La réglisse (Glycyrrhiza glabra)

Bien avant de devenir bonbon, la réglisse fut médicament. Côtoyant autant l’échoppe de l’épicier que l’officine du pharmacien, ce dernier ne fit plus appel à elle qu’en raison de son pouvoir édulcorant, ce qui n’était pas exactement faire honneur à cette plante, qu’en d’autres lieux et depuis des millénaires, l’on révère pour d’évidentes propriétés médicinales que l’on n’a pas abandonnées en chemin. Comme le bonbon n’exclut pas le médicament, l’on peut tout à fait suçoter un carensac tout en potassant des articles récents sur la recherche moderne. C’est ce que je me suis amusé à faire pour rédiger ce tout nouvel article !

Bon week-end à toutes et à tous :)

Gilles

Synonymes : bois doux, bois sucré, racine sucrée, racine douce, racine bonne, herbe aux tanneurs, licorice, régalisse, réglisse glabre, réglisse vulgaire, réglisse des boutiques, glycaraton.

Synonymes latins : Glycyrrhiza brachycarpa, Glycyrrhiza glandulifera.

Ce qui, je crois, m’a toujours le plus marqué au sujet de l’histoire médicale de la réglisse, c’est la volonté de n’avoir constamment fait de cette plante médicinale qu’un simple édulcorant. J’ai sous les yeux la quinzième édition de L’Officine de François Dorvault (1910), un énorme pavé de pas loin de 2000 pages. Il est ahurissant d’y constater à quel point le mot réglisse y revient souvent (presque 200 occurrences). Elle entre dans une foule de recettes pour lesquelles elle est pourtant loin d’être un composant majoritaire. Peut-on en conclure, comme le fait Reclu dans son Manuel de l’herboriste (1889) que cette plante « sert surtout à édulcorer les tisanes » ?1 Qu’on demande de masquer le goût désagréable de substances pharmaceutiques peu amènes telles que l’ipéca et la quinine, l’on est certain d’y mêler de la réglisse. Même constat en ce qui concerne l’huile de foie de morue : afin de soustraire la délicatesse des palais juvéniles à la répugnance de cette huile, Cazin proposait la prise concomitante d’extrait de réglisse afin de mieux faire passer la pilule ^.^ S’il s’agit d’une aide à l’administration, alors !… Mais n’a-t-on point l’impression d’avoir affaire à un colifichet ? Le remède ne soigne-t-il point indépendamment ou non de la présence de réglisse ? Peut-on en déduire que la réglisse est dénuée d’effets thérapeutiques qui, si elle les possédait, la feraient préférer pour elle-même ? Quand on prend connaissance d’extraits de textes choisis ici et là au fil de la littérature médicale des siècles passés, on lui voit néanmoins jouer le rôle de gardienne et de nautonière, de celle qui guide et corrige une trajectoire. Ainsi, dans le Grand Albert, il existe une recette d’une tisane purgative contenant séné et réglisse, où cette dernière vient modifier le caractère énergique du séné sur les voies digestives. Ce sont là choses reprises exactement par Jean-Baptiste Chomel au milieu du XVIIIe siècle : « L’usage de cette racine est si commun, qu’on ne fait point de tisane où la réglisse n’entre, soit pour corriger, par sa douceur, la saveur désagréable des autres ingrédients, soit pour lui communiquer la vertu particulière qu’elle a d’adoucir l’âcreté des humeurs qui excitent la toux »2 et celle en provenance d’autres ingrédients drastiques et virulents que les Anciens appréciaient appliquer à l’économie. Ainsi donc, la réglisse retranche ou additionne, réduit l’agressivité au niveau de l’acceptable, caresse comme il se doit telle ou telle substance dans le sens du poil, afin d’en tempérer le caractère bouillonnant, ce qui est toujours mieux que de n’être qu’une bête plante sucrante, c’est-à-dire exactement là où la fit choir Loiseleur-Deslonchamps : « Elle est d’un usage presque général dans la plupart des tisanes, non pas précisément à cause de ses propriétés, mais parce que sa saveur sucrée la rend propre à édulcorer toutes les infusions et décoctions dans lesquelles on ne veut pas se servir de miel ou de sucre. »3 Ah là là, mais c’est une manie, décidément !… A quand une réglisse libre et indépendante, non inféodée à cette vieille prescription qui donne l’impression que celle plante ne participe pas vraiment au relèvement des forces du malade, qu’elle est davantage friandise que remède ? Leclerc, il y a un siècle, allait changer le fusil d’épaule. Tout d’abord en classant la réglisse dans le chapitre des béchiques de son Précis de phytothérapie (ce qui fut remarqué auparavant par Cazin, Roques, Desbois de Rochefort et d’autres encore. Ne dramatisons pas). Et surtout en affirmant que « de récents travaux ont, d’ailleurs, prouvé qu’elle est susceptible de jouer un rôle moins effacé »4 que de seulement servir de sucrette facilitatrice aux prises médicamenteuses redoutables (au su et au vu des études pléthoriques portant sur la réglisse qui s’accumulent depuis ces deux dernières décennies, je ne crois pas que ce soit juste pour y répéter la même vieille antienne qu’on a maintenant un peu de peine et de gêne à lire dans de vieux traités apparemment satisfaits d’eux-mêmes). En effet : comment se contenter d’une seule considération d’ordre gustatif (question en négatif : comment a-t-on pu négliger à ce point une plante majeure qui peut s’inscrire sans difficulté dans le dossier des plantes adaptogènes ? Mais peut-on seulement atteindre une cible que l’on ne vise pas ?) Encore que la satisfaction gustative du malade ne soit pas à mettre sur la deuxième marche du podium. Apprécier que le remède ait bon goût, n’est-ce point l’assurance de guérir plus vite, mais aussi le risque de s’y habituer et de lambiner sur le chemin de la guérison ? On n’en sort donc jamais ! Avoir méjugé des vertus personnelles et inaliénables de la réglisse a-t-il retardé certaines découvertes à son propos comme celle qui eut lieu, de façon tout à fait inopinée il est vrai, en 1946 ? A cette occasion furent révélés les pouvoirs de la réglisse sur les ulcérations de la muqueuse gastrique : elle en soulage les douleurs, aide au processus curatif, réduit le nombre de rechutes, empêche souvent la nécessité du recours à la chirurgie, accomplissant son travail de guérison complète en l’espace de six à huit semaines. Il s’avère, de plus, que la réglisse est plus efficace dans ce rôle que la spécialité allopathique la plus prescrite dans le monde pour ce type de problématique de santé, c’est-à-dire la cimétidine. Le plus étonnant, c’est que la réglisse prend aussi en charge des ulcères gastriques causés par des substances que l’on connaît bien telles que l’aspirine et les AINS (responsables de 20 % des cas d’ulcères gastriques) qui ont la fâcheuse tendance de réduire les sécrétions de prostaglandines protectrices au niveau de l’estomac. Alors, ne fait-elle point merveille ? Quand on pense en dehors de la boîte, tout peut arriver. Parlant de boîte… Devant l’émergence de plus en plus marquée du cancer dans le monde, d’anciens systèmes médicaux ont confronté ce qu’ils possèdent dans leur armoire à pharmacie à cette problématique. C’est le cas de l’Ayurvéda qui met au profit de la médecine moderne un certain nombre de plantes médicinales, dont la réglisse, alias yashtimadhu, en particulier ses vertus apoptotique, antiproliférative, antimétastasique, anti-invasive et anti-oxydante. Reconsidérer une plante à l’aune des objectifs modernes est une nécessité. Il ne faut surtout pas se laisser bercer (berner ?) par l’idée illusoire que tout a déjà été dit à son propos (comment cela se pourrait-il ?). Ainsi, en Inde, l’on a fait remonter à la surface le statut de medhya rasayana de la réglisse, c’est-à-dire son aptitude à rajeunir l’esprit et à le maintenir alerte. Autrement dit, cela signifie que la réglisse promeut la santé mentale et la mémoire, réduit le stress parce qu’elle est anti-oxydante et, donc, à terme, améliore sensiblement la durée et à la qualité de l’existence. En Inde toujours, la prise quotidienne de medhya rasayana (réglisse, gotu kola, guduchi, sankhpushpi, etc.), couplée à la pratique quotidienne du yoga, a pour conséquence d’enrayer le déficit psychique et de prévenir le vieillissement cérébral prématuré. Face au covid-19, la Chine a fait de même : la médecine traditionnelle chinoise est retournée voir dans les armoires à tiroirs si l’un d’entre eux ne contenait pas un remède pouvant contrevenir à la propagation de cette infection virale hautement contagieuse. Le hic, c’est que, afin de répondre à la demande massive, la cueillette anarchique de réglisse s’est emballée en Chine. Aujourd’hui, alors qu’aucune filière de culture solide et pérenne n’est envisagée, la réglisse est en danger de surexploitation et placée et péril depuis 2020 par Traffic.org. De plus, « l’augmentation de la demande mondiale en contexte de pandémie, et l’appauvrissement de la population précarisée par la crise économique qui en découle se combinent pour compromettre, à court ou moyen terme, la survie de nombreuses plantes dont la réglisse. »5 Ce qui est bien regrettable. Tout ne tourne pas rond au pays de Confucius (je vous rassure : il n’y a pas que là-bas. Suffit de se regarder dans un miroir…). Il est vrai que la Chine, au travers du spectre de la médecine traditionnelle chinoise, favorise une commercialisation agressive des plantes médicinales de sa pharmacopée, et cela au mépris des plantes elles-mêmes. Aussi, la médecine traditionnelle chinoise ne considère-t-elle sans doute plus la réglisse à la manière dont les anciens guides de cette médecine séculaire l’appréciaient.

On remarque souvent que le passage du sacré au profane s’accompagne d’une chute. On peut constater cela avec le docteur Israel Brekham. L’effondrement du bloc soviétique en 1991 forma comme un appel d’air pour bien des scientifiques de feue l’URSS. Comme beaucoup d’autres, Brekham se rendit aux États-Unis, où il conçut, peu avant sa mort survenue en 1994, une spécialité toujours vendue à l’heure actuelle, Prime 1. Cette formule, qui contient de l’éleuthérocoque, de la rhodiole, du schisandra, du leuzéa et, donc, de la réglisse, fut utiliser par plus de 150 athlètes étasuniens en prévision des jeux olympiques d’Atlanta de 1996. Du point de vue de l’Ayurvéda, la médecine, qu’elle soit ex soviétique ou étasunienne, demeure toujours une médecine occidentale. Il est pour cela déplorable que la création de Brekham ait été abaissée au niveau de l’appétit de victoire (et de revanche sans doute aussi : quel meilleur triomphe qu’un ex soviétique qui fournisse les athlètes US ?) d’un pays qui ne partage pas la sagesse d’un homme qui souhaitait que chacun puisse trouver le bonheur, la joie et la paix à travers les adaptogènes.

On ne peut invoquer les grains noirs sans faire appel aux perles blanches (dont un certain nombre s’est déjà glissé çà et là dans mon propos…). Revenons à la Chine. Les plus anciens bencao, dont le Shennong Bencao Jing, mentionnent la réglisse ou gan cao. Grillée et préparée au miel, elle est considérée comme une stimulante digestive et une antalgique des voies digestives. La médecine traditionnelle chinoise nous explique qu’en plus d’être harmonisante de l’énergie des méridiens du Poumon et de l’Estomac, elle tonifie le Qi au sein du méridien de la Rate/Pancréas. Tout cela nous plonge dans une ancestralité fort reculée, mais les premières traces qui nous sont parvenues de l’utilisation de la réglisse proviennent des tombeaux des pharaons (dans celui du célèbre Touthakamon, on a découvert bien des trésors, dont de la réglisse). Et l’on sait aussi que les anciens Égyptiens l’utilisaient pour endiguer les catarrhes des voies respiratoires. Au IVe siècle av. J.-C., le Grec Théophraste la mentionne et nous dit que les Scythes en faisaient usage six siècles plus tôt dans le désert, mêlée à du fromage de lait de jument afin d’apaiser leur soif, s’assurant ainsi de pouvoir demeurer dix jours sans manger ni boire, un exploit dont vraisemblablement Alexandre le Grand s’inspira, puisque les soldats de son armée usèrent du même stratagème pour tromper leur soif. Théophraste la recommandait afin de résoudre divers problèmes respiratoires dont la toux et l’étanchement de la soif, pour soigner des blessures en association avec du miel, prescriptions qui s’avèrent toutes exactes comme l’on s’en rendra compte dans la rubrique « usages thérapeutiques ». La réglisse n’échappe bien sûr pas à Dioscoride : « Du regallisse que les Grecs appellent Glycyrrhiza6, les Latins Dulcis radix, les Italiens Regolitia. […] Ce suc [NdA : celui de la réglisse] est efficace sur les âpretés de la trachée-artère, mais il est nécessaire de le faire tenir sous la langue pour l’y faire fondre. Il est bon aux inflammations de l’estomac, à la poitrine et au foie […] Défait en liqueur, il étanche la soif. Appliqué il guérit les plaies, mangé il aide à l’estomac. La décoction de la racine fraîche a puissance sur toutes ces choses. »7 Au même siècle, Pline l’Ancien préconisait lui aussi le glycyrrhizion en cas de problème de toux.

A cette époque, la réglisse est cultivée en Espagne, en Italie ainsi qu’au sud de la France, mais, contrairement à d’autres plantes que les Romains n’hésitèrent pas à emmener avec eux lors de la conquête de la Gaule, et même après, il semblerait que la réglisse n’ait pas fait partie du voyage. Par exemple, elle est absente du Capitulaire de Villis au VIIIe siècle. En revanche, l’on sait bien qu’elle est toujours cultivée en Sicile et en Calabre au XIIIe siècle ainsi que dans d’autres régions du sud de l’Europe au XIIe siècle. Au XVe siècle, cette culture gagne l’Allemagne. Or comment expliquer que la réglisse soit présente dans le Physica de Hildegarde de Bingen en plus de vingt endroits, Physica écrit, je le rappelle, au XIIe siècle ? Hildegarde faisait-elle importer son Liquiricium ? Faisons le tour de l’une des œuvres majeures de l’abbesse où la réglisse est présente au sein de nombreuses recettes : on croise une boisson cordiale, des recettes composées à buts variés (purgative, antitussive et stomacale). Une autre « qui redonne la santé aux intestins fragiles. »8 On en compte encore à visée hépatique et pectorale, etc. Quand Hildegarde se concentre plus spécifiquement sur les vertus de la réglisse, on constate qu’elle l’avait bien cernée : « La réglisse est de chaleur modérée ; elle éclaircit la voix, de quelque manière qu’on la prenne, elle donne un esprit suave, clarifie les yeux, facilite la digestion en adoucissant l’estomac. Elle est surtout utile au frénétique, car s’il en mange souvent, elle éteint la fureur qui est dans son cerveau […] Elle […] assainit la poitrine, donne de la lucidité, écrase et fait disparaître l’humeur noire, car elle n’affaiblit pas les muscles et ne fait pas disparaître l’intelligence de l’esprit. »9 Ce en quoi l’école de Salerne ne lui donnera pas tort, concevant en quelques vers la réputation de la réglisse : « Abreuve tes poumons de poudre de réglisse ; dans leur cavité molle, elle pénètre et glisse. Elle étanche la soif et son suc rafraîchissant chasse de l’estomac toute matière impure.» Quelque part ailleurs dans le Physica, Hildegarde mentionne une recette à base de violettes, de galanga et de réglisse contre la mélancolie. Considérant la réglisse comme un grand remède pulmonaire, Hildegarde, tout comme la médecine traditionnelle chinoise, a remarqué qu’affections pulmonaires et tristesse vont de paire, l’une des principales faiblesses du méridien du Poumon résidant justement dans la mélancolie.

La réglisse fait partie de l’ancienne famille botanique des Papilionacées, ainsi appelée en raison du fait que les espèces qui se groupent sous cette bannière possèdent des fleurs dont la forme évoque un papillon. Aujourd’hui, les choses ont changé, on parle de Fabacées, de faba, la fève. Ainsi des espèces, annuelle comme la fève ou vivace comme le tamarinier, font partie des Fabacées dont la caractéristique commune est de former des gousses contenant plusieurs graines. De l’humble trèfle jusqu’au gigantesque robinier, la réglisse se situe dans l’intervalle, sous-arbrisseau qu’elle est. En effet, cette vivace robuste peut, dans le meilleur des cas, atteindre une hauteur de deux mètres. Ses tiges dressées, creuses et très rameuses s’érigent à partir d’un rhizome souterrain brun-rougeâtre à l’extérieur, jaune à l’intérieur. Toutes ces tiges portent profusion de feuilles glabres, mais visqueuses et glanduleuses, composées de 9 à 17 folioles (feuilles imparipennées), et dont l’allure renforce la ressemblance avec le robinier. A l’aisselle des feuilles, surviennent en juillet et août, des épillets de fleurs formant des grappes pyramidales dont la couleur varie du blanc au bleu-violet (on lui voit également porter du lilas, du violet pâle, du pourpre, du bleu blanchâtre et une espèce de couleur bleuâtre mêlée à du blanc jaunâtre). Elles forment ensuite des fruits en forme de gousses ovales de quelques centimètres de longueur, contenant guère plus que trois à quatre graines brunes presque réniformes.

La profusion de la réglisse ne s’arrête pas qu’à sa seule partie visible car sa souche épaisse donne naissance à des racines, structure souterraine traçante, ligneuse et rampante, qui seront d’autant plus longues que les terres qu’elles traversent sont meubles, légères et profondes, ni trop humides, ni trop sèches. Bien sûr, toutes ces racines qui irradient à partir du pied, donnent ensuite naissance à de nombreux rejets qui formeront de nouvelles plantes, et ainsi de suite.

Le fief probable de la réglisse se situe à l’Europe austro-occidentale, autrement dit les Balkans.

Subspontanée dans le Midi de la France et la Bourgogne (ce qui fait suite à d’anciennes cultures aujourd’hui abandonnées), la réglisse se rencontre plus au nord en raison de sa rusticité grâce à laquelle elle ne craint pas d’affronter le froid. Elle peuple alors les fossés, les bordures de chemins et tous les autres lieux herbeux plutôt fertiles. Là aussi, elle a été cultivée anciennement dans le Poitou et le centre de la France. Jusque dans les années 1940, elle prospérait du côté de Bayonne, de Paris, ainsi qu’en Touraine (Indre-et-Loire). En 1947, Fournier regrettait que la production française soit insuffisante pour qu’il faille importer de la réglisse d’Espagne, d’Italie (de Calabre précisément : à Rossano, on peut visiter le musée de la réglisse), voire de Russie, ce qui montre l’importance qu’on accordait à ce simple hors du commun. Au XXIe siècle, rien n’a vraiment évolué, puisque la réflexion autour d’une filière française de la culture biologique de la réglisse n’a débuté qu’en 2019. Il n’y a pas de mal à bien faire, bien qu’on ait toujours cette sensation qu’il faille que le pire survienne pour se mettre à s’affranchir des monopoles étrangers. Faut-il attendre d’avoir soif pour creuser un puits ?

La réglisse en phytothérapie

L’importance de la seule racine de réglisse en phytothérapie est telle qu’on peut avoir quelque difficulté à imaginer la plante qui la produit. On est généralement étonné de savoir que cette plante partage un certain nombre de points communs avec le haricot et le robinier pseudo-acacia par exemple. Elle réussit aussi à occulter toutes les autres fractions végétales de la plante, chose d’autant plus aisée que l’on n’en fait aucun usage (autrefois, l’on ne se posait pas cette question, tandis qu’aujourd’hui, l’on sait au moins que les feuilles de réglisse abritent des tanins, des flavonoïdes, des saponines et des glycosides. Mais en fait-on des infusions ? Mystère !).

Que contient donc cette fameuse racine à l’odeur quasiment nulle, à la saveur terreuse, douce et quelque peu âcre ? Tout d’abord, une importante fraction de glucides (amidon, polysaccharides), un peu moins de lipides (huile résineuse, phytostérols) et de protéines (acides aminés dont de l’asparagine). Mais la réglisse est principalement connue pour sa glycyrrhizine ou acide glycyrrhizinique (5 à 6 %), saponine triterpénique sous forme de poudre jaune amorphe à la saveur douce et amère, et ses divers métabolites (acides 18α-glycyrrhiténique et 18β-glycyrrhiténique). Parvenus jusque-là, nous n’en avons pas pour autant terminé avec la composition de la racine de réglisse. On y trouve plusieurs isoflavones dont la liquiritine antispasmodique, l’isoliquiritine anti-oxydante et la formononétine à action phyto-œstrogénique, mais bien d’autres encore telles que la génistéine, la licoricidine, la glabridine et les hispaglabridines A et B. Au registre des polyphénols, notons l’existence de chalconoïdes (licochalcone, isoliquiritigénine), de flavonoïdes (glycosides de quercitrine, de lutéoline et d’apigénine, acacétine, hespérétine) et de flavonols (catéchine), d’acide rosmarinique, de tanins… Nous lui voyons encore divers acides organiques (malique), hydroxycinnamiques (chicorique, p-coumarique), terpènes pentacycliques (acide asiatique), enfin un stéroïde proche de la cortisone et de l’ACTH (hormone adrénocorticotrope).

Terminons-en là avec quelques traces d’essence aromatique, des caroténoïdes (β-carotène) et divers oligo-éléments (calcium, magnésium…).

Propriétés thérapeutiques

  • Anti-inflammatoire puissante (à équivalence avec l’hydrocortisone et d’autres hormones corticostéroïdes) par inhibition des cytokines pro-inflammatoires (IL-1, IL-1β, IL-6, TNF-α), anti-oxydante, antiradicalaire (radicaux cationiques à longue durée de vie, radicaux oxygénés à courte durée de vie)10
  • Neuroprotectrice (inhibition du stress mitochondrial et prévention de l’apoptose)11, inhibitrice des sécrétases, nootrope, antidépressive, anxiolytique, antistress, anti-amnésique, procure la clarté mentale
  • Stimulante œstrogénique et équilibrante des niveaux de progestérone et d’œstrogène, renforce les fonctions reproductives féminines, emménagogue, soulage les symptômes de la ménopause, inhibitrice de la prolactine
  • Module les niveaux d’adrénaline, de noradrénaline et de cortisol, mimétique hormonale (cortisol, aldostérone, catécholamine), permet de retrouver force et vitalité
  • Antispasmodique et antalgique du tube digestif, digestive, laxative douce, anti-ulcéreuse gastrique, sédative et cicatrisante de la muqueuse gastrique, gastroprotectrice, calmante du péristaltisme intestinal
  • Expectorante, pectorale, antispasmodique des bronches, antitussive, fluidifiante des sécrétions pharyngées, dépurative des bronches, apaisante des muqueuses respiratoires, anti-asthmatique, réduit la réponse immunitaire chez l’allergique
  • Hypertensive, équilibrante de la glycémie sanguine, normalise le taux d’insuline sanguin, stimule la circulation du sang en direction du système nerveux central
  • Tonique hépatique, hépatoprotectrice12, dépurative hépatique, cholagogue, antidiabétique, régule l’activité des stéroïdes hépatiques
  • Inhibitrice de la LO-5 et de la COX-213
  • Diurétique légère, dépurative, sudorifique
  • Stimulante des surrénales, immunostimulante, immunomodulatrice, immunopotentialisante, amphorétique, régule la réponse immunitaire (hyper/hypo-immunité) dans la plupart des maladies auto-immunes (lupus, sclérodermie, polyarthrite rhumatoïde)
  • Adoucissante, édulcorante (l’acide glycyrrhizinique possède un pouvoir sucrant cinquante fois supérieur à celui du glucose), rafraîchissante
  • Anti-infectieuse : fongistatique (Candida albicans), antibactérienne (Streptococcus mutans, S. sanguis, Porphyromonas gingivalis, Escherichia coli, Pseudomonas aeruginosa, Bacillus subtilis, Mycobacterium tuberculosis, Actinomyces viscosus, Enterococcus faecalis), antivirale (herpès, hépatite, EBV)
  • Anticancéreuse, inhibe la prolifération des métastases (en supprimant l’angiogenèse), ainsi que certaines tumeurs, augmente la sécrétion des cytokines antitumorales (IL-2, IL-6, IL-7) et réduit celle des cytokines pro-tumorales (TNF-α), chimio-préventive, seconde la chimiothérapie et la radiothérapie
  • Ostéoprotectrice, favorable à la santé osseuse
  • Alexipharmaque14

Usages thérapeutiques

  • Troubles de la sphère respiratoire : toux (sèche, grasse, nerveuse), maux de gorge, enrouement, angine, trachéite, laryngite, rhume, coup de froid, rhinite allergique, asthme, bronchite, catarrhe bronchique, coqueluche, respiration sifflante
  • Troubles de la sphère gastro-intestinale : diarrhée, constipation spasmodique, spasmes intestinaux douloureux, manque d’appétit, lourdeur intestinale, irritation gastrique, gastrite, ulcère gastrique (accompagné d’infection bactérienne à Helicobacter pylori adhérente à la muqueuse15), ulcère gastro-duodénal16, acidité gastrique, aérophagie, ballonnement, dyspepsie, entérite, colique, hémorragie gastro-intestinale et endommagement de la muqueuse gastro-intestinale provoqués par absorption d’aspirine et autres AINS, syndrome du côlon irritable, maladie de Crohn, colite ulcéreuse, iléite, syndrome de l’intestin perméable
  • Troubles de la sphère hépatobiliaire : hépatite, cirrhose du foie, diabète
  • Troubles de la sphère cardiovasculaire et circulatoire : hypotension, hypoglycémie, douleur hémorroïdaire, fissure anale
  • Affections buccales : aphte, stomatite, glossite
  • Affections oculaires : conjonctivite, blépharite, inflammation des paupières
  • Troubles locomoteurs : rhumatisme, arthrite, perte de densité minérale osseuse, ostéoporose, tendinopathie d’Achille, maladie de Parkinson
  • Maladie d’Addison (insuffisance surrénalienne chronique)
  • Affections cutanées : plaie, cor, eczéma, psoriasis (l’acide glycyrrhizique est plus efficace que l’hydrocortisone sur ces deux dernières affections), dermite de contact, dermatite allergique, mycose cutanée, alopécie
  • États grippaux et fébriles (le « sucre » de réglisse n’étant pas fermentescible, puisqu’il n’est pas un sucre à proprement parler, il est fort utile aux fébricitants), soif des hydropiques, récupération de l’organisme après infection virale
  • Affections cancéreuses : cancer gastro-intestinal, cancer hormonodépendant (cancer du sein), mucite buccale aiguë du patient cancéreux sous radiothérapie, insuffisance immunitaire du cancéreux17
  • Troubles du système nerveux : stress (extrême, chronique, au long cours), faiblesse surrénalienne, asthénie, fatigue extrême, épuisement, burn out, syndrome d’immunodéficience chronique, dépression, troubles de la mémoire18
  • Troubles de la sphère gynécologique : syndrome prémenstruel, ménopause, hyperprolactinémie

Modes d’emploi

  • Infusion à froid : comptez 5 g de racine de réglisse en infusion dans un décilitre d’eau pendant 20 mn. Elle s’utilise en compresse cutanée locale, mais surtout pour baigner les affections oculaires grâce à une œillère. L’infusion classique dans l’eau chaude qui se destinerait à un usage interne n’est pas conseillée en raison de son amertume et de son âcreté (à moins de minimiser les doses et la durée d’infusion ; à moins que vous n’aimiez cela, ce qui est également possible ^.^). Mieux vaut lui préférer le mode d’emploi suivant :
  • Macération à froid : dans un litre d’eau, déposez 15 à 30 g de racine de réglisse dépouillée de son écorce brune (réglisse ratissée) et martelée, et laissez en contact le temps nécessaire, c’est-à-dire cinq à six bonnes heures (jusqu’à vingt-quatre heures. François Dorvault, dans L’Officine, demande une macération de cinq heures à raison de 10 g de réglisse par litre d’eau). L’avantage de cette macération, c’est que l’eau froide n’emporte pas le principe oléorésineux âcre et amer révélé par l’eau chaude.
  • Décoction : comptez 40 g (et jusqu’à 60 g) de racine de réglisse en décoction dans un litre d’eau pendant un quart d’heure. A l’issue, couvrez et laisser infuser pendant encore 10 mn avant filtrage. Valnet propose 2 à 5 mn de décoction suivie d’une demie-journée de macération. Globalement, ce moyen d’opéré forme une boisson au goût amer et désagréable. Dans le cas d’un usage externe, prévoyez 20 g de racine de réglisse en décoction dans un décilitre d’eau jusqu’à réduction d’un quart. On peut utiliser cette lotion en bain de bouche, en application locale sur les petites plaies et les ecchymoses, etc.
  • Extrait de plante fraîche : peu fréquent, il est parfois proposé par certaines enseignes. A raison de 10 à 30 gouttes dans un verre d’eau, trois fois par jour, à absorber entre les repas.
  • Poudre de racine de réglisse : elle peut s’absorber soigneusement mêlée à du lait chaud ou du ghee. Dosage quotidien : 3 g.
  • Bâton à mâcher (qu’on trouvait autrefois au bureau de tabac). Mesure généralement une douzaine de centimètres. On a le temps de voir venir le bout ^.^
  • Gommes à mâcher dosées à 250-300 mg : trois à six par jour.
  • Capsules dosées à 400-500 mg : jusqu’à six prises par jour. C’est sous cette forme qu’on trouve le plus souvent la réglisse sans glycyrrhizine.
  • Sirop antitussif : 100 g de valériane, 100 g de réglisse, 50 g d’anis vert et 200 g de raisins secs. Procédez par décoction longue à feu doux. Sirop de réglisse : plongez 250 g de racine de réglisse bien broyée dans un litre d’eau et laissez macérer pendant une journée entière. Filtrez et ajoutez à l’eau aromatique ainsi obtenue 1 kg de sucre et faites cuire à petit feu jusqu’à réduction et consistance sirupeuse.
  • Tisane reconstituante : il s’agit de la tisane dite « toute bonne » qu’on servait autrefois dans les hôpitaux. Pour rappel : orge, chiendent et réglisse, un tiers de chaque. « La tisane d’orge ou de chiendent, avec un peu de réglisse pour la sucrer, est une des boissons les plus simples et les plus utiles, dans les phlegmasies internes, dans les affections aiguës de l’appareil urinaire. Elle rafraîchit les tissus organiques, calme la soif et la chaleur fébrile. Une demie-once de réglisse et autant d’orge ou de chiendent suffisent pour une pinte de tisane. […] La réglisse est le remède du pauvre, de l’ouvrier, de l’homme laborieux. L’orge, le chiendent, la réglisse, et un peu de repos, voilà ses meilleurs médicaments quand il est échauffé, fatigué, irrité », disait Roques à son propos19. Valnet renchérissait après lui : la toute-bonne est « une recette à conserver précieusement pour s’en servir à tout propos. Non remboursé par la Sécurité Sociale, mais que d’avantages ! »20

Précautions d’emploi, contre-indications, autres informations

  • Récolte : il est nécessaire d’attendre au moins l’automne de la troisième année (ou le printemps de l’année suivante) pour procéder à l’arrachage des racines de réglisse qui représente un travail fastidieux au point que « comme chef-d’œuvre de maîtrise, nous explique Fournier, la corporation des jardiniers de Bamberg demandait au candidat de déterrer entièrement une racine de réglisse. »21 Cela devait sans doute faire la preuve de sa hardiesse et de son intelligence, entre autres. Puis les racines sont mondées, lavées, séchées au soleil ou bien au grenier, puis mises en bottes. Alors qu’on utilise plus volontiers la réglisse à l’état sec, autrefois, les herboristes la conservaient fraîchement arrachée dans du sable fin.
  • Parmi les effets indésirables imputables à la réglisse, le plus commenté est sans doute celui-ci : une trop grande consommation de réglisse peut entraîner une hypertension artérielle, ainsi que des troubles du rythme cardiaque (arythmie), une rétention du sodium et une chute du taux de potassium sanguin (hypokaliémie) à travers ce que l’on appelle pseudo-hyperaldostéronisme. Les hypertendus doivent donc se l’interdire, ainsi que les personnes sujettes aux pathologies rénales (insuffisance rénale sévère). D’autres effets indésirables peuvent survenir à long terme : œdème, rétention d’eau, maux de tête, vertige et étourdissement, désordres musculaires (hypertonie), etc. Même si l’on n’est pas hypertendu, il est conseillé de ne pas faire d’abus de cette plante, qui s’administrera toujours en petites quantités sur de courtes périodes (trois à six semaines). Une fois son travail achevé, on arrête les prises. On ne peut en faire un usage à long terme, même de confort, ou sous forme de confiseries et de bâtons à mâcher (un par jour au maximum). Parallèlement à une prise thérapeutique de réglisse, il faut veiller à compenser la perte en potassium par une alimentation enrichie en ce macro-élément. Dans plusieurs autres cas, il n’est pas recommandé de faire consommation de réglisse : grossesse, allaitement, anémie.
  • Par ailleurs, la réglisse accentue l’effet de certains médicaments comme les digitaliques (digitaline), certains diurétiques (thiazide), laxatifs, antihypertenseurs, corticoïdes, contraceptifs oraux, anticoagulants, antiplaquettaires, IPP (oméprazole) et toutes autres drogues contribuant à des pertes notoires en potassium. Mais tout cela demande néanmoins à être nuancé, comme nous l’apprenait une étude de 201122. Une trop grande consommation d’alcool n’est pas non plus compatible avec la prise régulière de réglisse.
  • On signale régulièrement que la racine de réglisse est souvent contaminée par une mycotoxine, l’ochratoxine A, qui pullule singulièrement sur les plantes céréalières et les légumineuses du type fabacées. Si les mycotoxines envahissent plutôt les semences de ces plantes, l’ochratoxine A semble également apprécier les parties souterraines de la réglisse. Bien que potentiellement cancérigène et néphrotoxique, l’ochratoxine A n’est pas la moindre des mycotoxines dont, bizarrement, l’on parle assez peu en France.
  • Il est tout à fait possible d’accompagner les effets pectoraux de la réglisse et de les augmenter grâce à d’autres plantes au profil similaire telles que la guimauve, la mauve, le bouillon-blanc ou encore la violette. Même chose si l’on recherche une stimulation des sécrétions biliaires : on assortira la réglisse d’armoise vulgaire, de fumeterre, de romarin ou encore de menthe poivrée.
  • Alimentation : la réglisse, par son suc, entre dans l’élaboration de l’arôme de certaines boissons dont, bien sûr, la fameuse Antésite à diluer dans de l’eau (initialement, spécialité d’apothicairerie concoctée à Voiron par Noël Perrot-Berton en 1898), des apéritifs anisés (pastis de Marseille), des bières brunes comme la Guinness, auxquelles la réglisse confère davantage de couleur et de douceur, etc. N’omettons pas de mentionner la boisson qui fit fureur à Paris dès la fin du XVIIe siècle et ce jusqu’à la Révolution, un breuvage nommé « coco » car elle était servie dans une demie-noix de coco. Vendue dans les cafés, dans les jardins publics et sur les boulevards, cette boisson consistait en de la poudre de racine de réglisse additionnée d’anis, de citron, de fenouil, de coriandre, de cannelle, etc. Un liard le verre ! Autant dire que c’était une boisson bon marché. Enfin, n’oublions pas le rôle majeur de la réglisse dans le domaine de la confiserie, que l’on trouvait sous la forme de pâtes de réglisse blanche, brune et noire, et que l’on se procurait tantôt chez le pharmacien, tantôt chez l’épicier, sans qu’on sache vraiment à quel univers précis ces créatures appartenaient. Il y a des créations qui empruntent à des domaines alternatifs : la confiserie festive et récréative du type Haribo dut dérouler des trésors d’ingéniosité pour faire avaler aux bambins une bimbeloterie (rouleaux, carensac, etc.) où l’extrait de réglisse – s’il existe encore – baigne dans le sucre !
  • C’est pour tout ou partie de ces raisons que la réglisse fut maintes fois falsifiée au cours des siècles, d’autant plus quand on la présentait sous forme de poudre ou de spécialités toutes faites dans lesquelles le quidam serait bien incapable de déceler la fraude, s’il y en avait une. Ainsi, au XIXe siècle, l’on préférait, pour la pratique médicale, le suc de réglisse émanant de la pharmacie plutôt que de l’épicerie.
  • Autres usages : du suc de réglisse l’on peut faire une teinture brune ; les fibres ont permis la fabrication de papier, de brosses et d’autres objets usuels ; l’arôme de la réglisse fut énormément utilisé dans l’industrie tabatière afin de sucrer le tabac à mâcher. La connexion entre la réglisse et le tabac n’est pas innocente et me rappelle une anecdote familiale : « Qui n’a mâché le ‘bois de réglisse’ jaune, fibreux et sucré dont les petits fagots, à l’étal poussiéreux de l’épicier, éveillaient notre humble convoitise d’enfants ? », questionne Pierre Lieutaghi23. Ce même bâton venait aussi parfois compenser une addiction plus morbide : la cigarette (par la forme commune des deux objets, le fait qu’on les mette à la bouche, etc.). Ce qui était d’autant plus ironique que le bâton de réglisse était parfois vendu chez le buraliste. Du moins, c’est chez lui que mon grand-père paternel se rendait autrefois pour s’acheter des gauloises caporal, à moins bon goût mais à coût autrement plus élevé, d’autant que ce boulanger à la retraite, souffrait déjà d’une insuffisance respiratoire à force d’avoir travaillé sa vie durant parmi les poussières de farine de blé. Le médecin lui fit donc abandonner, tant bien que mal, le goût qu’il entretenait pour le tabac, et se prit dès lors à suçoter et à rogner, journellement, ses bâtons de réglisse qui incarnent pour moi un marqueur temporel et émotionnel fort. Ils me rapprochent par l’affection et la pensée de mon grand-père quand il m’arrive de voir de ces bâtons dans certains magasins, qui ne comptent néanmoins plus ni l’épicier ni le bureau de tabac.
  • Autres espèces : la réglisse de l’Oural (Glycyrrhiza uralensis), la réglisse épineuse (G. echinata), la réglisse américaine (G. lepidota), la réglisse chinoise (G. inflata).

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  1. M. Reclu, Manuel de l’herboriste, p. 78.
  2. Jean-Baptiste Chomel, Abrégé de l’histoire des plantes usuelles, p. 75-76.
  3. Jean-Louis-Auguste Loiseleur-Deslonchamps, Manuel des plantes usuelles indigènes, Tome 1, p. 57.
  4. Henri Leclerc, Précis de phytothérapie, p. 244.
  5. Aline Mercan, Manuel de phytothérapie éco-responsable, p. 113.
  6. Glycyrrhiza ou parfois glukurrhiza se décompose selon deux mots grecs : glykys, « sucré » et rhidza, « racine ». Ce glykys n’a pas limité sa descendance à la seule racine sucrée puisqu’on le retrouve dans de nombreux mots de la langue française tels que, pour prendre les exemples les plus connus, glucose et glycémie.
  7. Dioscoride, Materia medica, III, 5.
  8. Hildegarde de Bingen, Physica, p. 41.
  9. Ibidem, p. 32-41.
  10. « Ces échantillons d’extrait de Glycyrrhiza glabra ont le potentiel de devenir une alternative naturelle aux thérapies existantes pour l’élimination des infections bactériennes ou la prévention du vieillissement prématuré causé par les radicaux libres et le stress oxydatif dans le corps humain » (Source).
  11. « Le système ayurvédique indien classe yashtimadhu comme un Medhya Rasayana qui peut améliorer la fonction cérébrale et la mémoire, et possède des fonctions neuroprotectrices, qui peuvent être utilisées contre les maladies neurodégénératives comme la maladie de Parkinson » (Source).
  12. « Elle augmente les niveaux de glutathion hépatique et aide à réparer les hépatocytes endommagés  » (David Winston, Adaptogens. Herbs for strenght, stamina and stress relief, p. 134).
  13. « Dans cette étude, nous démontrons pour la première fois que l’extrait de Glycyrrhiza glabra supprime efficacement la formation d’eicosanoïdes et de leucotriènes dans les systèmes sans cellules, ce qui implique que cet extrait agit directement comme un double inhibiteur des activités 5-LO et COX-2 » (Source).
  14. Contre les poisons et produits toxiques : « Il est également utilisé en Chine pour soulager les symptômes d’empoisonnement causés par les pesticides, les herbicides, l’arsenic, le plomb et les médicaments pharmaceutiques » (David Winston, Adaptogens. Herbs for strenght, stamina and stress relief, p. 288).
  15. En cas d’ulcère gastrique, il est judicieux d’éviter la réglisse sous forme capsulaire, puisqu’en ce cas précis, elle doit être avant tout placée au contact de la salive. Les prises auront lieu en dehors des repas, au moins à 20 mn avant chacun d’entre eux.
  16. « Les éléments actifs du suc de réglisse permettent la constitution rapide de cellules nouvelles, et la tension superficielle élevée du suc couvre d’un film protecteur la lésion de la muqueuse irritée. Celle-ci se cicatrise donc plus rapidement » (Petit Larousse des plantes médicinales, p. 297).
  17. « La réglisse est un amphotère immunitaire qui s’est avéré avoir des effets cytotoxiques sur les cellules tumorales et, en raison de sa teneur en isoflavones, peut ralentir la progression des cancers œstrogénosensibles et inhiber les métastases » (David Winston, Adaptogens. Herbs for strenght, stamina and stress relief, p. 123).
  18. « Les antioxydants protègent les cellules sensibles du cerveau du stress oxydatif, ce qui réduit les dommages au cerveau et améliore la fonction neuronale, améliorant ainsi la mémoire » (Source).
  19. Joseph Roques, Nouveau traité des plantes usuelles, Tome 2, p. 149.
  20. Jean Valnet, La phytothérapie, p. 444.
  21. Paul-Victor Fournier, Dictionnaire des plantes médicinales et vénéneuses de France, p. 810.
  22. «  Les résultats démontrent que Glycyrrhiza glabra et son principal composé bio-actif, la glycyrrhizine, lorsqu’il était co-administré avec des médicaments conventionnels, ne montrait qu’un faible potentiel d’interaction avec les enzymes de métabolisation des médicaments » (Source).
  23. Pierre Lieutaghi, Le livre des bonnes herbes, p. 375.

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