûlait des plantes maritimes pour obtenir des sels de potassium et des plantes davantage terrestres pour faire de même avec le sodium. Par exemple, de la soude commune (Salsola soda ; soda comme sodium), l’on tirait surtout du sodium, et de la soude brûlée (Salsola kali), essentiellement du potassium, comme ne l’indique pas précisément le nom de cette plante : dans le tableau périodique des éléments de Mendeleïev, le potassium est figuré – bizarrement – par un K, qui fait référence à l’autre nom du potassium : kalium, forgé sur l’arabe kali, duquel a découlé al-kali, puis alcalin, ce qui est bien dans la nature du potassium (et du sodium par la même occasion, tout deux étant des métaux alcalins).

Il aurait été curieux qu’une matière première qui fut, à une époque, aussi valeureuse que le sel, et dont l’usage s’étendit à bien des domaines de la vie quotidienne, n’ait pas donné lieu à tout un tas de pratiques, d’us et de coutumes plus variés les uns que les autres. C’est ce que nous allons aborder dans un nouveau paragraphe.

Il est marquant de constater à quel point le symbolisme du sel est double en plusieurs points. Si l’on a très tôt remarqué qu’il permettait d’assurer une conservation contre la corruption, il peut aussi devenir corrosif, et donc destructeur, lorsqu’il est présent en trop grande quantité. Mettre son grain de sel, certes, mais avec justesse et mesure. Quand l’emploi du sel a trop grand volume est sollicité, on parvient fatalement à une situation où rien ne peut plus être tenté face à l’indestructibilité et l’incorruptibilité du sel. Les Romains le savaient bien, eux qui « répandaient du sel sur la terre des villes qu’ils avaient rasées, pour rendre le sol à jamais stérile »2. Cette aridité peut aussi se transposer à la mer, dont la salinité, conférant à l’amer, en fait une eau d’amertume, ce qui ne peut en aucun cas lui donner valeur d’élixir de fertilité : les eaux marines qui s’aventurent trop avant dans les terres en amoindrissent généralement la puissance générative. Mais le sel n’est pas que cela : on considère aussi que lorsqu’il est débarrasser de son substrat humide et marin, il devient un feu délivré des eaux et, par conséquent, un symbole de nourriture spirituelle, puisque, émergeant de l’eau par son évaporation, il figure alors la transcendance matérialisée, agrégeant la matière jusqu’alors invisible et diluée, par cristallisation et solidification, ce qui n’était qu’indistinction se stabilisant à la manière des cristaux de sel, devenus de parfaits cubes à l’image de celui sur lequel s’appuie l’Empereur du Tarot de Marseille (arcane IV, le chiffre quatre renforçant davantage encore l’aplomb du personnage et les valeurs symboliques qui l’habitent). De cette assise solide et pérenne découle une certaine idée de la communion, l’expression d’un lien de fraternité à travers lequel partager le sel et le pain, le consommer en commun étant le plus assuré moyen de figurer l’amitié, l’hospitalité et la valeur accordée à la parole donnée. Par exemple, Plutarque voyait dans le sel un symbole d’amitié, tandis que dans les pays slaves, accueillir les hôtes avec le pain et le sel est une marque d’hospitalité. C’est pour cela que, pour ne pas se brouiller avec quelqu’un, on ne lui donne pas la salière lorsqu’il la demande : on la pose à côté de lui pour qu’il puisse s’en saisir lui-même. Ce qui veut dire que sur une table, la salière doit occuper un point équidistant à tous les convives, sans quoi la discorde risque de s’en mêler ! ^.^

Accueillir, c’est inviter à entrer chez soi : par le sel, on exerce un pouvoir attractif par lequel on retient aussi. Quoi d’étonnant, alors, à ce que le sel ait été intégré aux rites nuptiaux (comme on le peut voir dans les pays slaves) ? Dans les Abruzzes (Italie), on scelle ainsi un accord amoureux : chacun des membres du couple doit porter sur lui une amulette dans laquelle sont placés quelques miettes de pain, une plante nommée « concordia », un peu de sel et un bout de papier couvert de signes étranges. Cela est censé assurer la durabilité de l’union des deux tourtereaux. C’est donc attirer sur soi les bénéfices de cette union. D’ailleurs, dans d’autres domaines l’on peut constater que l’usage du sel a pour but premier de faire s’accroître la valeur des biens et du matériel : par exemple, en Chine, on jetait dans un brasier plusieurs poignées d’un mélange de riz et de sel pour obtenir une abondante récolte de riz dans l’année à venir. Bénir l’étable avec du sel, c’était nourrir l’espoir de voir augmenter la production laitière. En Allemagne, pour fortifier les chevaux, on leur faisait prendre, trois dimanches de suite, avant le lever du soleil, trois poignées de sel et soixante-douze baies de genévrier. Comme nous l’avons vu plus haut, éparpiller du sel sur la terre, c’est prononcer le vœu criminel d’en stopper définitivement la génération : après les Romains, ce fut à l’empereur Frédéric Barberousse (1122-1190) de faire de même : semant du sel sur Milan en ruines, il gageait ainsi de sa non-renaissance (sans cependant y parvenir). Cet épandage agressif confine aux mêmes objectifs que lorsque le sel est répandu par mégarde : l’on connaît tous cette « superstition » qui nous oblige à jeter immédiatement une pincée de sel au-dessus de son épaule gauche lorsqu’on renverse malencontreusement la salière sur la table. L’on fait ainsi pour conjurer le mauvais sort qui, sinon, ne manquerait pas de s’abattre sur le maladroit. Mais il n’y a peut-être là pas seulement le résultat d’une croyance irrationnelle : en effet, d’après Angelo de Gubernatis, le sel renversé sur la table véhiculerait une crainte d’origine phallique, car les grains de sel représentent la semence génératrice elle-même. L’homme salace (du latin salax) n’est-il pas celui-là même tout attaché à la lascivité qu’induisent les plaisirs sensuels et, par extension, sexuels ? La salière, qui s’effondre comme une tour aux fondations mal bâties, éjecterait alors ces quelques grains de sel, coup (d’épée dans l’eau) pour rien. La puissance génératrice ne saurait être gaspillée ! Car ajouter du sel, ce n’est pas adjoindre davantage de piquant, c’est aussi augmenter la valeur de quelque chose. D’où vient cette valeur ? De celles, symboliques, qu’on a reconnues au sel : conservant les denrées, il les soustrait à la putréfaction. Il est encore pureté et droiture, tendance pervertie à travers la pratique qui consiste, en l’arrondissant grassement, à saler une note : il s’agit de lui ajouter plus de valeur qu’elle n’en a, de la même manière qu’un plat gagne en sapidité et palatabilité quand on y verse quantité satisfaisante de sel. Ainsi, « l’aubergiste qui nous remet une note un peu lourde sacrifie donc à une très vieille et très pure tradition… A moins, bien sûr, qu’il ne veuille simplement se sucrer ! »3, augmentant ainsi son salaire de manière tout à fait artificielle4.

Le pouvoir attractif du sel n’est pas le seul dont il dispose : son statut de protecteur et de purificateur l’a fait employé dans de nombreux rites tout autour du monde, et cela peu ou prou pour les mêmes raisons. Que l’on répande du sel sur le seuil d’une habitation après le départ d’une personne détestable ou bien que l’on asperge les murs d’une eau lustrale salée, l’objectif demeure le même : bannir les énergies négatives qui ont été abandonnées sur les lieux. Ainsi peut-on agir ponctuellement, de même qu’on passe un coup de serpillière sur les traces que laissent les chaussures toutes crottées de quelqu’un qui débarque chez vous tout-à-trac et peu respectueusement. Le sel absorbe donc les énergies néfastes quand on le dispose « en petits tas près de l’entrée des maisons, sur la margelle du puits […], ou sur le sol après les cérémonies funéraires ; le sel a le pouvoir de purifier les lieux et les objets qui, par inadvertance [ou malveillance] se trouveraient souillés »5. On procédait ainsi au Japon, aussi bien à travers les événements de la vie courante que lors des cérémonies shintoïstes. En disposant du sel aux quatre coins d’un pâturage le premier avril de chaque année en Poitou, on adresse une supplique assez semblable (la protection du bétail, empêcher au lait des vaches de tourner, etc.). Outre le fait de débarrasser les lieux d’énergies peu propices au développement harmonieux des individus, le sel est encore mis à contribution pour lutter contre celles qui s’attaquent directement aux personnes, intervenant très fréquemment lors des désenvoûtements : dans les pays d’Afrique du Nord, des pratiques médico-magiques consistent à asperger d’eau salée les personnes qu’on imagine en proie au démon (mais dont certaines sont en fait épileptiques, saisies par des accès de bouffée délirante, d’hystérie ou de colère). Et si jamais l’on n’est pas attaqué, mais que l’on nourrit quelques craintes à ce sujet, l’on aura bien raison de porter sur soi un petit sachet de sel et, au pire, d’envisager de mettre en œuvre une plus grosse artillerie : « Lorsque notre environnement semble se densifier et receler des entités négatives, faites brûler des feuilles de laurier. L’expérience nous apprend qu’il faut ajouter du sel et un peu de thym et d’encens ; les effets sont alors immédiats ; les lieux se dégagent. Cet usage régulier constitue une excellente protection »6.

Si, donc, le sel est capable de mettre en fuite toutes ces mauvaises ondes et de détruire le mal, sans doute que, transposant ses puissantes propriétés au domaine médical, il est tout autant capable de soigner et de guérir les maladies. C’est ce qu’il nous reste à aborder, en balayant rapidement 2000 ans d’histoire médicale, en commençant tout d’abord par le point de vue d’un praticien antique, j’ai nommé Dioscoride, lequel accorde, à plusieurs paragraphes de sa Materia medica, une place pour le sel sous diverses formes : fleur de sel, saumure et sel commun, dont il reconnaît l’utilité, puisque selon lui, « il restreint, il nettoie, il purifie, il abaisse, il subtilie et induit des escarres »7, tout en gardant de la pourriture. On usait alors du sel en onction avec, selon les cas, de l’huile, du vinaigre et/ou du miel, accompagné parfois de graines de lin, d’origan, d’hysope et d’autres plantes encore. Et tout cela pour être appliqué sur des affections principalement externes comme tout ce qui touche spécifiquement à la peau (démangeaisons, croûtes cutanées, excroissances de chair, piqûres et morsures, gale, ulcère), aux oreilles ou encore à la structure ostéomusculaire.

Tandis que les médecins arabes du Moyen âge « conseillent de manger une gousse d’ail crue chaque jour, pilée avec du sel et de l’huile d’olive pour rester en bonne santé »8, un enthousiasme similaire s’empare de l’école de Salerne qui, on le sait, a été profondément influencée par les apports de la médecine arabe de l’époque. Voici, versifié, le propos qu’on tenait à l’endroit du sel dans cette célèbre école campanienne :

« Sur la table, outre la saucière,

Ayez devant vous la salière :

Toute viande sans sel n’a ni goût, ni saveur.

Le sel chasse le venin, corrige la fadeur ».

En revanche, alerte-t-on, tout abus de sel affaiblirait la vue ! Que dit-on du côté de Hildegarde maintenant ? Eh bien, à la lecture de ses principaux ouvrages consacrés à l’art de guérir, l’on peut constater qu’elle tient le sel en haute estime, non seulement à travers l’alimentation, mais encore en médecine, strictement dit : « Manger avec du sel en quantité modérée donne force et santé »9, explique-t-elle tout en mettant en garde contre les carences et les excès ; l’organisme tiédit d’un manque de sel, se dessèche par une alimentation trop salée qui le rend aride et le blesse. Ainsi, du temps de Hildegarde, on ajoutait du sel aux aliments dont ou souhaitait augmenter la comestibilité ou en préparer la salaison, comme le hareng par exemple. De plus, l’on en ajoutait à plusieurs recettes médicinales, car additionner du sel aux médicaments les bonifie. Distinguant le sel blanc purifié du sel brut nature, Hildegarde en remarquait les bons effets contre la « putréfaction », les maux dentaires, etc.

Jetons-nous, maintenant et pour finir, en pleine période moderne : quels rapports entretenait-on avec le sel à la veille de la Révolution française ? Eh bien, l’on était coutumier des douches et bains salés, dont les cures soutenues permettaient de soulager les infiltrations articulaires et les vieux rhumatismes. Tandis qu’en interne, l’on faisait appel aux eaux minérales salines qu’on absorbait à raison de cinq à six pintes par matinée, après purgation au sel de Glauber (sulfate de sodium). Apéritives et purgatives, ces eaux étaient usitées dans les cas où la digestion est entravée, les viscères (foie, rate) et les voies urinaires engorgés. On les administrait encore en cas d’asthme humide, de maladies cutanées (dartre, érysipèle, « gale et teigne ») et de troubles locomoteurs (goutte tophacée, rhumatisme froid). Mais encore fallait-il privilégier les eaux salines naturelles parce que, prévenait Desbois de Rochefort, « les eaux minérales salines factices ne réussissent pas aussi bien. On les prépare en faisant dissoudre une demi once de sel sur une pinte d’eau, mais les effets ne sont pas les mêmes, et il paraît que la nature a une manière toute particulière dans la composition de ces eaux »10. La pratique thermale étoffa son offre surtout au XIXe siècle, où l’on vit cette vogue se propager à la moindre (re)découverte d’une source d’eau chlorurée sodique, qu’elle soit chaude ou froide : dans la première catégorie, l’on peut signaler les cités savoyardes de Moûtiers et de Salins-les Thermes, dans la seconde Salies-du-Salat (Haute-Garonne), Salies-du-Béarn (Pyrénées-Atlantiques), Salses (Pyrénées-Orientales), Lons-le-Saunier (Jura), toutes localités qui portent dans leur nom leur relation historique plus ou moins lointaine avec le sel11, dont la présence fut exploitée par le biais d’eau salée, dont la proportion en sel, si elle est variable (5 à 20 %), doit néanmoins être l’objet d’une température constante, souvent située entre 32 et 35° C. Dans l’histoire des cures thermales, on imagina encore une kyrielle de moyens : douche d’eau chaude salée, douche nasale, étuve, application locale et fomentation, inhalation d’air chargé de vapeurs salines, etc., de quoi satisfaire à tous les genres.

Caractéristiques minéralogiques

  • Composition biochimique : sodium (Na : 39,34 %) et chlore (Cl : 60,66 %). Comporte des inclusions naturelles de chlorure de magnésium, de chlorure de calcium, de brome, d’iode, etc.
  • Densité : 2,1 à 2,2.
  • Dureté : 2 (fragile).
  • Morphologie : cristaux (cubiques, hexaédriques, plus rarement octaédriques), agrégat grenu ou fibreux, croûte, stalactite, macle.
  • Couleurs : blanc, gris, bleuâtre, violet, rosé, rougeâtre, orangé.
  • Éclat : gras, vitreux, terne.
  • Transparence : translucide.
  • Clivage : très bon, parfait (un coup de marteau abat un gros cristal cubique de halite en une multitude de petits cubes).
  • Cassure : conchoïdale.
  • Fusion : gicle au chalumeau avec un phénomène de décrépitation ; colore la flamme en jaune vif.
  • Solubilité : très rapide et aisée dans l’eau.
  • Nettoyage : pour la raison qui précède, on procédera grâce à l’alcool du fait du caractère hygroscopique de la halite.
  • Luminescence : rose, rouge.
  • Morphogenèse : « Les produits d’altération chimique des minéraux entraînés dans les lacs et les mers peuvent à la suite d’autres processus chimiques, précipiter et donner naissance à de nouveaux minéraux. C’est ainsi que naissent les gisement relativement étendus de halite »12. Plus précisément : « Ces gisements se sont formés, sous un climat chaud et sec, par l’évaporation de l’eau salée des golfes en voie de disparition. Le sel de l’eau s’est cristallisé graduellement, formant à l’origine des couches horizontales, qui ont souvent été plissées par la suite. Les couches de sel gemme, très plastiques, ont ainsi formé de puissants dômes de sel qui sont de nos jours le centre même de l’extraction »13.
  • Gisements : très répandus dans la nature. Outre celui qui est dissout dans l’eau de mer, l’on trouve du sel de terre ou sel gemme un peu partout dans le monde et parfois en amas considérables. Parmi les principaux pays producteurs de sel gemme, nous avons le Pakistan qui fournit le célèbre sel rose de l’Himalaya tiré de la mine de Khewra, la Russie (Sibérie), l’Allemagne (Heilbronn, Staßfurt, Berchtesgaden), l’Espagne (Catalogne), la Pologne (Wieliczka), la Grande-Bretagne, la Hongrie, l’Autriche (Hallstatt, Salzkammergut, autrement dit et littéralement : la « bonne mine de sel »). On trouve encore dans certains lieux des « fleurs de sel » : c’est le cas en bordure de la mer Morte (Proche-Orient) et du grand lac salé de l’Utah aux États-Unis.
  • Paragenèse : salmiac, nitronatrite, mirabilite, borax, trona, kainite, anhydrite, gypse, carnallite, sylvine.

Le chlorure de sodium en thérapie

Le plus souvent qualifié de blanc (sic), le sel NaCl est une substance sans odeur, de saveur particulière. Dans les propos qui vont suivre, il sera impérativement fait question du sel terrestre, le sel de mer devant être impérieusement rejeté. Tout d’abord parce qu’il est le plus souvent raffiné, purification obtenue par la séparation du caractère humide et coloré du sel marin, tout d’abord gris, et sa transformation en une substance immaculée, mais aussi morte que la mer du même nom. Le sel naturel n’étant pas intégralement du NaCl (on y trouve aussi un tout petit peu de bromure, d’iode, de nickel, de cobalt, d’argent, d’or…, qui sont tous des éléments catalyseurs d’importance pour la santé humaine), le raffinement permet donc d’obtenir un sel fin et blanc auquel, la plupart du temps, l’on rajoute de l’iode : c’est, ni plus ni moins, qu’un sel déséquilibré, à l’aura pervertie. Tout au contraire, le sel marin, gris et brut, bien que moins aisé à utiliser que le sel fin blanc, n’est certainement « pas nocif aux malades du cœur et ce n’est sûrement pas lui le responsable de l’obésité »14. Le raffinement semble s’expliquer par la volonté de débarrasser ce qui souille le sel brut : il y a un siècle, on avait fait le constat que ce sel était souvent sali par des impuretés et que certains échantillons étaient colonisés par de nombreuses bactéries et autres moisissures, contrairement au sel blanc qui en comportait moins (à moins que le sel ne soit tombé sous le même couperet que la farine, le sucre, etc. que l’on souhaitait intégralement blancs, gage de leur pureté illusoire). Est-ce toujours le cas aujourd’hui ? Le sel gris non raffiné est-il aussi « sale » qu’on l’imaginait autrefois ? Je ne sais. Mais, dans un cas comme dans l’autre, cela ne semble plus avoir d’importance, tant le sel marin est, depuis plusieurs décennies, pollué par tout autre chose, et ce qu’il soit raffiné ou pas : des hydrocarbures, des métaux lourds et des microparticules de plastique toujours plus nombreuses et pas plus grosses que quelques micromètres de long, issues du barattement d’unités plus grosses par les eaux océaniques, qui les broient aussi sûrement que le mortier sous la pression du pilon : mais il s’agit d’une transformation d’état de la matière, non pas d’une disparition magique. Consommer du sel marin aujourd’hui, c’est, par le truchement perfide d’un retour à l’envoyeur qu’on ne soupçonnait pas encore il y a quelques dizaines d’années, s’encrasser soi-même par le biais d’une consommation régulière. Bien que l’absorption du NaCl par l’organisme soit très rapide, le corps se débarrasse de ce qui est inusité par le biais des urines, de la sueur, des larmes, du lait maternel, des excréments, mais il accumule, avec patience et longueur de temps, un stock de plastique qui doit nous faire préférer le sel de terre, comme, par exemple, le sel rose de l’Himalaya, ex sel marin préhistorique non pollué par l’homme qui n’existait pas encore à cette époque.

Le sodium compose pour partie (à hauteur de 40 %) le sel de mer et de terre. C’est l’un des douze piliers de la matière vivante qui ne peut se passer de lui. On en trouve environ 0,73 % dans le plasma sanguin.

Propriétés thérapeutiques

  • Apéritif, digestif, stimulant des sucs digestifs (salive, sucs pancréatique et gastrique), stimulant de la sécrétion biliaire, décongestionnant hépatique, laxatif, réveille la contractilité des muscles de l’estomac et de l’intestin, purgatif (à hautes doses : 20 à 60 g), anthelminthique
  • Fluidifiant sanguin, facilite l’oxygénation du sang, stimule la circulation périphérique, puis générale, mais abdominale surtout, lymphotonique, normalise la pression sanguine
  • Diurétique, régularise la répartition de l’eau dans le corps, stimulant osmotique (l’osmose est la faculté qu’ont les liquides de l’organisme de traverser les membranes, particulièrement celles des voies circulatoires. Ainsi, une augmentation du NaCl sanguin se traduit-elle par une attraction de l’eau des tissus voisins (l’eau suit le sel), ensuite éliminée par les reins), participe aux échanges entre les cellules et le milieu extracellulaire
  • Rééquilibrant du métabolisme, favorise la nutrition générale, alcalinisant du milieu humoral, reconstituant, tonique, indispensable à l’économie (dans un manuel scolaire maintes fois réédité au début du XXe siècle, on peut lire que « si nous en étions privés d’une manière absolue pendant quelques années, cette privation nous occasionnerait des maladies qui pourraient être très graves »15)
  • Action favorable sur la thyroïde (surtout par l’entremise de l’iode naturel que l’on trouve hélas en moins grande quantité dans le sel terrestre par rapport au sel de mer. Iode versus plastique. Au choix…)
  • Calmant, sédatif, apaisant nerveux (quand il contient du brome)
  • Cicatrisant, détersif, résolutif, décongestionnant des muqueuses
  • Antiseptique puissant
  • Détoxiquant : il « constitue un pôle d’attraction pour les substances morbides, de rayonnement négatif. En d’autres termes, il attire et absorbe le mal »16

Usages thérapeutiques

  • Affections bucco-dentaires : inflammation des muqueuses buccales, inflammation gingivale, arthrite dentaire, pyorrhée
  • Troubles de la sphère respiratoire + ORL : maux de gorge, rhume à répétition, lavage des fosses nasales, sinusite
  • Troubles de la sphère gastro-intestinale : dyspepsie avec hypochlorhydrie (le NaCl favorise la bonne acidité gastrique, normalement située entre pH 1 et pH 3. Consommer moins de sel, c’est s’exposer à la dilution du pH des sucs gastriques et ainsi favoriser l’hypochlorhydrie qui mène généralement à faire un abus d’IPP malfaisants), pyrosis, diarrhée avec déshydratation
  • Troubles de la circulation lymphatique : engorgement lymphatique, lymphatisme, scrofulose
  • Hyposurrénalisme
  • Affections cutanées : plaie (et lavage des plaies), ulcère (putride, malin), tumeurs, abcès, furoncle, panaris
  • Lavage des séreuses
  • Troubles de la sphère génitale : retard pubertaire, engorgement de la matrice
  • Anémie, fatigue générale, asthénie physique et psychique
  • Rhumatisme chronique du lymphatique
  • Réduction des œdèmes tissulaire

Modes d’emploi

  • Dans l’alimentation quotidienne : les aliments d’origine végétale comme animale apportent trop peu de NaCl qui doit donc faire l’objet d’une adjonction quotidienne. On évoque, dans certaine littérature, des besoins fixés à deux grammes par jour et par personne. Pour faire réponse à cette indication, précisons qu’« il n’est pas possible d’établir une règle générale concernant l’emploi du sel dans l’alimentation, car c’est une question strictement individuelle à résoudre selon la pléthore ou les carences diverses »17. Selon les médecins Boris Dufournet et Victor Arnould (du site www.sequoiasante.com), les besoins quotidiens se fixent aux environs de 4 à 10 g par jour, en dehors de toute contre-indication liée à une affection rédhibitoire, et concernent avant tout les personnes en bonne santé pratiquant une activité physique régulière. De son côté, Desbois de Rochefort proposait de dissoudre 6 g de sel dans un litre d’eau, tout en ajoutant que « la boisson de la mer est encore meilleure » (18). N’en doutons pas, mais, depuis, deux-cents années de pollution industrielle s’y sont déversées…
  • Cure d’eau minérale chlorurée.
  • Plasma de René Quinton (1866-1925).
  • Bain d’eau salée : pour un adulte, on compte jusqu’à 5 kg de sel pour un bain, pour un enfant cinq à dix fois moins. Dans les deux cas, l’on peut envisager un bain de 15 à 20 mn par semaine.
  • Bain de pieds : deux à trois poignées de sel (125 g) dans une bassine d’eau chaude (40° C environ). A éviter en cas de varices.
  • Bain de bouche : une cuillère à soupe de sel dans un verre d’eau à température ambiante (peut être poursuivi en gargarisme si besoin).
  • Ablution d’eau fraîche légèrement salée.
  • Mélange de sel et d’argile verte : lorsqu’on prépare l’argile verte nécessaire à un cataplasme, on y ajoute une certaine quantité de sel.
  • Sels de Wilhelm Heinrich Schüßler (1821-1898) : on en compte douze dont l’un porte le nom de Natrum muriaticum (c’est-à-dire le chlorure de sodium) dont voici une présentation condensée de type physiologique et psychologique : il « a un fond mélancolique, voire dépressif. Lorsqu’on se plaint sur son sort, cela ne le console pas mais au contraire aggrave son état. Plutôt hypocondriaque, il peut avoir un sentiment de frustration, et souffrir d’insomnie. Sa musculature est faible. Il peut maigrir bien qu’il ait bon appétit. Son dos est souvent douloureux »19.
  • Voici, pour vous aiguiller un peu, une liste d’ingrédients d’origine végétale caractérisés par un plus ou moins fort taux de sodium (et non pas de NaCl, bien entendu) : abricot, ache, artichaut, aubergine, avoine, banane, bardane, betterave (feuilles), bouleau (sève), carotte, cassis, céleri, cerfeuil, châtaigne, chicorée, cresson, criste marine, églantier (cynorrhodon : 146 mg/100 g), épinard (510 mg/100 g), fraise des bois, fucus vésiculeux, garance, gratiole, guarana, gui, guimauve, laitue, lamier blanc, lentille, noisette, oignon, olivier (feuilles), orange, orme, ortie, pêche, persil, pervenche bleue, petit pois, pissenlit, plantain, poire, poireau, pois chiche, pomelo, pomme de terre, prune, raifort, raisin, riz, scabieuse des prés, séneçon, soja, sureau, tamaris, tussilage. On trouve aussi du sodium dans le vinaigre, la spiruline, le pollen, etc.

Précautions d’emploi, contre-indications, autres informations

  • Toxicité : une dose de sel de 15 à 25 g par jour et par personne serait préjudiciable, d’autant plus pour l’enfant. Comment expliquer cette soi-disant toxicité ? 8 à 15 g dans un verre d’eau (qui oserait ?) ne provoquent-ils pas le vomissement ? N’est-ce donc pas là une preuve que le sel est toxique ? On nous a tellement répété, durant des décennies, les méfaits du sel que cette diabolisation semble irréversible. Voici donc précisément ce qu’on lui reproche : « C’est un déshydratant qui déclenche les mécanismes de la soif et qui risque d’augmenter les affections cardiaques, le durcissement des artères, l’hypertension artérielle et surtout l’insuffisance rénale (rétention d’eau) ou hépatique »20. Au banc des accusés, l’on trouve majoritairement l’industrie agro-alimentaire qui pervertit les pauvres masses bêlantes à l’aide de tout ce sel : en tant qu’instrument de conservation des aliments, il est évident qu’on en retrouve beaucoup dans toutes les salaisons (saucisson : 1000 mg/100 g ; jambon fumé : 2100 mg/100 g ; sardine à l’huile : 760 mg/100 g ; thon : 360 mg/100 g, etc). L’industrie agro-alimentaire a effectivement la main lourde de sel, enrichissant de façon certes exagérée ses produits en chlorure de sodium (lequel ?) et autres sels étranges pour en allonger la durée de conservation, rehausser le goût d’ingrédients de base qui en manquent cruellement, stimuler sournoisement l’appétit, poussant ainsi à une consommation accrue de toutes ces bonnes choses bourrées de sel : les chips (à répudier de toute façon à cause non seulement du sel, mais des hydrates de carbone contenus dans les pommes de terre et les huiles végétales polyinsaturées et trans utilisées pour les faire frire : un combo d’horreur !), les cacahuètes, la plupart de ces infâmes plats tout prêts micro-ondables, j’en passe et des meilleurs ! Bien évidemment, il y a fort à parier qu’il s’agit là de ce sel à bannir, de ce blanc, raffiné, mort et pollué, le même qui en fait contre-indiqué l’emploi chez l’obèse et le cardiaque. A ces derniers, l’on a parfois conseillé le jeûne comme moyen de décharger l’organisme : en abaissant le taux de sel excédentaire, l’on réduit l’œdème tissulaire, lequel ne se peut que si il existe une atteinte rénale : « Si les tissus contiennent un excès de chlorure de sodium par suite d’une lésion empêchant son élimination, les vaisseaux laissent passer plus de liquide, d’où formation d’œdème »21. Dans ce cas, une forte absorption de NaCl provoque l’augmentation de la proportion d’eau dans le corps, tandis qu’une diminution de l’apport en NaCl provoque l’inverse.
  • Contre-indications : il importe de limiter la consommation de sel en cas de dyspepsie avec hyperchlorhydrie (cela augmenterait l’acidité gastrique), de prédisposition aux congestions et aux hémorragies, d’ataxie et d’atrophie musculaire progressive. N’oublions pas l’insuffisance cardiaque sévère (consommer du sel en ce cas mènerait à désamorcer la pompe cardiaque) et l’insuffisance rénale (le pouvoir osmotique du sel est précisément dangereux dans ces deux derniers cas).
  • Ceci étant dit, nous pouvons nous autoriser un bref paragraphe portant sur quelques idées reçues sur le sel : tout d’abord, le sel n’est pas cancérigène pour l’estomac comme on a bien voulu le (faire) croire. Ce n’est en tout cas pas l’apanage du chlorure de sodium (l’estomac a justement besoin du chlore contenu dans le sel pour fabriquer l’acide chlorhydrique qu’il contient), très probablement celui des sels nitrités. S’il existe – ce dont on peut douter –, le pouvoir cancérigène du sel n’est à ce jour absolument pas démontré. Ensuite, certaine propagande provenant des autorités de santé semble insinuer dans l’esprit des gens que manger moins sucré équivaut à manger moins salé, ce qui est, bien évidemment, parfaitement faux, le chlorure de sodium étant nécessaire et vital là où le sucre est toxique et dispensable. Pour finir, consommer du sel augmente la pression artérielle : c’est encore une croyance erronée. Si un excès de sel peut provoquer cet effet, il ne se pérennise en aucun cas sur une longue durée, tant la modification de la pression sanguine qu’il induit est fugace. En l’absence de toute pathologie qui en minimise l’emploi, le seul sel ne peut majorer la pression artérielle sur l’ensemble de la journée.
  • A ceux qui emploient le gros sel pour désherber leur jardin, disons leur que la surcharge du sol en sel peut mener à son infertilité durable. Rappelons-nous des Romains. La juste dose suffit en tout : j’ignore si cela se fait toujours, mais à une certaine époque, l’on répandait du sel dans les prairies, ce qui avait pour objectif d’augmenter la saveur du fourrage destiné aux bestiaux qui apprécient également la pierre à sel de l’étable, comme j’ai pu le voir fréquemment, les chèvres de mes grands-parents se livrant avec délectation à cet exercice.
  • De par son puissant pouvoir conservateur et purificateur, le sel (NaCl) accompagna parfois l’alun comme ingrédient des recettes de sels à tanner et à conserver les peaux fines ou épaisses, et celles destinées à la fourrure.

_______________

  1. Pierre Delaveau, La mémoire des mots en médecine, pharmacie et sciences, p. 25.
  2. Jean Chevalier & Alain Gheerbrant, Dictionnaire des symboles, p. 858.
  3. Claude Duneton, La puce à l’oreille, p. 213.
  4. A l’origine, le mot salaire, du latin salarium, correspondait au seul crédit nécessaire à l’achat de sel.
  5. Jean Chevalier & Alain Gheerbrant, Dictionnaire des symboles, p. 858.
  6. Sorcellerie.net, Encens et senteurs, Tome 1, p. 16.
  7. Dioscoride, Materia medica, Livre V, chapitre 75.
  8. Claudine Brelet, Médecines du monde, p. 459.
  9. Hildegarde de Bingen, Physica, p. 95.
  10. Louis Desbois de Rochefort, Cours élémentaire de matière médicale, Tome 1, p. 74.
  11. En effet, toutes ces localités portent une marque salée dans leur nom, bien que l’histoire de chacune diffère de celle des autres. C’est, par exemple, l’extraction du sel remontant probablement à 1500 ans avant J.-C. qui veut à Salies-du-Béarn d’avoir été ainsi baptisée. L’on y trouve, de même qu’à Salies-du-Salat, une fontaine salée exploitée comme telle par les Romains, qui y établirent des thermes toujours actifs, tandis qu’ailleurs ils signalèrent tout bonnement l’existence d’une source d’eau salée, comme cela a été le cas à Salses, commune située au pied du massif des Corbières. Parfois, malgré l’existence avérée de sel dans les eaux, l’heure de gloire des activités thermales a été plus tardive : c’est le cas à Salins-les-Thermes où le premier établissement ne fut fondé qu’en 1820, ou encore à Salies-du-Béarn : l’attrait suscité par les thermes fit que de riches curistes vinrent loger dans les hôtels de luxe que l’on mit à leur disposition, participant ainsi au développement touristique et économique de toute une région.
  12. Rudolf Dud’a & Laboš Rejl, La grande encyclopédie des minéraux, p. 11.
  13. J. Kouřimsky & F. Tvrz, Encyclopédie des minéraux, p. 88.
  14. Jean Valnet, Se soigner avec les légumes, les fruits et les céréales, p. 141.
  15. O. Pavette, Notions élémentaires de sciences, p. 125.
  16. Raymond Dextreit, L’argile qui guérit, p. 38.
  17. Ibidem, p. 37.
  18. Louis Desbois de Rochefort, Cours élémentaire de matière médicale, Tome 1, p. 157.
  19. Sylvie Chernet-Carroy, L’astrologie médicale, p. 185.
  20. Roger Castell, La bioélectronique Vincent, p. 113.
  21. Larousse médical, p. 1127.

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5 réflexions sur “Le sel (ou chlorure de sodium, NaCl)

  1. En Anjou ………. Dans les Cafés , La coutume veut que si le commerce est trop calme (pas assez de clients!) on se mets sur le seuil de la porte d’entrée des clients, .Avec dans la main droite une poignée de gros sel gris ou blanc pour former une croix parterre sur le trottoir ….. Pour faire revenir les clients ! je le faisait souvent …….et ca marchait !

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    • Bonjour et toutes mes excuses pour le retard de réponse !
      Cela signifie que le sel n’attire pas que l’eau mais également les clients qui ont soif ! C’est un bel exemple de magie sympathique. Merci à vous pour le partage.
      Belle fin de journée à vous et belle année 2022 :)

      Aimé par 1 personne

  2. Sans oublier la grande histoire des 1200 ans d’histoire salifère ignigène de Salins les bains. L’existence de résurgences naturelles salées en Franche-Comté s’explique géologiquement par la présence d’une mer préhistorique qui après évaporation a laissé un banc de sel enfoui aujourd’hui à 250 mètres de profondeur.
    « A gouter cette fleur de sel gemme »… https://www.salinesdesalins.com/

    Aimé par 1 personne

    • Bonjour,
      Et que je n’ai pas mentionné dans mon article ! Pourtant, il me semble bien avoir vu passer des photos de ce gigantesque bâtiment. Avec un nom pareil, il ne faut pas chercher bien loin sur l’identité toponymique du lieu.
      Merci beaucoup pour le lien, belle après-midi et vous et surtout belle année 2022 !
      Gilles

      Aimé par 1 personne

  3. Avec plaisir ! C’est moi qui vous remercie pour l’article.
    Belle année et excellente santé 2022 à vous également ! Laurent
    “Le Français ressale ses plats avant de les goûter. C’est pour se venger de la gabelle.” Alain Schifres

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