En tout premier lieu, je tiens à préciser que les diverses facettes du chaman présentées dans le post précédent (Petit abrégé de pratiques chamaniques [suite]) ne concernent pas la majorité des chamans, loin s’en faut. Tous ne sont pas des chamans totaux. La plupart du temps, ils présentent une ou plusieurs facettes, extrêmement rarement la totalité d’entre-elles.

Venons-en maintenant au sujet qui nous (pré)occupe. Pour commencer, et afin que les choses soient claires : ON NE S’AUTOPROCLAME PAS CHAMAN ! Quiconque se lève un beau matin en se disant « aujourd’hui, je suis un chaman » ne peut être qu’un imposteur. A ceux-là, il faut faire la chasse et les dénoncer, car ils seraient susceptibles de faire plus de mal que de bien en agissant de manière inconsidérée. Hélas, ils existent bel et bien et n’agissent pas autrement qu’en obscurs gourous, parfois suivis par des hordes, plébiscités par elles pour de non moins obscures raisons.
Il est important de bien prendre en compte qu’un chaman n’est en aucun cas une personne que d’autres auraient désignée chaman. L’élection du chaman n’est en rien une affaire humaine, elle est du strict ressort des Esprits et des Divinités. Celles et ceux parmi les plus doctes et les plus sages sauront qui deviendra chaman et qui ne le sera pas.
Tout commence très tôt. C’est tout jeune que le futur chaman est choisi par les Esprits et les Divinités. A un âge où ignorant encore tout de sa destinée, l’enfant amené à devenir chaman un jour va, malgré lui, donner des indices sur son potentiel aux autres membres du clan, mais plus particulièrement aux sages et/ou aux chamans que compte déjà la tribu. En effet, de par leur statut, ils sont plus à même de déceler les signes avant-coureurs présents chez l’enfant.
Ce type d’enfant est généralement décrit comme solitaire, préférant observer les plantes et les animaux plus que de se mêler aux jeux des autres enfants. Par ailleurs, il peut sembler songeur ou taciturne, tout en tenant des propos assez nébuleux pour les autres.
L’INITIATION
La révélation d’un esprit auxiliaire (entité, totem…), un rêve et/ou une vision, etc. ne peuvent suffire à faire de qui les reçoit un chaman. Il ne s’agit pas d’une formalité qui pourrait se résoudre en trois coups de cuillère à pot. Pourquoi ? Parce que toute personne est capable de recevoir un message à travers une vision, de vivre un rêve révélateur, etc. Mais elle reste une personne « ordinaire » alors que le chaman est une sorte de « paria bien entouré » (1).
L’initiation est continue, quoi qu’on en pense. Elle dure autant que dure le chaman, être chaman étant loin d’être une sinécure. Non, être chaman relève du sacerdoce. Comme son nom l’indique, l’initiation est un début qui s’engage très tôt, dès que le l’enfant concerné manifeste les premiers signes que, peut-être… Qu’il présente toutes les capacités requises à la base pour devenir chaman est déjà une bonne chose. Mais elles ne pourront, à elles seules, faire de lui un chaman. De cela, l’initiation seule en dépend. Pour résumer :
Chaman =
profil idéal
+
acceptation de la charge qui incombe au futur impétrant
+
initiation
L’initiation n’est pas autre chose qu’un enseignement, un apprentissage. Elle n’est pas tellement éloignée, dans sa logique, du compagnonnage. Cet enseignement est prodigué principalement par les Divinités, les Esprits (entités, totems, âme d’un chaman défunt) et les chamans en exercice au sein du clan.
Le contenu de cette initiation est vaste. Cela peut être autant la connaissance des plantes médicinales que le juste emploi des outils chamaniques, par exemple.
Bien entendu, le jeune chaman devra faire preuve d’écoute et d’humilité face à l’enseignement reçu. D’abnégation également. Enfin, il lui faudra souffrir à travers le diptyque mort/renaissance dont nous avons déjà parlé.
L’initiation est une épreuve si intimiste qu’il est bien difficile de la décrire simplement à l’aide de quelques mots. Il ne faut pas du tout la considérer comme une forme d’intronisation via une cérémonie rituelle plus ou moins officielle, telle que celle qui consiste à épingler une rosette écarlate sur la poitrine d’un homme.
Enfin, doté de ses connaissances initiatiques préliminaires, l’apprenti chaman devra faire preuve de résultats avec, il est vrai, plus ou moins de succès. Qu’il soit doté de pouvoirs peu ordinaires ne signifie pas qu’il n’engage pas sa propre responsabilité. S’il est craint et respecté, il peut aussi être blâmé par les propres membres de son clan en cas d’échec.
C’est donc un statut à double tranchant, bien éloigné de l’image romanesque qu’en a fait un certain néo-chamanisme fumeux de ces dernières décennies.
- Peu ordinaire (certains disent hors du commun), le chaman est régulièrement consulté pour des questions qui sont de son devoir.
© Books of Dante – 2014
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