Longtemps confondue avec l’aigremoine (Agrimonia eupatoria), l’eupatoire n’a en revanche aucun rapport avec le chanvre que l’on discerne dans l’adjectif chanvrine. En sont responsables une morphologie foliaire assez semblable et une appétence des deux plantes pour les lieux humides. Mais ça ne va pas plus loin. Fréquemment considérée comme une plante médicinale de seconde catégorie, l’eupatoire chanvrine a été profondément revue et corrigée par mes soins dans ce nouvel article.
Beau week-end à toutes et à tous :)
Gilles
Synonymes : eupatoire d’Avicenne, eupatoire des Arabes, eupatoire commune, eupatoire à feuilles de chanvre, chanvrière, chanvrine, chauvrine, cannabine, origan des marais, origan aquatique, pantagruélion aquatique, herbe de sainte Cunégonde.
Pour débuter, je me passerai de l’explication classique qui consiste à dire que l’eupatoire tire son nom de ce grand roi du IIe siècle avant J.-C. et dont j’ai déjà parlé dans l’étude consacrée à l’aigremoine. C’est ainsi que Lémery justifiait l’étymologie de cette plante, qui n’est pas, à mon avis, des plus intéressantes, de même que celle qui consiste à entrevoir dans le nom de la plante une vague référence au foie, en rapprochant le latin eupatorium du grec hepar. En revanche, l’eupatoire porte de nombreux noms vernaculaires dont beaucoup expriment les relations que cette plante a entretenues à travers les différentes périodes de son histoire. Certains sont facilement compréhensibles contrairement à d’autres qui demeurent résolument obscurs, tel cette « herbe de sainte Cunégonde ». Si l’on sait que Cunégonde est issue d’une famille de la noblesse luxembourgeoise, également épouse d’Henri II, décédée en 1033 (ou 1039), il est difficile d’établir le lien qu’elle peut cultiver avec l’eupatoire. D’après l’histoire, Cunégonde fut à l’origine de miracles. Auprès de son tombeau, on observa maintes guérisons miraculeuses. Est-ce à dire que l’eupatoire est, elle aussi, une prodigieuse panacée ? Difficile à dire. En tous les cas, en allemand, elle porte toujours le nom de kunigundkraut. Mais il en faut parfois bien peu pour associer une plante à un saint. Parfois, l’hagiographie, plus précise, permet de retracer ce lien, mais à d’autres, l’appellation demeure sans qu’il soit plus possible d’en expliquer le sens. Tout ceci est fort étrange, d’autant que Fournier expliquait que l’eupatoire demeura inaperçue des Antiques et du Moyen âge. Pourtant, sainte Cunégonde est bien une figure médiévale, de même que le médecin arabe Avicenne qui, nous dit-on, tenait cette plante en haute estime au Xe siècle (pour ne pas faire de jaloux, on accorda à l’Achillea ageratum le surnom d’eupatoire de Mésué, médecin ayant œuvré un siècle avant Avicenne). Platearius, fils supposé de Trotula de l’école de Salerne, nous oblige à traîner encore nos basques au Moyen âge. Que disait-il à propos de l’eupatoire ? Que cuite à petit feu dans la graisse, on en faisait une pommade qu’on appliquait sur les « douleurs et enflures des seins », valable également comme maturative (abcès, ulcère et tumeur) et antalgique localement en cas de douleur goutteuse. Tout ceci est fort intéressant, mais c’est surtout dès la Renaissance que les informations concernant l’eupatoire affluent, sans doute du fait qu’à cette époque d’« eupatoires » on en distingue plusieurs : celles d’Avicenne et de Mésué, ainsi qu’une troisième, l’eupatoire dite des Grecs, c’est-à-dire l’aigremoine (Agrimonia eupatoria). On peut tout à fait penser que, par manque de précision dans les textes, on ait parlé de l’une à la place de l’autre, mais ne nous perdons pas en hasardeuses conjectures. Au XVIe siècle, cette plante à la saveur amère et piquante rencontra un large crédit auprès de la médecine populaire. Racines et feuilles infusées dans la bière étaient données comme purgatives, toniques et vermifuges. En 1543, l’Allemand Léonard Fuchs écrivit que « cette plante n’a pas encore de nom latin, mais les apothicaires ne se trompent pas beaucoup en l’appelant eupatorium », ce à quoi Matthiole lui fit écho dès 1554, ayant constaté que le nom d’eupatorium était très souvent employé pour désigner cette plante vendue chez les droguistes et les marchands d’épices. Ceci dit, ils ne s’avancèrent pas davantage en ce qui concerne les vertus médicinales de l’eupatoire, chose dont Jérôme Bock rendit compte dès 1572, avouant le peu d’intérêt médical qu’on prêtait à cette plante (il disait cependant de l’eupatoire qu’elle serait un stimulant de la virilité… ce qui reste encore à prouver). Olivier de Serres, qui n’était même pas médecin mais agronome, accorda une place à l’eupatoire dans son jardin de simples. Il la disait « bonne contre la dysenterie et les morsures de serpents » et désopilante du foie (ce qui ne veut pas dire qu’elle le fait mourir de rire, mais qu’elle le désobstrue ^.^). Par suite, on lui conservera cette propriété désobstruante de la sphère hépatique, ainsi qu’une capacité à évacuer les constipations occasionnées par insuffisance hépatique et atonie des organes digestifs. Elle pourrait donc vraisemblablement mériter cette référence à l’hepar des Grecs.
Du temps de Lémery, elle était « apéritive, atténuante, astringente, vulnéraire, propre pour la cachexie, pour les mois retenus, employée en décoction et en fomentation pour les maladies du foie et de la rate »1. Au XVIIIe siècle, Tournefort, Gilibert, Boerhaave et bien d’autres encore employèrent massivement l’eupatoire dans une foule d’affections : chlorose, aménorrhée, engorgement des viscères, hydropisie, hydrocèle, tumeur du scrotum, affections cutanées rebelles, toux, catarrhe pulmonaire chronique, etc. De l’aveu des meilleurs praticiens, l’eupatoire s’avérait hépatique, apéritive, béchique, diurétique, emménagogue et résolutive. Chomel s’interrogea bien sur la véracité des propriétés purgatives de cette plante, mais il était encore très loin du désintérêt dans lequel versa l’eupatoire au détour du XIXe siècle, étant inconnue dans la pratique aux environs de 1800-1815 par exemple. Un tout petit peu après cette observation, Joseph Roques affirma qu’il « ne faut pas rejeter avec dédain tous les remèdes populaires ; il y en a d’excellents, et quelquefois l’observation d’un simple villageois se trouve aussi juste que celle de l’homme de l’art »2. Il considérait l’eupatoire comme succédané du jalap, du séné, de l’aloès et de la scammonée, ce qui n’est pas rien ! Roques luttait pour le maintien de l’eupatoire dans l’arsenal médical, car il savait bien dans quel discrédit d’autres médecins l’avaient faite tomber, ce à quoi Cazin, qui conforta les vues de Roques, laissait entendre que l’insuccès de ces détracteurs pouvait sans doute être mis sur le compte d’une considération qui apparaît dans le passage suivant : « L’eupatoire est purgative, apéritive, stimulante, tonique, suivant les doses auxquelles elle est administrée et les dispositions des appareils organiques qui en reçoivent l’action »3. De sa mauvaise préparation dépend aussi le succès thérapeutique. Mais l’on aurait beau faire d’une eupatoire de mauvaise qualité, c’est-à-dire dont la racine n’a pas été déchaussée à la saison convenable, ni utilisée immédiatement. D’où les observations disparates (au sujet des vertus purgatives de l’eupatoire entre autres), résultant peut-être de l’administration d’une racine mal cueillie, mal préparée, trop avancée en âge et donc inopérante (la fructification attire toutes les forces de la plante dans ses parties aériennes, délaissant quelque peu le système souterrain : les racines, en tant qu’organes de stockage, sont ainsi quasiment vides après l’effort immense consenti. On ne peut donc pas demander à de telles racines des miracles, même celles qui seraient éventuellement employées fraîches).
Le pharmacien et chimiste allemand Johann Dragendorff (1836-1898) indiquait l’eupatoire contre les morsures de serpents, ce qui n’est pas sans rappeler ce qu’en disait Olivier de Serres deux siècles plus tôt. Mais là, il ne semble pas s’agir d’une propriété fantasmée, puisque l’eupatoire contient un principe actif, l’eupatorine, également présent au sein de plantes d’Amérique du Sud (les mikania, plantes voisines de l’eupatoire, ainsi que l’Eupatorium crenatum) communément utilisées contre les morsures de serpents et les piqûres de scorpions. Malgré cette insistance et cette résistance, force est de constater que l’eupatoire tomba dans l’oubli. Il fut reproché à Henri Leclerc de ne lui accorder que quatre lignes dans son Précis de phytothérapie, mais c’était loin d’être pas mépris : l’eupatoire est « aujourd’hui complètement oubliée et peut-être à tort », précisa-t-il4.
Vivace à rhizome grisâtre et chevelu, l’eupatoire chanvrine est une plante rustique qui vit en colonies parfois densément peuplées. Ses tiges raides, légèrement cannelées et subtilement velues, peuvent dresser la plante à plus d’1,50 m du sol (j’ai dernièrement rencontré un sujet qui mesurait 1,80 m de hauteur). Très souvent de couleur rougeâtre/lie-de-vin, les tiges de l’eupatoire sont régulièrement feuillées : ses larges feuilles à bref pétiole sont divisées chacune en trois à cinq folioles lancéolées et grossièrement dentées, empruntant leur allure palmée à celles du chanvre (c’est vite dit…), d’où le nom de chanvrine qu’on octroie à l’eupatoire de par cette analogie. Si l’on observe attentivement le revers de ces feuilles, on y voit un réseau de veinules bien marqué, ainsi que des glandes transparentes. Au moment de la floraison, à l’aisselle, de chaque feuille supérieure, l’on peut voir émerger un rameau arborant des feuilles également trifoliolées et s’achevant par une petite inflorescence. Tous ces rameaux secondaires sont surmontés par les capitules centraux les plus élevés, constitués de petites fleurs tubulaires dentées dont la couleur varie du rose violacé au rouge, tout en passant par des teintes mauves ou vieux rose, plus rarement blanches. Les inflorescences à sommet plat de l’eupatoire font songer à l’achillée, mais aussi à l’origan (par une conformation générale assez approximative il est vrai, mais une similitude dans la couleur plus convaincante), d’où le surnom d’origan aquatique que cette plante porte parfois en français (et de wasserdort en allemand). La fructification donne lieu à des capsules verruqueuses de couleur noire contenant des semences surmontées de longues aigrettes blanches et soyeuses.
Très commune, l’eupatoire se rencontre aussi bien en plaine qu’en moyenne montagne, jusqu’à 1500-1700 m d’altitude (Europe, Asie occidentale, Afrique du Nord). Comme elle apprécie l’humidité, elle se localise préférablement à proximité des lieux plus ou moins pourvus d’eau tels que les bois clairs de ripisylves (avec présence de saules et d’aulnes, entre autres), clairières en forêts humides, coupes de bois, chemins forestiers, bordures de ruisseaux, berges d’étangs, zones marécageuses, fossés herbeux, friches riches en azote, etc., à la condition qu’ils lui procurent une satisfaisante humidité ainsi qu’une bonne exposition solaire.
L’eupatoire est la plante d’accueil d’un papillon de nuit, l’écaille chinée (Euplegia quadripunctata), auquel elle fournit une abondance de nectar (c’est un papillon particulièrement bien adapté aux fleurs tubulaires de l’eupatoire), de même que l’épilobe, le panicaut, l’origan ou encore le buddleia, si justement dénommé « arbre aux papillons ». Le 13 août 2023, sur un petit groupe d’eupatoires, j’ai pu assister au spectacle des écailles chinées. Certes, il y en avait beaucoup moins que dans la vallée des papillons de Rhodes (Pétaloudès), mais bien assez pour admirer la zébrure noire et crème de leurs ailes repliées.
L’eupatoire chanvrine en phytothérapie
Avec cette plante, une chose demeura à l’évidence vraie pendant longtemps : le peu de données concernant son profil biochimique ne permit pas d’en restituer un portrait fidèle. Malgré ce manque criant d’informations, la plante fut utilisée plus ou moins souvent par intermittence, comme nous l’avons vu précédemment. S’il fallait nécessairement savoir sur le bout des doigts ce que contient une plante avant de s’en servir, la médecine empirique n’aurait jamais vu le jour, et nos lointains ancêtres ne se seraient donc jamais autorisés à se soigner et à guérir les affections qui menaçaient leur existence. Non, soyons sérieux. Puisque nous savons maintenant de quoi il retourne à propos de l’eupatoire, pourquoi nous priverions-nous d’apporter autant d’eau à notre moulin, hum ?
Qu’est-ce donc qui est digne d’intérêt dans l’eupatoire ? Pour le déterminer, je pense que les Anciens se sont inspirés de l’odeur de la plante : pénétrante et très désagréable (voire fétide), l’odeur de l’eupatoire est plus prononcée dans la racine que partout ailleurs, le reste de la plante ne demeurant que très faiblement aromatique comme j’ai pu m’en apercevoir récemment, les feuilles fraîches ne dégageant qu’un bête parfum d’herbe et de chlorophylle. En revanche, leur goût est assez amer, piquant, un peu aromatique, et passe pour davantage accentué dans les racines. Malgré cette disparité gustative et olfactive entre parties hautes et basses, on privilégie tout autant les racines que les sommités avant même qu’elles ne fleurissent.
Quels trésors phytochimiques susceptibles de nous intéresser recèle l’eupatoire ? Tout d’abord du tanin, des sucres (polysaccharides, inuline), quelques éléments minéraux comme le fer, la silice, le calcium ou encore le potassium. Mais fi de cette piétaille, considérons plutôt toutes ces fabuleuses catégories de molécules telles que les flavonoïdes (à la pelle : rutine, kaempférol, quercétine, isoquercitrine, hyperoside, astragaline, eupafoline, eupatorine, hinspiduline…) et les lactones sesquiterpéniques (dont la « célèbre » eupatoriopicrine, mais pas seulement : guaïanolide, eupatolide, eupasimplicine, eucannabinolide…). N’omettons pas non plus ces alcaloïdes qui donnent la chair de poule alors qu’il n’y a pas de quoi : les alcaloïdes pyrrolizidiniques (comme la supinine, la rindérine et l’échinatine, par exemple). Viennent ensuite différents acides phénols (acides caféique et chlorogénique), des acides organiques (acide férulique), des caroténoïdes (lutéine), enfin ces choses peu essentielles que sont les phytostérols (sitostérol, stigmastérol, campestérol, taraxastérol…).
Certains articles scientifiques abordent parfois la question de l’huile essentielle d’eupatoire. Voici, par exemple, quelques informations concernant une eupatoire chanvrine de Lituanie que l’on imagine fort bien se déployer aux abords du marais tourbeux de Čepkeliai situé dans le sud de ce pays. Cette huile essentielle se décompose comme suit :
- Sesquiterpènes : germacrène D (22 %), α-zingibérène (7,8 %) ;
- Sesquiterpénols : spathulénol (27,2 %) ;
- Esters : acétate de néryle (20 %) ;
- Monoterpènes : α-pinène (11,5 %) ;
- Coumarine (traces).
Propriétés thérapeutiques
- Stimulante, tonique (amère), fortifiante
- Purgative douce*, laxative douce, émétique*, vermifuge*
- Cholagogue*, cholérétique, désobstruante hépatique, hépatoprotectrice, dépurative hépatique (en particulier quand le foie est en bon état), anti-nécrotique hépatique
- Diurétique, stimulante de l’activité rénale, dépurative sanguine, sudorifique
- Fébrifuge légère*
- Antirhumatismale
- Apéritive
- Désobstruante de la rate
- Pectorale, béchique, préventive des affections respiratoires virales
- Immunomodulante, immunostimulante
- Cytotoxique, antitumorale
- Emménagogue
- Résolutive, détersive, vulnéraire
Note : les propriétés marquées d’un * indiquent celles qu’on obtient en renforçant les doses usuelles.
Usages thérapeutiques
- Troubles de la sphère hépatobiliaire : ictère, engorgement du foie, congestion hépatique, insuffisance biliaire, obstruction de la vésicule biliaire, cholémie, constipation par insuffisance hépatobiliaire
- Troubles de la sphère gastro-intestinale : inappétence, embarras gastrique, crampe d’estomac, sensation de nausée, diarrhée, constipation par ptôse intestinale (chez l’anémié, l’enfant, le convalescent, la personne âgée, le cachectique)
- Troubles de la sphère respiratoire : toux, irritation violente de la gorge, rhume, catarrhe chronique, grippe
- Fièvre intermittente, cachexie paludéenne
- Troubles de la sphère vésico-rénale : suppression des urines (à caractère inflammatoire, suite à dépôts calcaires), irritation vésicale et rénale, catarrhe vésical, gravelle, hydropisie, œdème (jambes, scrotum)
- Affections bucco-dentaires : inflammation des gencives, des muqueuses buccales et de la pulpe dentaire
- Affections cutanées : maladies cutanées chroniques et rebelles (érysipèle, eczéma chronique, etc. par manque de dépuration du sang de son acide urique excédentaire, des dépôts calcaires, etc.), gale, plaie, contusion, hématome, abcès
- Anémie, faiblesse générale, chlorose, scorbut
- Troubles locomoteurs : arthrite, rhumatisme, goutte
- Aménorrhée
Modes d’emploi
- Infusion de racines débitées en morceaux : comptez une cuillerée à café pour le volume d’une tasse d’eau. Faites bouillir brièvement le tout (2 mn), puis laissez infuser 10 mn supplémentaires.
- Décoction de feuilles : 20 à 40 g de feuilles pour un litre d’eau. Faites bouillir durant une poignée de secondes, puis laissez infuser pendant 10 mn.
- Décoction de racines : comptez 10 à 30 g (voire 60 g) pour un litre d’eau, en décoction pendant dix bonnes minutes
- Poudre de racines : de 3 à 9 g par jour. A délayer dans un véhicule agréable. Il est possible de l’absorber mélangée à un peu de vin, tout comme la poudre évoquée ci-dessous.
- Poudre de la plante entière : 3 g par jour. A délayer dans un véhicule agréable.
- Macération vineuse de racines : dans un litre de vin blanc, plongez pour la nuit entière 30 à 60 g de racines fraîches d’eupatoire.
- Macération alcoolique : dans une part d’alcool à 50°, faites macérer au soleil une part d’eupatoire pendant trois semaines.
- Suc frais de feuilles.
- Cataplasme de feuilles pilées au mortier.
Précautions d’emploi, contre-indications, autres informations
- Récolte : les sommités se recueillent au printemps, un peu avant la floraison (mai-juin), la racine dès les premiers jours printaniers. Notons que cette dernière est plus efficace à l’état frais ou récemment desséchée (de même que les feuilles, d’ailleurs). L’ancienneté de la racine y est pour beaucoup dans la soi-disant inactivité de la plante. En tous les cas, plus elle est vieille, et plus son activité faiblit.
- De par la présence d’alcaloïdes, l’eupatoire ne doit pas être ingérée à haute dose ni faire l’objet d’un usage au long cours (en cure brève de trois semaines continuées au maximum). Ceci dit, ces alcaloïdes ne sont jamais plus toxiques qu’on les aura isolés… Et s’ils provoquent des tumeurs hépatiques, ça n’est jamais vrai que d’un seul point de vue expérimental. En revanche, ce qui est étrange, c’est qu’on préconise parfois de ne pas faire usage de cette plante en cas de troubles hépatiques avérés, alors que j’ai répertorié plus haut plusieurs cas d’affections hépatobiliaires pour lesquelles elle s’avère utile. Quoi qu’il en soit, on la consommera avec prudence, en respectant la posologie. Son usage est fortement déconseillé aux femmes enceintes ainsi qu’à celles qui allaitent. On évitera son usage auprès des enfants en bas âge.
- Association dépurative : eupatoire, noyer et bardane. Ou bien, eupatoire, renouée du Japon et frêne.
- Phytoremédiation : on a pu constater les bons effets de l’eupatoire dès lors qu’il s’agissait de retirer des sols pollués l’arsenic qu’ils contenaient.
- Faux amis : l’eupatoire femelle ou eupatoire bâtarde désigne une sorte de bidens, alors que le nom d’eupatoire de Mésué (pour concurrencer Avicenne, sans doute…) renvoie à l’achillée visqueuse (Achillea ageratum).
- Autres espèces : l’eupatoire chanvrine est la seule représentante européenne d’eupatoire. Il existe de nombreuses autres espèces disséminées un peu partout dans le monde dont la littérature scientifique se fait l’écho. Parmi elles, notons l’eupatoire pourpre (E. purpureum), l’eupatoire maculée (E. maculatum) et l’eupatoire perfoliée (E. perfoliatum), toutes trois d’origine nord-américaine.
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- Nicolas Lémery, Dictionnaire universel des drogues simples, p. 348.
- Joseph Roques, Nouveau traité des plantes usuelles, Tome 2, p. 333.
- François-Joseph Cazin, Traité pratique et raisonné des plantes médicinales indigènes, p. 391.
- Henri Leclerc, Précis de phytothérapie, p. 12.
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