L’onagre (Œnothera biennis)

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Synonymes : œnothère, herbe aux ânes, mâche rouge, raiponce rouge, primevère du soir, jambon végétal, jambon des jardiniers, jambon de saint Antoine, etc.

Originaire du continent nord-américain, l’onagre a naturellement fait partie des pharmacopées amérindiennes en tant qu’anti-inflammatoire du tractus digestif, desséchante bronchique (par ses tanins) et adoucissante de la gorge (par ses mucilages). Elle était donc indiquée dans la toux et l’asthme, par exemple. Ses cataplasmes venaient à bout de maladies cutanées, pansaient plaies et abcès. Par ailleurs, les Amérindiens faisaient bouillir les parties aériennes de cette plante et sécher ses racines en provisions hivernales.

On dit de l’onagre qu’elle aurait été introduite de Virginie en tout début de XVII ème siècle (1612 ou 1614). Mais, en réalité, cette plante est arrivée en Europe en passagère clandestine des navires qui circulaient des Amériques jusqu’à l’Europe à cette époque. Elle se trouvait à l’état de graines dans la terre qui servait de ballast à ces mêmes navires. Elle s’est donc ainsi dispersée par le concours bien involontaire de l’homme.

Son nom d’oenethera se rapporterait à une plante de l’Antiquité grecque dont les racines trempées dans du vin auraient servi à apprivoiser les bêtes sauvages, ce qui est tout à fait ridicule, puisque « un usage indien conseillait de se frotter avec la plante avant de partir en chasse, pour masquer les odeurs humaines » (1) : l’onagre enivre les sens des animaux sauvages, il n’est nullement question de vin dans toute cette histoire.

J’ignore assez où l’onagre a débarqué après ses pérégrinations trans-atlantiques. En tout les cas, « un vieux dicton allemand du XVIII ème siècle prétendait qu’une livre de ces racines donnait plus de force qu’un quintal de bœuf ! » (2). Dans les années 1840, l’onagre, peu encore connue en France, l’était bien davantage en Allemagne, dont la langue l’appelle nachtkerze, « bougie de la nuit », puisque ses fleurs ne s’ouvrent qu’en fin d’après-midi (18h00) pour se faner vingt-quatre heures plus tard.
En fin de XIX ème siècle, les Américains Davis et Sullivan se penchent très sérieusement sur le cas de l’onagre et en établissent certaines propriétés thérapeutiques que nous retrouverons plus bas, mais pas avant une petite séquence botanique.

Comme son nom latin le laisse suggérer, l’onagre est une plante bisannuelle. C’est-à-dire, que sa capacité à se reproduire ne survient que lors de sa seconde année. La première année, une grosse racine pivotante se développe, surmontée d’une large et dense rosette de feuilles vert-gris et dont les nervures centrales rougissent avec l’âge. La seconde année voit apparaître une haute hampe florale qui peut atteindre 1,50 m de hauteur (voire 1,80 m.) La tige simple s’orne de petites feuilles lancéolées qui raccourcissent plus elles s’élèvent vers le bouquet floral : des fleurs de grande taille (4 à 5 cm), jaune soufre, à 4 pétales, 4 sépales et 8 étamines qui fleurissent de mai en septembre, au léger parfum de fleur d’oranger disent certains.
Elle est fréquente dans le Centre-Ouest de la France, elle est dispersée par ailleurs. Elle affectionne les sols secs, sableux ou alluvionnaires largement exposés au soleil. On aura la chance de la trouver sur les terrains incultes, les friches, en bordure de routes, de chemins, de voies ferrées, dans les décombres, etc.

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L’onagre en phyto-aromathérapie

La phytothérapie fait moins grand cas de l’onagre que sa consœur l’aromathérapie. Cependant, si la première n’avait pas porté quelque intérêt à l’onagre il y a un peu plus d’un siècle, sans doute que l’aromathérapie serait passée complètement à côté de cette plante, ce qui eut été fort dommage.
L’onagre, comme plante entière, contient des tanins, beaucoup de mucilage, de l’alcool céralyque, des phytostérols, un pigment de couleur rouge, une huile végétale, etc.
Cette dernière se localise dans les graines de la plante qui offrent, après expression à froid, environ 15 % d’huile liquide, limpide, jaune claire. Cette huile contient 90 % d’acides gras insaturés (dont 8 à 15 % d’acide gamma-linoléique, ce qui est exceptionnel), 10 % d’acides gras saturés, de la vitamine E, etc.

Propriétés thérapeutiques

  • Antiphlogistique et antispasmodique dans les maladies inflammatoires de l’intestin, de l’estomac, du foie et des voies urinaires
  • Vasodilatatrice, inhibitrice de la synthèse du cholestérol et de l’agrégation plaquettaire, hypotensive, fluidifiante sanguine, préventive des affections cardiovasculaires
  • Anti-inflammatoire
  • Stimulante et régulatrice hormonale chez la femme (progestérone, folliculine, prolactine)
  • Hépatoprotectrice
  • Régulatrice des sécrétions salivaires et lacrymales, régulatrice du taux de sébum
  • Sédative de la toux et des affections pulmonaires ayant leur siège dans une trop grande sensibilité nerveuse
  • Nourrissante du derme, raffermissante tissulaire, régénérante et assouplissante cutanée, protectrice contre la déshydratation intracellulaire
  • Immunostimulante

Usages thérapeutiques

  • Troubles cardiovasculaires et circulatoires : artériosclérose, hypertension, excès de cholestérol sanguin, thrombose, cellulite
  • Troubles de la sphère pulmonaire : catarrhe, coqueluche, asthme, toux
  • Troubles gastro-intestinaux : états inflammatoires gastro-intestinaux (entérite…), spasmes gastriques
  • Troubles hépatiques : diabète, cirrhose
  • Troubles de la sphère gynécologique : syndrome prémenstruel (déprime, irritabilité, tensions et douleurs mammaires), règles douloureuses et/ou tardives, mastose, mastalgie, préménopause, ménopause, problèmes liés aux modifications hormonales (maux de tête, mastodynie, etc.)
  • Troubles cutanés : eczéma, psoriasis, peau et muqueuses sèches à très sèches, dévitalisées, fatiguées, peaux ridées (sèches ou grasses) : l’huile végétale d’onagre rétablit le film hydrolipidique, la souplesse, l’élasticité et la tonicité de la peau
  • Syndrome de Sjögren
  • Hyperkinésie, stress, maladie d’Alzheimer, schizophrénie (l’huile végétale d’onagre « influence la libération de neurotransmetteurs cérébraux », 3)
  • Enfin, « l’un des grands espoirs de l’huile d’onagre est dans le traitement des affections dégénératives du système nerveux, comme la sclérose en plaques » (4)

Modes d’emploi

  • Extrait fluide ou teinture-mère de plante entière
  • Huile végétale (capsule, bouteille), seule, en synergie avec d’autres huile végétales et/ou huiles essentielles, en massage, en cure interne

Contre-indications, précautions d’emploi, autres usages

  • La seule contre-indication connue concernant l’huile végétale d’onagre est l’épilepsie.
  • Les feuilles occasionnent parfois des irritations de la gorge en cas d’infusion mal filtrée (cf. les petits poils qui couvrent les feuilles).
  • L’huile végétale d’onagre est fragile, apte au rancissement et, malgré des précautions d’usage (attention à la lumière, à la chaleur et à l’oxygène), se conserve difficilement au-delà de deux mois.
  • Cuisine : comme nous venons de le dire, l’huile d’onagre craint la chaleur. On en fera, si on le souhaite, une huile d’assaisonnement, à froid. A l’heure actuelle, la racine est cuite en ragoût, à la vapeur ou bien confite. On peut la ramasser jusqu’en mars mais jamais au-delà car elle devient filandreuse alors. Cette plante porte le surnom de « jambon » car, après cuisson, la racine présente la couleur caractéristique du jambon cuit (grâce à l’action du pigment végétal rouge qu’elle contient). Les jeunes feuilles se dégustent comme des épinards et les fleurs peuvent être conservées à l’état de boutons dans du vinaigre, à l’instar des câpres.
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    1. Jean-Luc Daneyrolles, Un jardin extraordinaire, p. 43
    2. Paul-Victor Fournier, Dictionnaire des plantes médicinales et vénéneuses de France, p. 697
    3. Michel Faucon, Traité d’aromathérapie scientifique et médicale, p. 803
    4. Gérard Debuigne & François Couplan, Petit Larousse des plantes médicinales, p. 325

© Books of Dante – 2016

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