Le basilic tropical (Ocimum basilicum)

Synonyme : basilic indien, basilic exotique, basilic romain, herbe royale, oranger de savetier (1), balico.

Avant d’atterrir dans le creuset des distillateurs de l’ancien temps, le basilic a parcouru un long chemin. L’adjectif « tropical », au reste, est là pour nous rappeler, grosso modo, sa provenance. Comme on le surnomme également basilic indien, ce dernier adjectif nous fournit davantage de précisions : en effet, le basilic tropical est bel et bien originaire du sous-continent indien (et doit être rigoureusement distingué du pistou, une sous-espèce quelque peu différente). Tout comme la menthe, le basilic est une plante aromatique et condimentaire tellement courante en cuisine, que l’on pourrait en oublier sa provenance asiatique. Cultivé en Inde depuis au moins 4000 ans, le basilic s’est ensuite enraciné en Asie mineure, avant de gagner l’Europe balkanique, non sans avoir, auparavant, foulé la terre égyptienne il y a trente siècles, et où l’on sait, qu’en tant qu’herbe parfumée, il embaumait les temples. « Le basilic est également une herbe rituelle qui figurait au culte des morts dans l’Égypte des pharaons » (2). En Grèce, après y avoir été probablement rapporté par Alexandre le Grand au IV ème siècle avant J.-C., la culture du basilic prend aussitôt, et suivra de près ce mouvement en Rome impériale. Cela explique qu’on puisse découvrir le basilic dans les vieux traités médicaux et agronomiques de l’Antiquité gréco-romaine. Ainsi apparaît-il dans l’œuvre de Varron, mais aussi de Columelle, sans oublier Pline qui le dit bon contre l’épilepsie (sic) et lui taille une réputation aphrodisiaque, et Galien qui, contrairement au naturaliste, déconseille l’usage interne du basilic. Quant à Dioscoride, il fait le distinguo entre le basilic sauvage (Acinos) et celui qu’il appelle Ocymoïdes (très vraisemblablement le même que le Livre des Cyranides mentionne sous le nom d’Ôkimos). Ce dernier est censé posséder une semence dont la vertu s’oppose aux morsures des vipères, tandis que le précédent, aux rameaux subtiles et cassants, au feuillage plus velu que celui de l’Ocymoïdes, restreint les flux stomacaux et menstruels (métrorragie). De plus, « Dioscoride accorde au basilic la vertu diurétique mais il lui reproche, sans raison plausible, d’affaiblir la vue lorsqu’on en fait un usage trop abondant » (3). Chez les Romains, il passe pour galactogène et carminatif. Serenus Sammonicus réitère sa vertu diurétique, et intitule ainsi l’un des chapitres des Préceptes médicaux : « Contre les affections de la vessie : contre le calcul et la rétention d’urine ». Mais ce qui demeure le plus surprenant parmi ce que les anciens Grecs et Romains ont laissé dans leurs écrits, c’est sans doute ceci : « Le basilic, ainsi que l’affirme Théophraste, agacé par les injures et les violences, croît et s’allonge, et plus on le provoque, plus il grandit » (4). Subissant le même traitement que le cumin et la rue fétide, il importait donc d’injurier copieusement le basilic lors des semailles afin qu’il s’épanouisse au mieux. Aujourd’hui, l’expression « semer le basilic » indique la médisance.

Il n’y a pas loin de la face lumineuse à la face obscure.

Chez les Grecs, le basilic était symbole de haine et de malheur, à tel point que l’on représentait allégoriquement la pauvreté sous les traits d’une mendiante tenant un pot de basilic. Également emblème de la colère, le voir en songe était considéré comme de mauvais augure. Funéraire et sinistre, on le plantait fréquemment sur les tombes. Mais d’où vient que, tour à tour, le basilic apparaît extrêmement bénéfique ou carrément néfaste ? Vénéré ici, méprisé là, c’est, une fois de plus, toute l’ambivalence propre à l’esprit humain que d’attribuer à une même plante de multiples symboles dont certains sont parfois diamétralement opposés. En raison de quelle association le basilic porte-t-il en lui cette dichotomie ? Venons-y.

Dans son Herbarius, le pseudo-Apulée (IV ème siècle après J.-C.) mentionne le basilic parmi plus d’une centaine de plantes. Y sont indiqués les soins de récolte : tout d’abord, il importe de tracer un cercle tout autour de la plante au coucher du soleil, puis de la sectionner, à la condition que cela ne soit pas avec un instrument en fer. Ainsi, « cette herbe royale triomphe de toutes les violences, explique-t-il, et, si on la porte sur soi, on sera protégé de toutes les générations de serpents ». En ce seul passage, nous avons affaire à une interrelation entre la plante et l’animal mythique, assez proche de la gorgone dans ses principales attributions, qui méduse et tue de son regard foudroyant toute personne assez folle pour lui jeter une œillade. Quelles que soient les étymologies, il est toujours question, lorsqu’on parle du basilic, de royauté : du latin basilicum, tiré du grec basilikon qui signifie « royal » (basileus désigne le roi, le prince), en allant jusqu’au basilisk, c’est-à-dire le roi des serpents, partout l’on retrouve cette idée. Peut-être a-t-on donné à cette plante le nom de basilic parce qu’elle permettrait, dit-on, de repousser les serpents (le basilic est un traitement d’appoint des morsures de vipères), et, peut-être le roi des serpents qu’est le basilic, animal hybride à l’allure de coq teigneux, aux ailes huilées de chauve-souris et queue de serpent (au Moyen-Âge, l’on trouve cette étonnante orthographe pour qualifier le bestiau : bazeillecoq). Les indices des pouvoirs répulsifs du basilic sur les serpents et le grand basilic, il faut aller les chercher du côté de l’Inde où le basilic qu’on dit sacré (Ocimum sanctum) prend, tout comme l’oignon d’ailleurs, le nom sanskrit de bhûtagni que l’on peut traduire par « plante tueuse de monstres ». Voilà qui est tout de suite plus clair ! Ce qui explique qu’on ait affublé le basilic tropical du pouvoir d’écarter les esprits et les démons, et que « porté sur soi, il empêche toute vision infernale » (5) d’un basilic, en particulier dans sa cuisine où il est préférable d’y abriter une brassée de tiges feuillées du premier plutôt que les regards furibonds et dégoulinant de haine du second !

Cette association entre la plante et l’animal est intéressante à plus d’un titre, en particulier si l’on oppose la rectitude de la royauté qui, parce qu’elle se tient droite, imprime un mouvement d’élévation, à la nature pulsionnelle, passionnelle et désireuse du serpent animal qui rampe à l’horizontal. On se rend compte à quel point le premier contrecarre le second, et qu’il joue souvent le rôle d’amulette protectrice qui défend l’homme face aux pièges tendus par la malignité, quelle que soit la forme qu’elle adopte. « Tu marcheras sur le lion et sur l’aspic, et tu fouleras le lionceau et le dragon », assure, prévoyant, le psaume biblique de la protection (6).

« L’homme a le pouvoir, sur son chemin d’évolution, de transformer toutes les forces destructrices qui existent en lui et le basilic agit de la sorte dans la nourriture que cet homme ingère. En effet, le basilic a la réputation de pénétrer le sang aussi rapidement que le fait le poison et de chasser tout ce qui s’oppose à la vie » (7). A ce titre, l’on connaît le fameux cas de Glaucus qui fut ramené à la vie grâce à du basilic malgré les médecins désespérés par son cas qui s’étaient pressés à son chevet.

« Le basilic mériterait sans doute un usage plus universel, à l’image de ce qu’il fut dans le passé, afin qu’il puisse s’opposer à l’attaque du serpent à mille têtes qui est apparu, de nos jours, dans le domaine de la nutrition » (8). Comment contredire une si lumineuse pensée ?

Nous avons déjà caressé l’idée selon laquelle le basilic serait habité d’une dimension funéraire. Très fréquemment, elle s’associe à une autre, de nature érotique, ce qui peut surprendre au premier abord. Par exemple, en Crète, où le basilic est symbole de deuil, on le trouve pourtant à toutes les fenêtres. Il symbolise aussi « l’amour lavé de pleurs ».

Le basilic possède des vertus lénifiantes « qui expulsent du cœur les vapeurs mélancoliques », professait G. Hoffmann, mais lorsque la mort a frappé, il est déjà presque trop tard. Cependant, le grand rôle joué par cette plante dans les traditions populaires, en Italie et en Grèce, n’est pas toujours marqué par un si funeste aspect, alors que ressort très nettement la valeur érotique du basilic. Par exemple en jetant des feuilles de basilic sur les cendres encore chaudes de l’âtre, l’on peut interpréter par l’aspect qu’elles adoptent quelque présage amoureux. Quand on est sûr de son coup (pour ainsi dire), l’on peut rendre visite à sa belle, un brin de basilic sur l’oreille. Parfois, le prétendant va jusqu’à offrir un pied de basilic : « L’on m’a raconté, explique Michel Lis, comment, jadis, on déclarait sa flamme : le prétendant offrait à la jeune fille désirée un pied de basilic accroché à une canne [NdA : certainement pour ne pas se prendre une gifle en cas de refus… ^.^], si celle-ci acceptait, elle plantait le basilic » (10), et tout était dit ! Enfin presque, mais je ne dis rien des murmures et soupirs que se bécotèrent les amoureux. En revanche, quand il y avait de l’eau dans le gaz entre ces deux-là, il était utile de leur faire avaler de grandes salades composées de basilic, d’alysson marin et de laitue (ce qui est fort curieux, compte tenu de ses propriétés anaphrodisiaques ; la laitue a au moins l’avantage, dans ces circonstances, de rafraîchir les idées). A d’autres fois, le basilic était du fait de la jeune fille. Celle qui offre un brin de basilic à un jeune homme le fait immanquablement tomber amoureux d’elle, et lorsque l’amant est bien ferré, elle lui fait comprendre qu’il peut pénétrer dans son intimité dès lors qu’elle ôte de sa fenêtre le pot de basilic qui s’y trouve. Enfin, selon la manière dont les femmes portaient le basilic, cela donnait des indices sur leur situation : accroché à la ceinture, il signalait la virginité de la jeune fille ; à la tête, cela indiquait une femme mariée. On le retrouve encore au sein de pratiques plus « sorcières » : une femme désirant un enfant se frottait le ventre de feuilles de basilic. Des philtres composés de racines de basilic et de céleri, de cumin et de feuilles de serpentaire étaient censés susciter l’amour. Étonnants pouvoir quand l’on sait à quel point le basilic est frileux, qu’il craint le gel et les courants d’air !

Le basilic pénétra tardivement en Europe occidentale. On sait que cette plante fit partie du jardin des simples d’Hildegarde de Bingen au XII ème siècle. Pour l’abbesse, il s’avère tonique, antispasmodique, digestif, pectoral et vermifuge. Elle en élabora un vin fébrifuge et le fit participer à sa recette de l’onguent d’Hilaire l’Égyptien, un onguent antalgique intervenant en cas de paralysie et de difficultés d’élocution entre autres. Platearius, de l’école de Salerne, indiquait au même siècle les vertus emménagogues du basilic, suivi de près par Bernard de Gordon qui en signalait la présence à l’école de médecine de Montpellier au XIII ème siècle, l’employant face à la manie et la mélancolie. Il faudra attendre le début du XVI ème siècle pour que l’on parle enfin de l’essence de basilic, en particulier dans le Traité de la distillation (1506) de Hieronymus Brunschwig et, plus tard, dans le Dispensatorium noricum (1589), tandis qu’entre ces deux dates, Matthiole s’attacha à faire la part du faux et du vrai à propos des différentes assertions tenues avant lui au sujet de cette plante.

Au siècle suivant le basilic remémore à tous ses pouvoirs de protection : en temps d’épidémie, l’on porte sur soi un sachet de plantes aromatiques, dont le basilic, que l’on respire aussi souvent que nécessaire afin de se prémunir des miasmes putrides. Comment s’étonner de ce que cette plante conjure les sortilèges et protège contre les mauvais esprits ? Plante régie par Jupiter (et Mars également, ce qui nous renvoie immanquablement au signe zodiacal du Scorpion avec lequel l’on a volontiers confondu le basilic), « en compagnie de la sauge, il permit à la Sainte famille de se cacher lorsqu’elle fuyait Hérode » (11), ce qui est bien présomptueux mais habituel au christianisme qui s’empresse de faire sien ce qui, autrefois, appartenait aux païens. D’ailleurs, l’on retrouve le basilic à travers une très surprenante anecdote : « Une légende dit que sainte Hélène, la mère de l’empereur Constantin qui convertit l’Empire romain au christianisme au III ème siècle, se laissa guider par le parfum d’une plante alors peu connue (sic), le basilic, pour trouver la croix du Christ » (12), ce qui me paraît outrageusement exagéré et fruit d’une évidente propagande, surtout quand on sait qu’Hélène, de basse extraction, n’était qu’une servante d’auberge, et peut-être même une prostituée (stabuleria). Bref.

Au XVIII ème siècle, « les Parisiennes à la mode cultivent la giroflée et le basilic en pot » (13), mais l’on ne nous dit pas si elles l’ôtent de leur fenêtre, à la manière des Siciliennes, et, si oui, ce qui se passe à l’ombre des alcôves et des boudoirs en un pareil cas…

Comme c’est le cas chez de très nombreuses représentantes de la famille des Lamiacées, les tiges du basilic observent une section quadrangulaire, mais, contrairement à la plupart de ses cousines, le basilic n’est qu’une plante annuelle (ou vivace à vie courte dans des circonstances particulièrement favorables), mais cela n’empêche pas ses tiges de devenir si robustes qu’elles se lignifient à leur base, c’est-à-dire qu’en l’espace de moins d’un an, le basilic est capable de fabriquer du « bois ». Ainsi atteint-il parfois soixante bons centimètres de hauteur. Plante très rameuse, l’aspect touffu du basilic est accentué par une profusion de feuilles ovoïdes ou lancéolées (selon la variété), généralement vert vif luisant. Entières et opposées, ces feuilles au parfum honni ou adoré, bien que relativement minces, offrent, entre les doigts qui les triturent un peu, une résistance un peu caoutchouteuse. La floraison, qui intervient dès le mois de juin pour s’achever en septembre, forme des épillets assez peu denses de fleurs verticillées, tubuleuses et bilabiées, dont la couleur est généralement blanche, mais peut arborer une teinte rosée, jaunâtre ou rougeâtre plus violacée. A l’issue, elles produisent des fruits à quatre loges, des nucules (= « petite noix ») pour être précis, renfermant de minuscules semences noires. Le basilic, non indigène en France et très rarement subspontané, ne doit sa présence dans l’hexagone que par le biais de cultures au détail ou en grand, à la condition que les sols qui l’accueillent soient riches et l’exposition franchement ensoleillée.

Le basilic tropical en phyto-aromathérapie

Avant même que l’huile essentielle de basilic tropical ne se vulgarise, affichant des tarifs fort abordables (même en qualité biologique), il faut savoir que le basilic ne passait pas son temps qu’en cuisine, finement ciselé entre la tomate et la mozzarella, la pratique médicale s’étant laissée tenter d’en faire autre chose qu’un pesto, même si ce dernier est succulent. La médecine employa donc les feuilles et les sommités fleuries du basilic principalement, quelquefois ses semences mucilagineuses. Mais il est vrai que l’analyse pharmacologique a quelque peu buté sur l’odeur aromatique très agréable du basilic, sur sa saveur piquante, chaude et envoûtante, parce quelle n’a pas été capable de nous dire si le basilic contenait autre chose que du tanin, de la chlorophylle et des sels minéraux. En revanche, il est parfaitement avéré que la prégnance aromatique du basilic n’a pu être ignorée de quiconque, et l’on ne s’est pas laissé aller béatement, face à cette essence aromatique. Autant dire qu’elle a mis les distillateurs en appétit, au sens propre comme au sens figuré ! Après une cueillette où prévalent l’attention et le respect (mais quelle plante ne les mérite pas ?), l’on distille, pendant 90 à 120 mn, les sommités fleuries du basilic, dont la vapeur d’eau enlève et entraîne les molécules aromatiques dans les mystères du serpentin, avant que de choir dans le vase florentin.

Les rendements, très fantasques, s’étalent entre 0,03 et 0,5 % chez la plante fraîche, et entre 0,2 et 2,7 % chez la sèche. Habituellement liquide, limpide et jaune pâle, l’huile essentielle de basilic tropical peut être amenée à subir quelques modifications dans sa texture olfactive : tantôt forte, épicée, anisée, à la limite du liquoreux, elle apparaît par ailleurs plus puissamment herbacée, fraîche et verte. Ces différences notables s’expliquent par le biais du chémotype : en effet, selon la provenance du basilic, son huile essentielle diffère du tout au tout. Pour rendre compte de ce phénomène, je communique ci-dessous les données biochimiques concernant deux huiles essentielles de basilic tropical : la première provient d’Inde, la seconde d’Égypte.

Huile essentielle indienne (14)

  • Phénols méthyle-éthers : 78 % dont méthyle-chavicol (76 %), eugénol méthyle-éther (1 %)
  • Monoterpénols : 18,6 % dont linalol (15,5 %)
  • Sesquiterpènes : 3,4 % dont α-bisabolène (1,6 %), α-trans-bergamotène (0,6 %)
  • Monoterpènes : 1,5 %

Huile essentielle égyptienne (15)

  • Monoterpénols : 52,7 % dont linalol (50,6 %)
  • Sesquiterpènes : 21,8 % dont α-trans-bergamotène (5,9 %), β-élémène (3 %), γ-cadinène (2,7 %)
  • Oxydes : 9 % dont 1.8 cinéole (8,7 %)
  • Phénols : 5,5 % dont eugénol (5,15 %)
  • Monoterpènes : 4,65 %

Note : il existe aussi un chémotype à linalol, produit en Italie ainsi qu’en Europe de l’est.

Propriétés thérapeutiques

Les domaines d’action du basilic tropical, s’ils devaient être réduits à un seul trio, seraient les suivants : la sphère gastro-intestinale, la sphère hépatique et la sphère génito-urinaire.

  • Anti-infectieux : antivirale, antifongique, antibactérien (sur Campylobacter jejuni, Escherichia coli, Listeria monocytogenes, Salmonella enterica, Candida sp.), antiseptique intestinal
  • Antalgique, anti-inflammatoire puissant
  • Antispasmodique neuromusculaire puissant
  • Tonique digestif, stomachique, carminatif, vermifuge intestinal
  • Stimulant hépatobiliaire, décongestionnant hépatique, cholagogue
  • Diurétique, « purifie le sang », décongestionnant prostatique
  • Emménagogue, décongestionnant du petit bassin, galactogène
  • Neurotonique, sédatif, calmant, antidépresseur
  • Stimulant des cortico-surrénales, fortifiant, musculotrope, positivant
  • Sternutatoire (16), « dégage les poumons », antihistaminique
  • Décongestionnant veineux
  • Anti-oxydant
  • Détersif cutané
  • Insectifuge, insecticide, nématocide

Usages thérapeutiques

  • Troubles de la sphère gastro-intestinale : digestion lente et pénible, indigestion, dyspepsie d’origine nerveuse, atonie digestive, flatulence, ballonnement, aérophagie, colite spasmodique, spasmes gastro-intestinaux, gastro-entérite, gastrite, aérogastrite, entérocolite virale, grippe intestinale, colique, diarrhée, constipation, nausée, vomissement, mal des transports, hoquet, éructation, borborygme, acidité gastrique, maladie de Crohn (?)
  • Troubles de la sphère pulmonaire + ORL : rhume, perte d’odorat du coryza, rhume des foins, bronchite, catarrhe bronchique, grippe, asthme, maux de gorge, angine, toux, coqueluche à ses débuts, surdité, otite
  • Troubles de la sphère circulatoire : varice et autres stases veineuses des membres inférieurs
  • Troubles de la sphère hépatobiliaire : insuffisance pancréatique et hépatique, congestion hépatique, hépatite virale
  • Troubles de la sphère gynécologique : congestion du petit bassin, troubles prémenstruels, règles douloureuses et insuffisantes, dysménorrhée, crampes menstruelles, spasmes et bouffées de chaleur de la femme ménopausée, tension dans les seins, harmonisation de la circulation sanguine avant et après l’accouchement, douleur de l’accouchement, leucorrhée (semences)
  • Troubles locomoteurs : rhumatisme, arthrite, polyarthrite rhumatoïde, tendinite, contracture et élongation musculaires, courbature, crampe, arthrose
  • Affections cutanées : zona, eczéma sec, irritation et inflammation cutanées, irritation du cuir chevelu, piqûre d’insecte, morsure, coup, contusion, blessure, cernes sous les yeux, taches de vieillesse ou pigmentaires
  • Troubles de la sphère vésico-rénale : inflammation des voies urinaires, néphrite (semences), gonorrhée (semences), prostatite
  • Troubles du système nerveux : spasmophilie, « hystérie », stress, anxiété, angoisse, nervosisme, fatigue nerveuse, épuisement intellectuel et psychique, surmenage, fébrilité, faiblesse, manque de dynamisme et de tonus, déprime, dépression, idées noires, insomnie et autres troubles du sommeil (en plus de cela, l’on peut affirmer sans l’ombre d’aucun doute que l’huile essentielle de basilic tropical « calme la colère, le ressentiment et l’incompréhension », ce à quoi l’on peut allègrement ajouter le doute et l’inquiétude. Elle prend aussi en charge les états de choc, et se montre « utile pour l’indécision », amenant davantage de clarté. Enfin, elle « encourage la vigilance [et] favorise l’intégrité et l’assertivité »)
  • Repousser les mouches, les puces et les moustiques (d’où le pot de basilic aux fenêtres, de même que le géranium, fort réputé contre les « intrus » de toute nature)
  • Céphalée opiniâtre, céphalée d’origine nerveuse ou digestive
  • Aphtes, petites affections bucco-dentaires

Note : l’assertion selon laquelle l’huile essentielle de basilic tropical est utile dans l’épilepsie est bien évidemment une funeste blague.

D’un point de vue psycho-émotionnel

Je ne vais pas réquisitionner ici tout ce qui a déjà été éparpillé à ce sujet, de manière plus ou moins subtile, au fil de cet article. Mais je puis ouvrir une parenthèse pour signaler l’existence d’un élixir floral de basilic qui s’adresse aux personnes qui ne parviennent pas à équilibrer leur vie sexuelle avec l’ensemble des autres facettes de leur existence, concernant tant une libido excessive que réduite à peau de chagrin. Élixir utile parce que « souvent, lorsqu’il y a un déséquilibre sexuel –, trop fort besoin ou, au contraire, trop forte lassitude – c’est qu’il y a un conflit latent ou bien ouvert » (17). Or, nous l’avons dit, le basilic, par le truchement de son huile essentielle, étouffe la colère, le ressentiment, évacue les idées noires, et ouvre l’esprit de l’individu en direction d’un nouvel horizon quand c’est pour lui le moment adéquat. A son contact olfactif, on éprouve un « sentiment d’apaisement, de calme. [Une] sensation de douceur, de clarté intérieure, de joie et de confiance, et [qui] donne envie de s’étirer. Peut être utilisé lorsqu’on a du mal à se centrer, à être dans le moment présent, et qu’on a besoin de stimulation pour agir et passer à l’action » (18), en particulier lorsqu’on souhaite se défaire d’une mauvaise habitude depuis longtemps ancrée, comme une addiction au tabac ou à l’alcool.

Modes d’emploi

  • Infusion simple de feuilles (ou de sommités fleuries) fraîches ; infusion composée de feuilles (ou de sommités fleuries) fraîches : basilic + absinthe + baies de genévrier à parts égales. Compter 2 g de ce mélange pour un grand bol d’eau. Prévoir sucre ou miel pour étouffer l’amertume apportée par l’absinthe.
  • Décoction et décoction concentrée de sommités fleuries fraîches.
  • Teinture alcoolique, liqueur de feuilles fraîches.
  • Sirop de feuilles fraîches.
  • Pommade.
  • Manducation de feuilles fraîches (contre les aphtes, entre autres, et pour rafraîchir l’haleine).
  • Feuilles fraîches froissées appliquées en friction énergique sur les piqûres de guêpe, les morsures de vipère (dans ce cas, il s’agit d’un seul traitement d’appoint).
  • Huile essentielle : voie cutanée diluée, diffusion atmosphérique, olfaction, inhalation. Proscrire l’usage per os autant que faire se peut, car « les huiles [essentielles de basilic tropical] sont réservées à l’usage externe pour éviter tout risque de mutations génétiques » (19).

Précautions d’emploi, contre-indications, autres informations

  • Confusion : attention de ne pas confondre le basilic tropical à méthyle-chavicol avec le basilic doux européen, simple variété du précédent, qu’en principe l’on étiquette ainsi : Ocimum basilicum ssp. basilicum CT linalol. Si le chémotype change sur le flacon, il en va bien évidemment de même en ce qui concerne le contenu du flacon ambré. Le basilic doux contient plus de linalol et moins de méthyle-chavicol que son compère tropical, ce qui en fait un produit d’usage plus maniable. Du fait de sa plus grande teneur en linalol, il s’avère davantage antibactérien ; en revanche, son action antispasmodique est moins importante que celle du basilic tropical. De même, on ne se méprendra pas en assimilant ces deux basilics au basilic sacré (Ocimum sanctum) qui est une tout autre espèce.
  • Toxicité : la moindre que présente l’huile essentielle de basilic tropical à méthyle-chavicol, c’est son caractère, non pas dermocaustique, mais irritant pour la peau quand elle y est appliquée à l’état pur. Les peaux fines et fragiles y prendront garde. On fera de cette huile essentielle un usage modéré dans le temps, en cause la forte proportion de méthyle-chavicol. Il s’avère qu’à doses massives administrées sur un laps de temps prolongé, cette huile essentielle devient stupéfiante (elle stimule puis déprime l’organisme). Sa toxicité peut s’exprimer à travers une génotoxicité et/ou une cancérogénicité. Dans certains cas très particuliers (allergie, par exemple), il est possible d’envisager un usage interne via un traitement d’attaque à raison de 500 à 1000 mg/jour d’huile essentielle de basilic tropical, sans excéder cinq à six jours de traitement consécutifs, à moins d’opter pour des doses plus faibles, de l’ordre de 100 mg/jour administrées sur une durée plus étendue. Les conseils d’un aromathérapeute sont bienvenus. Enfin, dans tous les cas suivants, l’on prendra soin d’éviter cette huile essentielle : femme enceinte (possible stimulation œstrogénique), enfant, bébé.
  • Récolte : elle se déroule en juillet et en août. Mais dans certains cas, il est possible d’effectuer trois coupes durant l’année.
  • Alimentation : certaines personnes préfèrent user de basilic exclusivement sec, tout comme c’est le cas en de rares occasions dans le domaine de la phytothérapie. Or la dessiccation – on ne le répétera jamais assez –, opère en lui une cruelle perte de propriétés, tant gustatives que thérapeutiques, s’évanouissant en même temps que sa saveur et ses arômes. Autant dire que, dans un cas comme dans l’autre, il ne sert plus à grand-chose, et qu’il faut l’utiliser au plus vite dans l’année qui vient. Donc, du basilic frais, c’est beaucoup mieux, même s’il est vrai que son caractère annuel en limite l’utilisation tout au long de l’année (mais cela ne doit être en aucun cas un écueil : cela nous invite simplement à partir à la recherche d’une autre plante qui possède les mêmes fonctions que le basilic et qui serait disponible quand lui ne l’est plus). Et puis, le basilic n’est-il pas une plante estivale ? Aurait-on l’idée de consommer du basilic frais en plein hiver ? Non ! Il faut se conformer au rythme des saisons, c’est à cela qu’elles servent : donner la mesure. Ce qui explique qu’à la saison chaude, l’on préfère se rafraîchir avec une belle salade de tomates au basilic, parsemée de quelques olives noires, de fines tranches d’oignon rouge et des utiles duos condimentaires – vinaigre/huile, sel/poivre – et de quelques cubes de feta ou tranchettes de mozzarella. Le basilic entre encore dans la composition de nombreuses préparations en tant qu’aromate. Il se marie à merveille avec l’ail, l’aubergine et, donc, la tomate (d’ailleurs, au jardin, associer la culture du basilic à celle des tomates et bénéfique pour les deux plantes). On le retrouve fréquemment dans les cuisines méridionales (Italie, Grèce, Midi de la France) et asiatiques (Inde, Thaïlande). C’est lui qui donne son nom et son arôme à la soupe au pistou, nom provençal du basilic, pas tellement éloigné, orthographiquement, de l’italien « pesto ». (Pistou émane d’un verbe latin, pistare, qui signifie « broyer », attendu que le basilic est passé au mortier ; pesto possède une étymologie analogue, dérivant du verbe italien pestare qui veut dire « piler ».) Le basilic est donc bienvenu dans les salades composées, les omelettes, les sauces, les ragoûts, les soupes froides du type gaspacho, les pizzas, certaines viandes et poissons blancs au court-bouillon. Avec le saumon, il n’est pas inintéressant. On peut même l’ajouter frais à du vinaigre pour confectionner un vinaigre au basilic qui, sans démériter, s’approche de la saveur du vinaigre à l’estragon.
  • Variétés : à propos du basilic tropical, les horticulteurs s’en sont donnés à cœur joie. En effet, Ocimum basilicum compte de très nombreuses variétés dont les plus courantes sont les suivantes : – O. basilicum var. minimum (petit basilic) ; – O. basilicum var. grand vert (alias pistou) ; – O. basilicum var. à feuilles de laitue. Certaines variétés se distinguent par l’odeur de leur feuillage : Anis, Cannelle, Citron à petites feuilles, Citron à grandes feuilles, Clou de girofle, Lime, Pomme, Réglisse. D’autres par des caractéristiques plus botaniques : de grandes feuilles vertes de 11 à 15 cm (Napoletano, Monstrueux Mammouth), des feuilles vertes teintées de violet (Nouvelle-Guinée), des feuilles vertes et des tiges violettes (Thaïlandais à petites feuilles, Thaïlandais à grandes feuilles), des feuilles en forme de coupe renversée (Gênes), un feuillage violet plus ou moins soutenu (Dark Opal, Violet Osmin, Violet Rubin, Purple Ruffle), un feuillage pourpre (Red Rubin), enfin des variétés naines (Grec).
  • Autres espèces : le genre Ocimum compte pas loin de 160 espèces annuelles ou vivaces à vie courte réparties sur trois continents : l’Asie, l’Afrique et l’Amérique du Sud et centrale. En voici quelques-unes : le basilic africain (O. gratissimum), le basilic du Kenya (O. kilimandscharicum), le basilic du Pérou (O. campechianum), le basilic crépu (O. bullatum), le basilic camphré (O. canum), le basilic américain (O. americanum), le basilic des moines (O. monachorum), enfin le basilic sacré (O. sanctum) que nous avons déjà brièvement abordé.

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  1. Dans un petit livre, Anne Osmont expliquait que les savetiers plaçaient des pots de basilic à leurs fenêtres afin de chasser au mieux l’odeur des vieux cuirs régnant dans leurs boutiques.
  2. Erika Laïs, Le livre des simples, p. 46.
  3. François-Joseph Cazin, Traité pratique et raisonné des plantes médicinales indigènes, p. 117.
  4. Jean-Baptiste Porta, La magie naturelle, p. 22.
  5. Paul Sédir, Les plantes magiques, p. 150.
  6. Psaume 91, verset 13.
  7. Sophy & Dominique Guillet, Catalogue Terre de semences, 1999, p. 61.
  8. Ibidem.
  9. Giovanni Boccacio, Décaméron, p. 301.
  10. Michel Lis, Les miscellanées illustrées des plantes et des fleurs, pp. 32-33.
  11. Serge Schall, Plantes à parfum, p. 60.
  12. Ibidem.
  13. Alain Corbin, Le miasme et la jonquille, p. 115.
  14. Ce chémotype apparaît aussi dans d’autres pays : Pakistan, Thaïlande, Vietnam, Madagascar, Réunion, Comores, France…
  15. Ce chémotype provient également du Maroc et d’Afrique du Sud.
  16. « La poudre des feuilles est un agréable stimulant des nerfs olfactifs. On la prend en guise de tabac pour rétablir l’écoulement du mucus nasal, pour exciter le cerveau. Quelquefois on la mêle à celle d’autres plantes odorantes, et on a une espèce de poudre céphalique, comme on l’appelait anciennement, dont on se sert contre la paralysie, l’amaurose et autres affections nerveuses », Joseph Roques, Nouveau traité des plantes usuelles, Tome 2, p. 182. L’amaurose est une perte complète et temporaire de la vision, affection dont l’étiologie est multifactorielle.
  17. Paul Ferris, Le guide des fleurs du docteur Bach, p. 151.
  18. Serge Hernicot, Les huiles essentielles énergétiques, p. 46.
  19. Ute Künkele & Till R. Lohmeyer, Plantes médicinales, p. 93.

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