Les huiles essentielles à oxydes

Avec un nom pareil, on pourrait s’attendre à quelque chose d’acide et de corrosif. C’est, du moins, ce qu’indique l’étymologie de ce mot. Mais il existe des oxydes alcalins, ce qui n’est pas le cas des huiles essentielles (heureusement !), encore moins de celles contenant des oxydes, dont le pH est plus ou moins acide. Cependant un certain nombre d’huiles essentielles sont constituées de molécules que l’on a regroupées sous le substantif d’oxydes. Découvrons-les, apprenons à les connaître.

Contrairement à d’autres classes moléculaires, celle des oxydes est relativement peu fournie dès lors qu’on recherche leur présence au sein des huiles essentielles :

  • 1.8 cinéole (ex eucalyptol) : eucalyptus globuleux (70 à 85 %), eucalyptus smithii (70 à 85 %), eucalyptus radié (60 à 75 %), cajeput (45 à 70 %), niaouli (40 à 60 %), ravintsara (52 à 58 %), saro (45 à 55 %), laurier noble (40 à 50 %), romarin officinal à cinéole (50 %), cardamome verte (30 à 45 %), lavande aspic (30 à 40 %), hélichryse mâle (20 à 30 %), romarin officinal à camphre (10 à 25 %), myrte commun (20 %)
  • Linaloloxyde : hysope couchée (55 à 60 %)
  • Pipéritonoxyde : menthe sylvestre (70 %)
  • Ascaridiole : boldo (16 à 25 %), chénopode vermifuge (40 à 80 %)
  • Menthofurane : menthe suave (52 %)

Nous nous concentrerons uniquement sur la première d’entre elles, la moins rare dans bien des huiles essentielles d’usage courant. Les autres, simplement mentionnées ici à titre indicatif, ne se prêtent pas véritablement à la pratique d’une aromathérapie quotidienne de par leurs propriétés neurotoxique et abortive (boldo, chénopode, menthe sylvestre, menthe suave). Seule l’huile essentielle d’hysope couchée peut être employée sans dommage aux doses physiologiques et sans crainte de regrettables effets secondaires.

1-8 cinéole
Molécule de 1.8 cinéole

Propriétés du 1.8 cinéole

  • Anti-infectieux à très large spectre d’action : antibactérien, antiviral, antifongique, antiseptique atmosphérique
  • Immunomodulant
  • Expectorant, mucolytique, décongestionnant respiratoire
  • Positivant
  • Tonique circulatoire
  • Tonique psychique

Domaines d’action du 1.8 cinéole

  • Grippe, bronchite, rhinopharyngite, rhume, sinusite, laryngite, trachéite, toux sèche, refroidissement…
  • Hépatites et entérites virales
  • Mycoses cutanées, gynécologiques et digestives
  • Douleurs arthritiques, rhumatismales et névralgiques
  • Déficience immunitaire grave
  • Asthénie nerveuse et physique, fatigue, burn out
  • Plaies, acné, herpès labial

Précautions d’emploi

Cette molécule jouit d’une excellente tolérance cutanée aux doses normales. A doses élevées, elle peut occasionner un assèchement de la peau et des muqueuses. En usage interne, un surdosage devient problématique. On observe tout d’abord des nausées et des vomissements, ainsi que des diarrhées. Au-delà, ce sont une altération de la conscience, des difficultés respiratoires, une hypotension et une hypothermie qui apparaissent. On évitera l’emploi d’huiles essentielles à 1.8 cinéole chez le sujet épileptique. De même, les huiles essentielles à 1.8 cinéole trafiqué (1.8 cinéole de synthèse) sont susceptibles de provoquer une crise d’asthme chez le sujet asthmatique.

© Books of Dante – 2014

Le cajeput, arbre à grippe

Le cajeput est un arbre qui fait partie de la grande famille des mélaleuques dont on trouve des représentants en Asie du sud-est ainsi qu’en Océanie. Dans la force de l’âge, il atteint généralement 15 à 20, ce qui en fait un arbre assez petit pour le climat dans lequel il évolue. Il ne lui déplaît pas de pousser dans l’eau (il partagerait alors la signature du saule de nos contrées ; en effet, le cajeput est antirhumatismal et anti-grippe, comme le saule).
Semper virens à vie courte (25 ans tout au plus), il est en revanche doté d’une vie végétative très développée.
Apparemment, au XVII ème siècle, la marine marchande hollandaise était déjà bien implantée dans l’aire de répartition géographique du cajeput. Si l’on en croit les sacro-saintes sources, ce serait les Hollandais naviguant qui rapportèrent trace de l’existence du cajeput, cet arbre à l’écorce blanche qui résiste aux feux de forêt et dont le nom en malais se dit kaja putih ou kajoupouti (« arbre blanc »).
Bien qu’étant connu depuis ce temps, l’intérêt pour les huiles essentielles de mélaleuques, dont le cajeput, n’apparaîtra que bien plus tard, au tout début du XX ème siècle.

cajeput

1. Huile essentielle : composition et description

Comme d’autres représentants de la famille des Myrtacées (eucalyptus globuleux, eucalyptus radié, niaouli, etc.) le cajeput est un arbre à eucalyptol (maintenant, on dit 1.8 cinéole) tout à fait typique.

  • 1.8 cinéole : 50 à 70 %
  • Alpha-terpinéol : 5 à 15 %
  • Limonène : 4 %
  • Linalol : 3 %

Soit quatre molécules constituant au ¾ cette huile essentielle. Le cajeput présente un profil biochimique proche de celui d’un autre mélaleuque plus connu, le niaouli (M. quinquenervia). En revanche, il se distingue de l’arbre à thé (ou tea tree, M. alternifolia) (1).
Dans le commerce, on trouve plus souvent l’huile essentielle de cajeput du Vietnam (M. leucadendron). Les deux huiles essentielles se valent mais occasionnent parfois des confusions dans un marché trop souvent gangrené par les falsifications (2).
Fraîche et boisée, l’huile essentielle de cajeput est marquée par la note parfumée des essences à 1.8 cinéole. Par l’odeur, on est plus proche d’un eucalyptus radié, par exemple. Liquide et mobile, cette huile essentielle est le plus souvent incolore à jaune pâle, mais il lui arrive aussi d’être verdâtre. Elle est extraite par distillation à la vapeur d’eau des feuilles et bourgeons cueillis juste avant floraison puis légèrement fermentés.

CPG HE Cajeput

2. Propriétés thérapeutiques

Elles sont proches des huiles essentielles de ravintsara, niaouli, arbre à thé, eucalyptus globuleux et eucalyptus radié.

  • Anti-infectieuse majeure à large spectre d’action (sur les sphères pulmonaire, intestinale et urinaire ) : antibactérienne, antifongique, antivirale, antiseptique atmosphérique, antiparasitaire
  • Expectorante, mucolytique, anticatarrhale
  • Antinévralgique, antalgique, anti-inflammatoire
  • Antispasmodique
  • Immunomodulante
  • Décongestionnante veineuse, augmente la circulation vasculaire
  • Radioprotectrice : tout comme les huiles essentielles d’arbre à thé, de niaouli et de lavande fine, le cajeput offre un effet protecteur en cas de séances de rayons
  • Sudorifique
  • Insecticide, répulsive

3. Usages thérapeutiques

  • Infections d’origine respiratoire (bronchite, laryngite, pharyngite, tuberculose, rhinite), urinaire (cystite, urétrite) et intestinale (entérite, dysenterie), infections virales (herpès génital, grippe), et parasitaires (parasites intestinaux)
  • Troubles de la sphère gastro-intestinale : spasmes gastriques, vomissements
  • Troubles musculo-articulaires : rhumatismes, douleurs articulaires et musculaires
  • Troubles circulatoires : hémorroïdes, varices
  • Troubles cutanés : acné, eczéma, psoriasis, pityriasis, zona, plaies, démangeaisons, écorchures
  • Névralgies dentaires et auriculaires
  • Par ses propriétés répulsives, l’huile essentielle de cajeput offre une protection contre trois insectes responsables de maladies (dengue, paludisme, encéphalite) avec un pouvoir deux fois supérieur aux huiles essentielles de citronnelles.

4. Modes d’emploi

  • Voie orale diluée
  • Voie externe diluée (friction, massage)
  • Voie externe pure (geste d’urgence, névralgie dentaire)
  • Inhalation
  • Diffusion atmosphérique

5. Contre-indications et remarques

A chaque fois que l’on aborde une huile essentielle, les précautions sont de mise. Le cajeput ne fait pas exception à cette règle. Sachant qu’à ma connaissance il n’existe aucune huile essentielle dénuée d’effets plus ou moins indésirables, il est de mon devoir de présenter celles qui concernent l’huile essentielle de cajeput.

=> En cas de massage on dilue. Cela permet d’éviter les problèmes d’irritation cutanée.
=> En cas de diffusion atmosphérique et d’inhalation directe au flacon, on fera attention aux sujets sensibles niveau sphère respiratoire. D’autant plus quand on sait que certaines huiles essentielles de cajeput frelatées (entendre : falsifiées) occasionnent des crises d’asthme.
=> En cas de grossesse : cette huile essentielle est déconseillée durant les trois premiers mois.


  1. Moins célèbre que niaouli et arbre à thé aujourd’hui. En revanche, dans les années 1960, le docteur Valnet évoquera autant le niaouli et le cajeput, faisant complètement l’impasse sur l’arbre à thé.
  2. « Elle est souvent reconstituée et, contenant du pinène droit, elle devient dextrogyre. Les médicaments chimiques sont souvent dextrogyres. L’huile essentielle de cajeput naturelle est lévogyre » (Michel Faucon, Traité d’aromathérapie scientifique et médicale, p. 572). Par analyse, on peut déterminer si une huile essentielle est naturelle ou coupée avec d’autres substances. Si c’est le cas, son pouvoir rotatoire est modifié et de lévogyre devient dextrogyre. Or le fait de couper une huile essentielle, de la trafiquer donc, diminue considérablement sa puissance vibratoire par rapport à l’huile essentielle naturelle exempte de modification.

© Books of Dante – 2014

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