Le soja (Glycine max)

Pensez à l’Asie : quelle est la première plante alimentaire de ce vaste continent qui vous traverse l’esprit ? Le riz ? Probablement. Sans doute pas le soja : « Pour bien marquer l’importance divine du riz, l’empereur lui-même procédait à son ensemencement, alors que les quatre autres graines [nda : le blé, le sorgho, le millet et le soja] étaient semées par les seigneurs » (1). Ainsi procédait-on en Chine d’où, dit-on, le soja est originaire.

Le soja est une grande plante (jusqu’à deux mètres), annuelle et buissonnante, sur laquelle tout est velu : les tiges, les feuilles et les gousses. Les feuilles, assez grandes (6 à 15 cm de longueur sur 3 à 8 cm de largeur), sont composées de trois folioles généralement ovales et achevées par une pointe. Elles se rapprochent assez de celles du haricot sur ce point. Les fleurs blanches ou purpurines, typiques des Fabacées, donnent naissance à des gousses aplaties contenant deux à quatre graines, rarement davantage, dont la couleur, une fois qu’elles sont sèches, s’apparente à celle des pois chiches ou des pois cassés.

Le soja est une plante qui s’est acclimatée à presque tous les continents, du moins aux régions assez chaudes des zones tempérées. Aujourd’hui, on en croise la culture aux Amériques et en Océanie. En Europe, il a été implanté par Engelbert Kaempfer (1651-1716) au début du XVIII ème siècle, avant de parvenir plus tardivement en France (1739) où sa culture en grand n’a été réalisée que bien plus tard (1932).

Le soja en phytothérapie

Plante alimentaire de premier ordre pour des millions de personnes du continent asiatique, le soja n’en est pas moins dépourvu de propriétés thérapeutiques qui s’expliquent par la composition biochimique de cette plante qui n’a rien d’anodin : que le soja soit une importante source de protéines, de lécithine et d’acides gras essentiels ne peut nous faire oublier que la santé passe en partie par l’assiette, qu’elle s’y entretient et peut s’y restaurer.
Concernant essentiellement la fève de soja, on y décèle la présence d’une importante proportion de protéines qui se décompose selon qu’elles sont constituées d’acides aminés essentiels ou non. Dans la première catégorie, nous trouvons huit des neufs acides aminés essentiels dans le soja : leucine, valine, lysine, phénylaline, tryptophane, thréonine, isoleucine, méthionine (17 %). Dans la seconde, les acides aminés dit non essentiels forment près de 30 % de la masse du soja. Ainsi, en tout et pour tout, le soja contient donc environ 45 % de protéines (contre seulement 18 % dans la viande de bœuf : un argument à rétorquer à ceux qui veulent absolument vous faire manger de la viande au détriment du végétal).
Puis vient une huile végétale (taux variable de 12 à 25 %), dont 85 à 90 % du total sont représentés par des acides gras non saturés parmi lesquels on distingue 25 à 35 % d’acides gras mono-insaturés (acide oléique) et 45 à 60 % d’acides gras poly-insaturés (acide linoléique, acide linolénique, acide arachidonique…). A cela s’ajoutent 10 à 15 % d’acides gras saturés (acides stéarique, palmitique, arachidique, lignocérique…) et environ 2 % de lécithine.
Le soja contient aussi de la cire, des saponines et de la résine, ainsi que divers sels minéraux et oligo-éléments (calcium, fer, magnésium, phosphore, sodium, soufre, zinc…) et vitamines (A, B1, B9, D, E, F…). Nous ne saurions achever cette liste sans y mentionner des composants présents dans le soja et qui ont été l’objet de très nombreuses études : des phytostérols, ainsi que des isoflavones et du coumestrol, dernières substances dont on a mis en évidence la valeur œstrogénique. Classés parmi les phyto-œstrogènes, ils possèdent des activités similaires aux œstrogènes humains et « semblent réduire le taux d’œstrogènes dans le corps quand il est trop élevé (comme lors des troubles menstruels) et le compenser quand il est trop faible (comme durant la ménopause) » (2).

Propriétés thérapeutiques

  • Aliment très complet et très digestible (3)
  • Constructeur organique au niveau des os, des muscles, des nerfs, équilibrant cellulaire, reminéralisant, énergétique

Note : pour la médecine traditionnelle chinoise, le heidadou (= soja « noir ») « fortifie les muscles et contribue à la beauté du corps » (4). C’est à ce titre qu’on le qualifie de « plante miraculeuse ». Nous voici prévenus.

  • Préventif des maladies cardiovasculaires, hypocholestérolémiant, tonique circulatoire
  • Fébrifuge
  • Antibactérien
  • Régulateur œstrogénique
  • Action préventive face au cancer du sein entre autres (5)

Usages thérapeutiques

  • Troubles de la sphère vésico-rénale : miction difficile et/ou douloureuse, hématurie
  • Troubles de la sphère gynécologique : ménopause (et troubles associés : bouffées de chaleur, ostéoporose…), règles douloureuses
  • Troubles locomoteurs : crampes musculaires, rhumatismes, douleurs dorsales
  • Affections cutanées : dermatose, érythème, brûlure (du premier et du deuxième degré), infection cutanée
  • Surmenage, déminéralisation, fatigue, asthénie
  • Œdème
  • Sueur excessive
  • Diabète

Précautions d’emploi, contre-indications, autres informations

  • L’action œstrogénique du soja peut être secondée par celle de la sauge officinale par exemple. Comme pour elle, il est préférable d’éviter les prises de soja durant la grossesse (dans ce cas, il y a un risque de perturbation de la lactation en raison de la présence des phyto-œstrogènes dans le soja).
  • Le soja est contre-indiqué avec la prise de certains médicaments anticancéreux comme le tamoxifène par exemple.
  • Lorsque la graine est consommée crue, elle peut provoquer des allergies chez certains sujets fragiles.
  • Les autres emplois du soja, outre médicinaux, sont multiples. Nous en citerons au moins trois :
    – C’est un agrocarburant : cependant, la place allouée à cette culture est largement contestée du fait de son empiétement sur l’ensemble des terres arables présentes au monde et dont on est en droit de dire qu’elles pourraient être destinées plutôt à l’alimentaire.
    – Deuxièmement, c’est un bon fourrage pour les animaux, ainsi qu’un engrais vert. Le tourteau de soja représente aussi une base pour l’alimentation animale.
    – Concernant l’être humain, le soja est un aliment depuis au moins 5000 ans en Chine. Il se décline sous plusieurs formes, plus ou moins élaborées : huile, farine, tonyu (lait de soja), tofu, sauce soja (tamari-shoyu), miso (rouge, jaune), etc.
    Note : il faut savoir qu’environ la moitié de la production mondiale de soja est d’origine OGM. Ce qui veut dire qu’il peut se retrouver dans l’alimentation des animaux et/ou dans la nôtre, dans un cas comme dans l’autre, dans notre assiette, ce qui ne serait pas si problématique si le soja n’était pas l’un des aliments les plus consommés au monde. De plus, un excès de CO2 atmosphérique est, en général, néfaste pour cette fabacée. Ce qui, bien entendu, est inquiétant, de par l’augmentation des gaz à effet de serre et une forte demande de la part des consommateurs de soja, qui fait dire à certains observateurs que les perturbations climatiques pourraient, dans les années à venir, provoquer une crise alimentaire.
  • On croise parfois des informations qui concernent un soja « rouge » et un autre « vert » : il ne s’agit pas d’autres espèces de soja, mais de deux sortes de « haricots » : Phaseolus radiatus et Vigna umbellata (anciennement Phaseolus calcaratus).
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    1. Michèle Bilimoff, Les plantes, les hommes et les dieux, p. 67.
    2. Larousse des plantes médicinales, p. 217.
    3. La farine de soja contient quatre fois plus d’azote que celle de blé, vingt fois plus de matières grasses, et trois à cinq fois moins d’hydrates de carbone : cela concourt à faire de la farine de soja un produit plus équilibré que celle de blé.
    4. Liu Shaoshua, Phytothérapie alimentaire chinoise, p. 182.
    5. La consommation régulière de soja est corrélée par un bas taux de cancer dans les pays où, par tradition, on consomme régulièrement du soja.

© Books of Dante – 2019