Aujourd’hui, une fois n’est pas coutume, nous ne parlerons pas de plantes mais des récipients destinés à les stocker et à les conserver dans les officines d’antan : les pots.
Si l’on en connaît certains faits de bois, les premiers et plus anciens d’entre eux relevaient du travail du potier : constitués de terre glaise, ils étaient ensuite peints puis passés au vernis. Mais les plus connus demeurent cependant les pots en céramique dont la production se développe surtout dès le XVII ème siècle, accueillant des fabriques dans diverses villes de France : Bordeaux, Lyon, Besançon, Montpellier, Rouen, Nîmes, Narbonne, Moustiers, Nevers, Paris, Saint-Cloud, Saint-Jean-du-Désert, etc.
Richement décorés et ornés tels des pièces de vaisselle, ces pots, avant de passer l’épreuve du feu, étaient émaillés après quoi l’on appliquait le décor à la main. Pour ce faire, une habile et délicate dextérité était nécessaire, sans quoi l’on n’aurait pu faire cuire un pot s’il avait présenté la moindre bavure. C’est ce que l’on appelle le « décor de grand feu ». Au siècle suivant, à savoir le XVIII ème, on mit en œuvre le « décor de petit feu » : cette technique consistait à peindre le vase après une première cuisson effectuée. Au XIX ème siècle, puis au début du XX ème, l’on abandonne la céramique au profit de la porcelaine, les décors gagnent en sobriété, apparaissant davantage standardisés, alors que dans les siècles précédents, l’ornementation équivalait à un argument marketing de la part de l’apothicaire.
Bien sûr, ces pots, aussi bellement façonnés et artistiquement revêtus qu’ils soient, n’étaient pas seulement des séries de bibelots placés en rangs rigoureux sur les étagères de l’apothicaire et de l’herboriste. Ils répondaient, chacun par leurs formes, à une fonction, de même qu’en cuisine, il existe plusieurs styles de couteaux : celui à poisson, tel autre pour couper le pain, etc. Ainsi trouvons-nous :
- Le pot simple : cylindre parfait posé sur son cul, souvent surmonté d’un couvercle à pignon afin de le mieux saisir avec les cinq doigts de la main réunis. En ce cas, on l’appelle pot couvert. Et lorsqu’il n’en possédait pas dès l’origine ou qu’une main maladroite l’avait fait choir au sol, se trouvant dès lors orphelin de son chapeau, l’on tendait sur l’ouverture un morceau de parchemin ou de papier en guise d’opercule, maintenu par de la ficelle, de même qu’on ligature un pot de confiture d’une membrane de cellophane et d’un élastique.
- Le pot-canon : il tire sans doute son nom de sa forme qui évoque celle des canons de la marine royale d’ancien temps. Son fût est donc plus ou moins oblongue, posé sur un piédouche ou non.
- Le pilulier : format miniature du pot-canon.
- L’albarelle : il s’agit d’un pot beaucoup plus haut que large, dont le fût déprimé en son milieu permet une meilleure prise en main.
- La chevrette : dotée d’une anse et d’un bec, elle ressemble à un pot-à-eau ; elle accueillait donc des substances liquides à visqueuses comme, par exemple, les mellites et les sirops.
- La fontaine : plus volumineuse que la chevrette, elle a, comme elle, un bec, mais elle est armée de deux anses afin de la mieux saisir.
- La cruche : elle ne fait pas dans le détail, elle accueille en gros. Elle est au pot ce qu’est le sac de blé à l’humble paquet de farine d’un kilogramme.
- Le vase de montre : comme son nom l’indique, c’est un monstre. Il contient le « clou du spectacle », c’est-à-dire les compositions magistrales d’importance (thériaque, mithridate, etc.). Pour le faire bien voir, on le plaçait au centre des montres, c’est-à-dire les étagères tapissant l’intérieur de l’apothicairerie du sol au plafond.
© Books of Dante – 2018