Synonymes : menthe commune, menthe sauvage, menthe romaine, menthe à feuilles étroites, menthe Notre-Dame (= Herba sanctae Mariae, Unser frauen Müntz), menthe japonaise, baume des champs, baume vert.
La menthe des champs se signale par une forte odeur aromatique qui fait que, lorsqu’on met le pied dessus, elle attire forcément notre attention, et elle fait bien, car sa modeste stature (10 à 50 cm de hauteur) ne ferait guère converger les regards sans ce stratagème olfactif. Pourtant, elle est très commune (sauf en région méditerranéenne), et dès lors il est impossible de la louper.
Vivace, cette menthe se propage par le biais de tiges ascendantes ou rampantes très feuillées et velues, portant des feuilles rondes à ovales attachées aux tiges par des pétioles de 6 à 8 mm, et dont la lisière du limbe est dentée ou crénelée.
Les fleurs de la menthe des champs se groupent en têtes ou glomérules, verticillées à l’aisselle des feuilles, ce qui forme plusieurs étages floraux, et ses tiges ne s’achèvent pas, comme on le voit chez d’autres menthes, par des épis floraux sommitaux. Fleurissant de juillet à septembre, la menthe des champs se pare de minuscules fleurs pressées le long de la tige ; leurs corolles lilacées sont souvent teintées de violet.
Naturellement, la menthe des champs apprécie rien moins que les lieux frais et humides, tels que fossés, prairies, abord des zones marécageuses et cultivées en zones riches jusqu’à 1400 m d’altitude.
L’on trouve, à l’état de culture, la menthe des champs dans bien des pays, asiatiques surtout : Inde, Chine, Corée du Nord, Japon, Népal.
La menthe des champs en phyto-aromathérapie
Toutes les menthes se valent, dit-on. Ou encore : lorsqu’on n’a pas de menthe poivrée, il faut donner la préférence à la menthe des champs (ou bien à la menthe verte, c’est selon). Si elles se valent toutes, à l’exception de la menthe pouliot, toutes les menthes auxquelles la thérapeutique a fait appel un jour ou l’autre, possèdent, peu ou prou, les mêmes éléments constitutifs : des matières résineuses et pectiques, des principes amers, des tanins, des flavonoïdes, enfin une essence aromatique secrétée par des poils qui tapissent le verso du limbe des feuilles et dont la composition biochimique offre la véritable signature moléculaire propre à chaque huile essentielle de menthe. Prenons le cas de l’huile essentielle de menthe des champs : fraîche et mentholée, elle reproduit assez le parfum léger, suave et quelque peu édulcoré de la plante au naturel. Incolore ou bien de couleur jaune très pâle, elle rappelle assez celle de menthe poivrée, en particulier par la présence de deux molécules phares, un monoterpénol qu’on connaît bien, le menthol, et une cétone monoterpénique, le menthone. Mais, contrairement à l’huile essentielle de menthe poivrée, elle les possède dans des fractions inversement proportionnées. Observons plutôt les données chiffrées suivantes :
- Monoterpénols : 62 à 81 % dont menthol (57 à 77 %)
- Cétones : 10 à 22 % dont menthone (6 à 14 %)
- Monoterpènes : 6 % dont limonène (3 %)
- Esters : 2,5 % dont acétate de menthyle (2 %)
- Sesquiterpènes : 1 %
Note : le pourcentage de menthone contenu dans l’huile essentielle de menthe poivrée s’établit dans la vingtaine (25 %), auquel on ajoute dix bons points à celui du menthol (35 %). On n’observe pas chez elle le grand écart visible (entre menthol et menthone) dans la composition de l’huile essentielle de menthe des champs.
Cette huile essentielle, liquide et mobile, au parfum puissant, se distingue néanmoins de celui de la menthe poivrée, en ce sens que sa forte proportion de menthol l’amène parfois à se cristalliser à basse température (sans doute pour rappeler son caractère « glacial »), le menthol pur prenant l’aspect de cristaux transparents. Autant dire que cette seule molécule participe pour une bonne part aux propriétés thérapeutiques de cette huile essentielle, mais nous ne les distinguerons pas, le pluriel l’emportant, ici, sur le singulier.
Propriétés thérapeutiques
- Anti-infectieuse : antifongique (sur Candida sp., Trichophytons sp., Helicobacter pilori, Aspergillus niger), antibactérienne (sur méningocoques, Staphylococcus aureus, Staphylococcus epidermidi, Escherichia coli), antivirale (herpès labial), antiseptique, antiparasitaire
- Analgésique locale, antalgique, anesthésiante, antinévralgique, anti-inflammatoire, décongestionnante
- Expectorante, calmante de la toux, tonique respiratoire
- Apéritive, cholagogue, cholérétique, anti-émétique
- Hypertensive, vasoconstrictrice, tonique circulatoire
- Antispasmodique
- Anti-oxydante (légère)
- Rafraîchissante
- Tonique, stimulante
- Insectifuge, insecticide
- Résolutive, vulnéraire
- Antigalactogène (?)
- Décontractante musculaire
Usages thérapeutiques
- Troubles de la sphère respiratoire : rhume, rhinite, rhinopharyngite, pharyngite, laryngite, sinusite, toux spasmodique, coqueluche, asthme, angine, refroidissement, bronchoplégie des personnes âgées
- Troubles de la sphère gastro-intestinale : digestion lente et laborieuse, atonie des voies digestives, fermentation intestinale avec colique douloureuse, douleur après les repas, dyspepsie, inappétence, ballonnement, tympanite, aérophagie, douleur gastrique, gastralgie, gastrite, gastro-entérite, ulcère duodénal, constipation, entéralgie, vomissement d’origine nerveuse, nausée, mal des transports, cholérine, mauvaise haleine des dyspeptiques, hoquet, parasites intestinaux (vers), désordres digestifs des gastralgiques, des hystériques, des nerveux, des affaiblis et des femmes enceintes
- Troubles de la sphère hépatobiliaire : insuffisance biliaire, hépatisme, colique hépatique
- Troubles de la sphère vésico-rénale : colique néphrétique, douleur spasmodique de la vessie
- Affections cutanées : eczéma, urticaire, prurit avec démangeaison, piqûre d’insecte (moustique), contusion, enflure, hématome, ecchymose, ulcère atonique, gale
- Troubles locomoteurs : muscles et articulations endoloris, entorse, sciatique et autres névralgies, névrite, tremblement, crampe, rhumatisme, choc (huile essentielle traumatologique)
- Troubles de la sphère circulatoire et cardiaque : insuffisance veineuse, jambes lourdes et douloureuses, palpitations (?)
- Affections bucco-dentaires : douleur et névralgie dentaires, herpès labial, gingivite, stomatite
- Migraine, céphalée
- Névralgie intercostale
- Vertige, évanouissement, syncope, malaise
- Angoisse (on a remarqué que des inhalations de menthol permettaient parfois d’endiguer l’accès anxieux)
- Éloigner les insectes (mouches, moustiques, puces)
Modes d’emploi
- Infusion aqueuse ou vineuse de la plante fraîche comme sèche.
- Décoction aqueuse ou vineuse de la plante fraîche comme sèche.
- Macération acétique de la plante fraîche.
- Poudre (dans un véhicule adapté : une cuillerée de miel, par exemple).
- Baume (à l’exemple du baume du tigre ou apparenté) : dilution de l’huile essentielle de menthe des champs dans une suffisante quantité de cire végétale, de vaseline, de glycérine végétale (1 %).
- Huile essentielle : par voie cutanée diluée (à privilégier), par voie orale (sous certaines conditions et avec avis d’un thérapeute), en inhalation (avec prudence) et en olfaction.
- Hydrolat aromatique : par vaporisation, compresse, etc.
Précautions d’emploi, contre-indications, autres informations
- Récolte : toutes les menthes se récoltent avant leur floraison, jamais après, car à ce moment crucial, l’essence aromatique est à son maximum dans le feuillage de ces plantes. De plus, une récolte trop tardive nous exposerait à cueillir une menthe dont les feuilles les plus radicales seraient abîmées, voire jaunies.
- Séchage : pourvu qu’il se réalise à l’ombre, au sec et dans un local relativement bien aéré, il n’a rien de sorcier. L’on peut suspendre les tiges entières, que l’on effeuille au bout de cinq à six jours, quand elles craquent sous les doigts. Une dessiccation bien menée assure une bonne conservation du parfum et des propriétés thérapeutiques de la menthe des champs.
- Toxicité : par la présence de menthol majoritaire, l’huile essentielle de menthe des champs ne s’emploiera pas seule et non diluée par voie interne, le menthol étant un irritant des muqueuses stomacales. De plus, il ne s’absorbe pas au-delà de la dose de 100 mg par jour chez l’adulte. Dans tous les autres cas, l’on sait que cette huile essentielle de digestion rapide se métabolise au niveau du foie, puis s’élimine par voie biliaire et urinaire. Cependant, sa toxicité reste faible, et cette dernière, lorsqu’elle trouve les conditions favorables à son apparition, se manifeste par des phénomènes allergiques au niveau de la peau, un purpura, des démangeaisons, une sensation de chaleur accompagnant un érythème, ce qui explique qu’il ne faut pas procéder à des applications pures de cette huile essentielle sur la peau, ni non plus très étendues. L’on se méfiera également de cette huile essentielle par le biais de la dispersion atmosphérique, irritant tant les muqueuses oculaires que nasales. C’est pour cela que la plupart des préparations mentholées éviteront le contact avec les abords directs du nez, et à plus forte raison chez les enfants où cette proscription s’étendra à l’intégralité du visage. En effet, « l’huile mentholée à 1 %, même à la dose de deux gouttes, peut, chez les nourrissons, provoquer en injection nasale un spasme de la glotte, avec phénomènes asphyxiques » (1).
- Voici maintenant dans quels cas précis il est préférable de ne pas employer cette huile essentielle : -pathologies hépatiques et biliaires (hépatite, insuffisance hépatique, cirrhose, lithiase biliaire, etc.). Le menthol seul peut occasionner des ictères ; -troubles du rythme cardiaque ; -règles trop abondantes ; –déficience en enzyme G6PD ; -prises de médicaments homéopathiques ; -intolérance au paracétamol ; -antécédent neurologique (épilepsie) ; -enfin, on évitera cette huile essentielle chez l’enfant de moins de 7 ans et durant les trois premiers mois de grossesse (la petite fraction de cétones monoterpéniques contenue dans cette huile essentielle rappelle, en général, le caractère neurotoxique et potentiellement abortif des huiles essentielles qui en contiennent).
- Dans tous les autres cas, attention aux dosages excessifs, puisque cette huile essentielle-là, à fortes doses, est stupéfiante, c’est-à-dire qu’elle stimule dans un premier temps, occasionnant excitation, agitation, hyperesthésie, tremblements, avant de faire entrer l’organisme dans une phase dépressive.
- La menthe est relativement sollicitée à travers de nombreuses fonctions relevant de la parfumerie, de la savonnerie, de la cosmétique et des produits d’hygiène (dentifrices, gommes à mâcher, etc.), comme agent de sapidité dans de nombreuses spécialités pharmaceutiques.
- Elle trouve aussi toute sa juste mesure en confiserie, en liquoristerie, ainsi que dans l’industrie des boissons rafraîchissantes.
- En cuisine, crue comme cuite, la menthe fait des merveilles comme herbe condimentaire dans les salades de légumes (la salade niçoise, par exemple), de céréales (le taboulé !) ou encore de légumineuses (petits pois), dans les sauces (comment ne pas citer la sauce à la menthe qui accompagne le gigot rôti de Pâques en Angleterre ?), les soupes (à la tomate, aux pois cassés, au potiron), les plats dits « exotiques », les desserts (crème, sorbet, glace), les boissons (vin, sirop, thé à la menthe maghrébin), etc. On dit habituellement que la menthe culinaire se doit d’être la menthe verte, mais l’on peut très bien faire intervenir la menthe poivrée, la menthe citronnée ou encore la menthe des champs, la matière première végétale que l’on peut localiser dans son périmètre immédiat jouant aussi son rôle.
- Des pommes frottées du suc frais de la menthe se gardent de la pourriture.
- Autres espèces : la menthe aquatique (M. aquatica), la menthe sylvestre (M. longifolia), la menthe des cerfs (M. cervina), la menthe cultivée (M. sativa), la menthe à feuilles rondes ou menthe-pomme (M. rotundifolia), la menthe gracile (M. gentilis), la menthe odorante (M. suaveolens), etc.
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- Larousse médical illustré, p. 737
© Books of Dante – 2020