Synonymes : feuille de sucre, feuille de miel, miel-yerba, herbe douce, feuille sucrée du Paraguay, plante sucrée du Paraguay, stévia de Rebaudi, chanvre d’eau. En anglais : candy leaf, sweet leaf, honey leaf. En chinois : 甜菊.
Pendant près d’un millénaire, les Indiens Guarani côtoyèrent une plante avant que le reste du monde soit informé de son existence. Cette plante, si jalousement gardée durant des siècles, parvint tout de même en Europe dès le XVIe siècle en compagnie de tout un contingent d’autres plantes sud-américaines. Mais il semble qu’on s’y soit peu intéressé pendant tout ce temps, malgré sa propriété de goûter sucré sans en comporter les désavantages. C’est au Paraguay que revint l’honneur de faire publiquement émerger cette plante jusqu’alors connue uniquement des Guarani qui l’employaient couramment afin de corriger l’amertume du maté (de même qu’on met du sucre dans le café). Elle était vue par eux comme une plante miraculeuse, sorte de panacée comme la plupart des yuyos et pour nous autres la sauge officinale par exemple. Mais méprisée, la culture de cette plante resta longtemps marginale et peu remarquée. Pourtant, à la fin du XIXe siècle, s’amorça un mouvement de reconnaissance de celle à qui Antonio José de Cavanilles donna en 1797 le nom de Stevia en l’honneur du botaniste espagnol de la Renaissance Pedro Jaime Esteve, latinisé en Petrus Jacobus Stevus (1500-1556).
Après que les Indiens Guarani lui en eurent confié des plants, le botaniste Moïse Bertoni (né en Suisse en 1857, parvenu au Paraguay en 1887, décédé au Brésil en 1929) étudia longuement cette plante que les autochtones nommaient ka’a heê (l’herbe douce) ou encore ka’a eirete (l’herbe à miel). Le sage, comme on surnommait Bertoni, ne se contenta pas que de la stévia, puisqu’il étudia également le maté entre autres. Il est reconnu comme étant le « découvreur » non autochtone de la stévia en 1887. En 1900, un chimiste paraguayen, Ovidio Rebaudi (1860-1931), se pencha sur les propriétés physico-chimiques de la stévia. A cette occasion, il découvrit que le goût sucré de la plante était causé par quelque chose d’autre que le saccharose. En 1908, Rasenack isola l’un des principes sucrés, le stévioside, tandis que l’année suivante, un autre chimiste-pharmacien fit la remarque que la culture de la stévia au Paraguay connaissait un succès grandissant. En 1931, ce fut au tour de deux chimistes français, M. Bridel et R. Lavieille, de partir à la recherche du principe sucrant de la stévia. Ils tirèrent des feuilles 6 % d’une substance cristallisée de couleur blanche, le stévioside.
En 1941, le blocus allemand de la Grande-Bretagne contraignit les Anglais, qui rencontraient des difficultés d’approvisionnement, à rechercher un substitut au sucre qui ne leur parvenait plus. En réaction aux entraves économiques, ils entreprirent la mise en culture de la stévia, ce qui n’est pas complètement idiot, le climat britannique convenant mieux à la stévia qu’à la canne à sucre ! Comme les Européens continentaux avec la betterave, à l’époque des blocus napoléoniens du XIXe siècle, les Anglais rencontrèrent peu de succès avec ces cultures de stévia, au contraire des Japonais qui tentèrent de premiers essais sous serre en 1954. Les bons résultats qu’ils en obtinrent les autorisèrent, dès la fin des années 1960, à interdire la totalité des édulcorants de synthèse sur l’ensemble du territoire japonais dont le diaboliquement célèbre aspartame. Cette superbe opportunité pour la stévia explique qu’actuellement 40 % du marché japonais des édulcorants soient occupés par cette plante, ce qui n’est pas qu’un emploi anecdotique, comme on peut le voir en Occident1. Cet emploi s’explique aussi pour des raisons qui poussèrent de plus en plus de Japonais à abandonner le sucre, facteur d’obésité, de diabète et de carie dentaire. Cela en fait une plante impliquée dans bien des préparations alimentaires au Japon, d’autant plus que sa qualité dulcorante se double d’une totale absence de toxicité.
Par manque de place, la culture de la stévia s’est orientée en direction de la Chine qui fournissait en 2012 plus des ¾ du marché mondial de stévia, approvisionnant largement une bonne part de l’Asie du Sud-Est (Thaïlande, Corée du Sud, Taïwan, Malaisie, etc.), formant là l’une des trois zones mondiales d’utilisation de la stévia, qui se distingue très bien de celle formée par l’Amérique du Sud (Paraguay, Brésil, Argentine, Colombie, Pérou, Bolivie), l’Amérique centrale (Mexique) et le sous-continent indien, où l’on fait, en plus de la cultiver, un usage coutumier de la plante, au contraire de la troisième grande zone géographique qui ne comprend aucun grand pays producteur et qui ne fait de la stévia qu’un usage « moderne » au travers des seuls glycosides de stéviol, négligeant la plante entière qu’en ces pays (Amérique du Nord, Russie, Europe, Océanie) l’on connaît peu ou pas du tout. Le fort potentiel biologique de la stévia a fait que cette plante est cultivée aussi bien au Kenya qu’en Europe méridionale (Espagne, Italie, Grèce), ce qui est louable dans la perspective de faire connaître ce trésor végétal et non de faire preuve de biopiraterie qui ne profite jamais aux populations de la zone géographique d’origine de la stévia, c’est-à-dire les paysans de la cordillère paraguayenne d’Amambay, au nord-est du pays. Pas sûr, en effet, qu’on pense aux Guarani quand l’on a face à soi une petite boîte, le plus souvent blanche et verte, remplie de comprimés où l’on a dilué, à la manière des comprimés neutres dont on use en aromathérapie, un peu des principes sucrés dissimulés sous l’appellation « glycosides de stéviol ». Le sucre, surtout, a toujours autant de poids : en 2011, au Paraguay, on produisait 2000 fois plus de sucre que de stévia (pour une production annuelle estimée à 2640 tonnes, largement dérisoire par rapport aux 90 000 tonnes produites annuellement par les Chinois).
La stévia est une plante vivace peu ligneuse hormis à sa base. De fait, son allure élancée – les pieds peuvent atteindre 0,80 à 1 m de hauteur (en particulier ceux qui sont cultivés) – expose ses rameaux cassants au vent dont on se méfiera. Sur ses tiges pubescentes, l’on voit s’empiler des paires de feuilles opposées, à texture un peu épaisse, en gouttière, crénelées de part et d’autre de huit à neuf crans arrondis et non piquants, et dont le limbe légèrement rugueux est couvert d’un réseau de nervures très nettement visibles. Dans les parties hautes de la plante, l’on voit émerger au moment de la floraison des hampes florales à partir de l’aisselle des feuilles : les petites fleurs blanches à cinq pétales de la stévia sont généralement groupées par petits panicules de cinq. Cela, c’est ce qu’on observe si l’on a chez soi une stévia à but essentiellement ornemental. Mais si l’on souhaite la cultiver pour ses feuilles, l’on ne voit habituellement jamais les fleurs, puisque la stévia se récolte avant floraison. De plus, l’on voit d’autant moins les fleurs que, afin d’encourager la ramification latérale et subséquemment l’obtention d’une plante buissonnante, l’on conseille de pincer la plante toutes les trois semaines pendant environ deux mois.
La stévia se sème au printemps sous abri et à une chaleur assez élevée. Elle se repique deux mois plus tard. Alors, elle demande une exposition ensoleillée (mais pas caniculaire non plus), un sol humide, mais sablonneux et bien drainé (en cas de culture en pot, prévoir une couche de billes d’argile au fond). Durant la croissance de la plante, éviter l’adjonction d’engrais abondamment azotés : s’ils produisent de grandes feuilles, elles ont néanmoins peu de saveur. A l’été, afin de conserver la fraîcheur souterraine nécessaire aux racines, l’on pourra pailler les pieds. A l’hiver, les parties aériennes disparaissent et l’on peut protéger la plante à l’aide d’un voile d’hivernage si l’on craint que le gel ne fasse subir à la plante quelque avarie.
La stévia en phytothérapie
Par le mot stévia, on entend généralement les feuilles séchées de la plante ainsi que la poudre verte qu’on en tire, aussi bien que ces préparations du type édulcorant de table composés d’un agent de charge auquel sont mêlés des extraits de la plante qu’en France on libelle selon la formule peu précise de « glycosides de stéviol ». L’emploi de l’un ou de l’autre n’a pas la même portée, puisqu’on bénéficie du totum d’une part, mais pas de l’autre. Ainsi, la plupart des informations qui suivent concernent essentiellement la stévia en tant que plante médicinale, non comme l’additif alimentaire estampillé E960.
Que l’on considère 100 g de feuilles de stévia séchées, l’on y trouvera :
- Hydrates de carbone : 60 g (quand on dit que la stévia ne contient aucun glucide, on parle bien évidemment de son extrait)
- Fibres : 10 g
- Protéines : 9 g
- Cendres : 8 g
- Lipides : 4,50 g
Élargissons notre regard. L’importante richesse de la stévia en phytonutriments explique en quoi ses extraits présentent des avantages négligeables sur ce point. Dans la stévia, sont présents l’ensemble des substances suivantes :
- des vitamines : B1, B2, B3, C ; du β-carotène ;
- des sels minéraux et oligo-éléments : potassium, magnésium, calcium, phosphore, sodium, manganèse, sélénium, silicium, zinc, cobalt, chrome, aluminium, fer ;
- des phytostérols : stigmastérol, β-sitostérol, campestérol (le même trio que dans le cacao) ;
- des flavonoïdes (quercétine) ;
- des diterpènes et des triterpènes ;
- une essence aromatique (l’on croise parfois une huile essentielle de stévia, rarissime) ;
- enfin les fameux glycosides : on retient surtout le stévioside et le rébaudioside A parce qu’ils sont proportionnellement les plus représentés. Chez l’un et l’autre, le goût sucré apparaît bien après qu’il ne se manifeste chez le sucre et s’accompagne, surtout chez le stévioside, d’un soupçon de saveur de réglisse qui n’est pas toujours apprécié, tandis que le goût sucré du rébaudioside est jugé beaucoup plus fin. D’autres glycosides les accompagnent : les rébaudiosides B, C, D, E et F, le dulcoside A, le stéviolbioside, l’isostéviol et le rubusoside.
Propriétés thérapeutiques
- Antihyperglycémiante (maintient les niveaux de cholestérol total, de triglycérides, de lipoprotéines de très faible densité (VLDL), de lipoprotéines de faible densité (LDL), de lipoprotéines de haute densité (HDL), assure un bon ratio HDL/LDL), hypolipidémique, maintient le taux de glucose sanguin à jeun et en phase post-prandiale, diminue l’absorption intestinale du glucose, soutient le bon fonctionnement du pancréas et encadre le taux d’insuline et de glucagon, maintient un niveau sain de glycogènes musculaires et hépatiques, antidiabétique, soutient la bonne santé de la cellule hépatique, hépatoprotectrice
- Diurétique, natriurétique
- Apéritive, digestive
- Anti-infectieuse : antifongique à large spectre (candida, aspergillus, cryptococcus), antivirale (herpès, rotavirus), antibactérienne (Borrelia burgdoferi)
- Hypotensive, vasodilatatrice, maintient le taux d’angiotensine II
- Anti-inflammatoire
- Anti-oxydante, lutte contre le stress oxydatif
- Anticancéreuse (utérus, pancréas, côlon)
- Édulcorante non fermentescible ne causant pas de réaction de Maillard à la cuisson
- Anti-ostéoporotique
- Pro-énergétique
- Augmente la vigilance mentale
Usages thérapeutiques
- Troubles de la sphère hépatopancréatique : hyperinsulinisme, résistance à l’insuline, diabète de type II, diabète sucré non-insulinodépendant, amélioration des lésions hépatiques aiguës et chroniques, phénylcétonurie
- Troubles de la sphère vésico-rénale : insuffisance rénale chronique du diabétique, cystite
- Troubles de la sphère gastro-intestinale : diarrhée d’origine virale, dyspepsie, brûlure d’estomac
- Affections bucco-dentaires : gingivite, saignement des gencives, empêche le développement de la plaque dentaire et la formation des caries, bouton de fièvre (herpès labial), maux de gorge
- Affections cutanées : dermatite, acné, pellicules
- Obésité
- Hypertension artérielle
- Maladie de Lyme
En conclusion, « la plante est donc à la fois un substitut à l’usage du sucre et une médecine à ses conséquences néfastes comme le diabète ou l’obésité »2.
Modes d’emploi
- Infusion de feuilles sèches ou fraîches : une cuillerée à café de feuilles sèches ou fraîches hachées dans une tasse d’eau bouillante pendant 5 mn. Il est possible de boire cette infusion tel quel après l’avoir passée et exprimée, ou bien la laisser refroidir pour en faire un édulcorant liquide stockable au frigo pour quelques jours. Notons ici que le stévioside ainsi que les autres glycosides de stévia sont parfaitement solubles dans l’eau.
- Sucrer une boisson : ajouter quelques feuilles ou la valeur d’une pointe de couteau de poudre de feuilles à un verre ou une tasse de 15 cl.
- Poudre de feuilles : pour « sucrer » une boisson froide ou chaude, par exemple. Son avantage sur les feuilles, c’est qu’on absorbe la totalité de la stévia par ce biais et qu’on ne profite pas que des seuls principes édulcorants tout en rejetant les feuilles une fois infusées.
- Extrait hydro-alcoolique : suspension hydro-alcoolique d’extraits de feuille de stévia (très souvent, il s’agit des deux principaux glycosides, le stévioside et le rébaudioside A). Conditionné en flacon de verre ambré muni d’une pipette, cette préparation est fort pratique et s’utilise à raison de deux gouttes par jour diluées dans un verre d’eau. L’on augmente la dose de deux gouttes par jour, jusqu’à atteindre trente gouttes, puis l’on entame une phase décroissante. Attention pour les malades de Lyme : sous cette forme, les extraits de stévia sont susceptibles de provoquer une réaction de Jarisch-Herxheimer.
- Masque pour le visage : macération huileuse (huile d’olive) de poudre de feuilles de stévia (à conserver au réfrigérateur).
Note : penchons-nous sur la délicate question des équivalence, chose bien nécessaire quand on voit la profusion d’informations qui fleurissent sur les emballages des produits qui touchent de près ou de loin à la stévia. Par exemple, quand vous lisez sur une boîte en plastique pas plus grosse que celles dans lesquelles on empile les Tic Tac, que 15 g de poudre équivalent au pouvoir sucrant de 3,38 kg de sucre blanc, il ne s’agit assurément pas du même produit que celui que propose la firme Biovia qui signale à notre attention qu’une cuillerée à café (apparemment bombée) de poudre de feuilles de stévia équivaut à trois morceaux de sucre (si morceau standard : 18 g). A partir de données chiffrés que j’ai pu recueillir après ma récente tournée d’inspection auprès des magasins spécialisés qui fournissent ce type de produits, je puis dire que :
- les feuilles possèdent une intensité sucrée quinze fois plus importante que leur même poids de sucre ;
- pour le stévioside, elle est multipliée par 300 ;
- ½ cuillerée à café d’extrait de stévia en poudre = 1 ½ à 2 cuillerées à café de poudre de feuilles de stévia = 1 tasse de sucre blanc (style tasse à café de taille moyenne, pas le mug géant de 60 cl !) ;
- du côté de l’extrait hydro-alcoolique, le pouvoir sucrant de seulement deux gouttes représente une cuillerée à café de sucre blanc (cela peut varier : l’important est de déterminer combien de gouttes sont nécessaires pour se rapprocher de la saveur sucrée d’une valeur étalon de sucre blanc en poudre et qui sera satisfaisante à chacun selon son goût).
Précautions d’emploi, contre-indications, autres informations
- Récolte : oscillant de juillet à début octobre, nous nous contenterons de spécifier qu’elle doit impérativement s’opérer en sectionnant la plante à la base juste avant l’apparition des boutons floraux et préférablement le matin, période de la journée où la teneur en glycosides est la plus élevée. Cela doit être obligatoirement respecté, car une floraison trop avancée transfert au feuillage un goût amer peu agréable.
- Séchage : éviter les déshydrateurs électriques ainsi que le séchage à la bouche du four, car tout cela promeut la formation d’amertume dans la plante. Bref, on suspend les tiges tête en bas sur une ficelle, on laisse sécher à l’ombre, au chaud, dans un local assez ventilé, jusqu’à ce que les feuilles craquent sous les doigts. Puis on monde les feuilles, on rejette les tiges, l’on ensache ou l’on moud les feuilles sèches à l’aide d’un moulin à café. La stévia, qu’elle soit sous forme de poudre ou de feuilles sèches, se conserve bien d’une récolte à la suivante.
- La stévia est généralement bien tolérée par la plupart des personnes qui l’utilisent. Les possibles nausées et l’étourdissement qui se manifestent parfois au début de la prise disparaissent généralement rapidement. Elle ne provoque pas d’allergie (du moins, rien de connu dans ce sens à ce jour) et présente une parfaite innocuité aux doses usuelles. Comme elle n’entraîne aucun pic glycémique après ingestion, elle n’est pas addictive comme le sucre et ne provoque donc aucun phénomène d’accoutumance. Elle peut à la rigueur augmenter le taux de lithium par effet diurétique accru et chute de l’excrétion naturelle de lithium.
- La consommation de saccharose, véritable problème de salubrité publique de par la pléthore de maux dont elle afflige celui qui tombe dans son piège doucereux, est responsable de statistiques plus qu’alarmantes : outre l’obésité (qui n’est pas seulement le fait « d’être gros » mais qui implique un facteur morbide grave), le saccharose provoque bien des cas de diabète de type II dans des pays où l’on peut parler d’épidémie, tant cette affection se répand à la vitesse d’une traînée de poudre : on pense aux États-Unis et à leur voisin mexicain (les policiers, du genre sergent Garcia, sont si gros qu’ils ne parviennent plus à courir après les voleurs !) avec des dizaines de millions de personnes qui forment des contingents d’obèses diabétiques. Mais sur ce point, la palme revient à la Chine, premier pays au monde comptant la plus grande population diabétique (400 millions, soit pas loin de 30 % de la population chinoise !), puis vient l’Inde à sa suite (50 millions de malades « seulement », mais le diabète y galope de plus en plus vite ; payer les travailleurs pauvres avec du coca-cola n’a sans doute pas amélioré la situation…). Ce mal tourmente aussi des pays auxquels on s’attend moins, comme le Maroc par exemple. L’avantage de la stévia dans ces cas-là, c’est qu’elle est déjà meilleure que la plupart des édulcorants de synthèse, cela va de soi. Ensuite, c’est que l’extrait hydro-alcoolique de même que l’extrait solide (c’est-à-dire les glycosides de stéviol mêlés à quantité suffisante d’excipient, ce qu’on appelle les agents de charge, à l’instar de l’érythritol principalement) possèdent un indice glycémique nul, car ces produits ne contiennent pas une once de glucides, en l’occurrence ni saccharose ni fructose. Ils ne sont donc pourvoyeurs d’aucune calorie. Par leur goût sucré, ils se substituent donc au sucre sans apporter avec eux les inconvénients nombreux de celui-ci. La poudre de feuilles de stévia, bien qu’elle soit composée à hauteur de 60 % d’hydrates de carbone, ne peut, en raison des quantités infimes absorbées à chaque prise, occasionner un massif apport de glucides. Il est clair que l’on peut réduire une partie de sa consommation de sucre par l’usage des extraits ou de la poudre de feuilles. Par exemple, si l’on souhaite faire un gâteau nécessitant deux tasses de sucre3, l’on peut remplacer l’une d’elles par une cuillerée à soupe de poudre de feuilles de stévia (selon la quantité, cela verdit forcément le mélange, donc le gâteau, à la façon du macha) ou l’extrait selon les équivalences fournies par le fabricant ou celles que vous aurez déterminées à la suite de fastidieux calculs que je vous abandonne bien volontiers. Remplacer ici une tasse de sucre par le pouvoir sucrant d’x gouttes d’extrait hydro-alcoolique est possible, la seule différence consistant en une perte de volume que l’on peut compenser avec de la poudre d’amande, par exemple. L’inconvénient de la stévia, entend-on parfois, c’est que comme cela goûte sucré, cela peut entretenir le besoin de manger sucré (bien que cette plante ne soit aucunement addictive comme nous l’avons dit plus haut). Cela est variable selon les personnes : les vrais accrocs au sucre, je ne les invite pas à utiliser la stévia sous quelque forme que ce soit, à moins de pouvoir s’en tenir strictement à elle, sans nécessité de lorgner avec insistance du côté du sucrier ^.^ Quant à moi, j’ai stoppé ma consommation de sucre en mai 2020, ce qui n’a pas été très compliqué, n’étant pas à la base un fana du sucré. Je ne parle pas uniquement du sucre blanc ou brun de table que l’on rajoute dans le café, mais des trois principaux oses – saccharose, fructose, glucose – que l’industrie agro-alimentaire saupoudre généreusement un peu partout dans les produits dont elle inonde le marché à disposition du public. Exit donc le miel. Ainsi que les confitures et tout ce que j’avais l’habitude de manger qui contenait du sucre (ce qui se chiffrait à pas grand-chose). Quand j’ai besoin de sucré, ce qui est rare, je m’en remets à la poudre de feuilles de stévia à laquelle va ma préférence et dont je fais un usage mesuré : sans nécessité, ça se résume à trois ou quatre fois par semaine, davantage l’été où l’ajouter à une eau citronnée permet de profiter de l’effet de fraîcheur qu’on peut lui trouver.
- La stévia et la législation : avant le mois de décembre 2011, les glycosides de stéviol étaient interdits comme édulcorants à travers une application industrielle (cf. l’arrêté du 26 août 2009). Depuis, une certaine catégorie d’aliments (boissons sans alcool, desserts industriels, confiseries, etc., en réalité, toutes choses qui, d’une façon ou d’une autre, demeurent néfastes pour la santé ; ce n’est pas la seule stévia qui va en amender la nocivité) peuvent faire entrer dans leur recette ces agents édulcorants, à l’exclusion de la poudre de feuilles de stévia qui est interdite à cet usage en France, c’est-à-dire qu’on ne trouve aucune préparation alimentaire dans laquelle la liste des ingrédients ferait figurer la poudre de feuilles, hormis, bien entendu, les gâteaux que vous fabriqueriez avec elle à la maison. D’ailleurs, le commerce de la plante comme denrée alimentaire est interdit par l’union européenne, sans rapport aucun avec les pressions du puissant lobby sucrier, on s’en doute bien ^.^. Mais qu’on se rassure, car, dans le commerce, on trouve aujourd’hui en France la stévia sous les formes suivantes : – les feuilles sèches entières (bio et non bio) ; – la poudre de feuilles (bio et non bio) ; – les glycosides de stéviol (stévioside et rébaudioside A essentiellement) mêlés à un agent de charge ayant l’aspect du sucre pour former un produit qui, à quantité équivalente, possède le même pouvoir sucrant que son poids en sucre ; tout cela se décline en paquet de poudre, bûchette, comprimé et sucre cubique de volume variable. Faisons la remarque que l’érythritol qu’on utilise fréquemment comme agent de charge est issu de la fermentation du glucose du maïs et du blé. C’est donc un sucre, certes moins calorique, mais un glucide quand même et qui ne parvient pas à me convaincre de sa soi-disant bonne réputation. C’est d’ailleurs pour cela que je préfère le délaisser au profit du xylitol que l’on retire de l’écorce du bouleau. Si l’on excepte l’effet rafraîchissant plus marqué de celui-ci (qui n’est pas toujours des plus intéressants), le xylitol possède au moins l’avantage d’être non fermentescible. En définitive, me passer de sucre (saccharose) ne m’a pas amené à vouloir coûte que coûte le remplacer par je ne sais quel substitut. Ainsi, sur la table de la cuisine, il n’y a rien de tout cela hormis un petit pot de poudre de feuilles de stévia : c’est économique, ça ne prend pas de place, ça dure longtemps, comme ça je suis tranquille.
- Comment et où se procurer de la stévia ? On trouve cette plante disponible chez la plupart des pépiniéristes aujourd’hui. Les semences sont aussi en vente libre. J’en ai reçu un échantillon gratuit lors de ma dernière commande chez Kokopelli, que je remercie au passage :) Semées selon les instructions le 13 mars dernier, elles sont en plein développement. Vivement la suite ! Si vous connaissez quelqu’un de votre entourage qui possède cette plante, faites-vous offrir quelques graines ou demandez-lui de vous fournir des boutures.
- Autres espèces : on estime à environ 200 le nombre d’espèces de stévias dont Stevia ovata, Stevia micrantha, Stevia serrata, Stevia salicifolia ou encore Stevia eupatoria. D’aucuns prétendent que seule Stevia rebaudiana comprend des composés sucrés, mais je ne suis pas du tout certain de cette assertion, puisqu’on compte plusieurs espèces qui se font elles aussi appeler par le nom vernaculaire de candy leaf.
- Autre plante à sucre : la verveine sucrée des Aztèques (Lippia dulcis).
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- C’est seulement dans les années 1990 que la firme Guayapi, dans une volonté de valorisation des simples autochtones et de commerce équitable, proposa à la vente en France des feuilles de stévia.
- Bastien Beaufort, Géohistoire de la diffusion globale de la plante stévia (ka’a heê), p. 5.
- Déjà on bannit le sucre blanc (qui ne vaut pas mieux que le sel raffiné) au profit du sucre brun un peu meilleur mais toujours en quantité modérée.
© Books of Dante – 2022