
C’est une petite exclusivité que je vous propose là : ni plus ni moins que l’introduction de mon prochain livre, Herbes & Feux de Saint-Jean, accompagnée de l’illustration qui viendra embellir sa couverture Bonne lecture ! :)
A travers les âges, l’Homme s’est voué à plusieurs cultes. La Pierre et la Source en sont deux avatars. En ces temps anciens durant lesquels l’Homme devait faire face à différents maux (la maladie, la guerre, la famine, de mauvaises récoltes…), l’esprit humain s’est tourné vers des pratiques mêlant autant diverses formes de magies qu’un appel aux divinités. Certaines mesures médicinales plus empiriques que raisonnées furent également conviées. Toutes avaient pour but un mieux-être ainsi que la résolution de problèmes divers et variés.
Malgré la progression constante du christianisme, les rites païens surent rester vivaces. Au dogme ecclésiastique s’opposa l’héritage de pratiques multi-millénaires. Il est bien entendu que l’Église chrétienne aura cherché, par tous les moyens, à extraire les mauvaises herbes païennes de son pré carré et à séparer le bon grain de l’ivraie. Las. Une résistance plus ou moins passive s’instaura. Plutôt que d’user son prosélytisme jusqu’à la culotte, l’Église eut une idée géniale. Au lieu de vindicte et d’anathème, elle devint peu à peu relativement tolérante face à ces rites forcément idolâtres. En amadouant et en les absorbant, comme une amibe gloutonne le ferait d’un microbe, la chrétienté détourna ces rites de leurs destinations originelles. C’est alors qu’on assista à la christianisation des anciens lieux de culte. Bien des églises et des chapelles ont été érigées sur leur emplacement. On évangélisera même les menhirs dont certains sont encore surmontés d’une croix aujourd’hui. On aura conservé les mêmes lieux tout en modifiant quelque peu le décor. D’antiques divinités on aura fait des saints. Le cas de Brigitte est éloquent à cet égard.
Bien que phagocytées par la chrétienté, les anciennes croyances moururent-elles ? Pas vraiment. Malgré le travail mené en profondeur par l’Église, celle-ci ne put jamais aller au bout de sa quête. C’est pourquoi, çà et là, au cours de l’Histoire, on assista à diverses réminiscences d’anciens cultes païens L’Église n’aura donc jamais réussi à faire tabula rasa. Et c’est pour cette raison, entre autres, qu’aujourd’hui encore on célèbre la fête dédiée au solstice d’été, autrement dit les feux de la Saint-Jean, le jour de la fête de la musique. Le paganisme, malgré son grand âge, n’en reste pas moins plein de verdeur et de vivacité. il est à l’image du pissenlit : plus on cherche à l’arracher, plus il repousse. Mais aussi à celle de la renouée des oiseaux qui adore qu’on lui marche dessus sans paraître s’en offenser le moins du monde, au contraire, elle s’en trouve même ragaillardie. Le chiendent, autre figure emblématique, exprime aussi cet état de fait ; il enfonce si profondément ses racines dans le sol que le soc de la charrue ne parvient à les en extirper.
Aujourd’hui, les curés ne pourchassent plus les païens à travers champs et forêts. Cette relative liberté de culte aura-t-elle profité à ces derniers ? Très certainement. La résistance proviendrait-elle de l’oppression ? A n’en pas douter, oui. Un culte qui ne serait plus diabolisé serait-il voué à disparaître ? Pas sûr.
Les temps changent. Et c’est dans leurs prérogatives. Les temps changent les hommes mais il est aussi vrai que l’homme peut changer le temps durant lequel il déroule son existence. Des feux brûlent encore lors de la Saint-Jean. Revêtent-ils pour autant le même esprit que les feux d’antan ? Très certainement pas. Du reste, est-ce bien important de le savoir, sachant qu’une tradition quelle qu’elle soit est destinée à périr si on cherche à la reproduire à l’identique indéfiniment. Des évolutions et des mutations ont eu lieu. Elles ont remodelé peu à peu un antique phénomène qui consiste à élever un énorme brasier au solstice d’été, unique jour de l’année où le Soleil est à son apogée dans nos contrées. Chaque année, au jour où l’astre solaire est roi, de grands feux sont ainsi érigés, éclairant le ciel nocturne le plus court de notre calendrier. Des herbes y sont traditionnellement jetées. Nous chercherons à savoir pourquoi tout en exposant chacune de celles que l’on appelle les herbes de la Saint-Jean, pourvoyeuses des espoirs et des souhaits des hommes.
© Books of Dante – 2015
WordPress:
J’aime chargement…