(Lippia citriodora ou Aloysia triphylla)
La plante dont on va aujourd’hui parler répond à de si nombreux noms vernaculaires qu’on pourrait légitimement être tenté de penser qu’ils désignent des plantes différentes les unes des autres, tant certains sont surfaits et d’autres pourvoyeurs d’idées fausses. J’ai donc spécialement collecté pour vous un petit nombre de ces appellations parmi les plus courantes. Petit florilège : citronnelle, verveine citronnelle, verveine odorante, verveine citronnée, verveine des Indes, thé arabe. Entre des localisations géographiques variées et des rapprochements avec d’autres plantes, il est vrai qu’il est parfois difficile de faire de nettes distinctions. Certains noms doivent impitoyablement être rejetés :
– Verveine des Indes : la plante à l’étude n’est pas originaire d’Asie. Verveine des Andes eut été plus juste puisque notre plante provient d’Amérique du sud.
– Verveine citronnelle, citronnelle : c’est un emploi abusif du mot citronnelle, lequel qualifie des plantes asiatiques.
– Thé arabe : bien que largement cultivée et employée en Afrique du nord, la verveine n’appartient pas à la famille du théier. Malheureusement, le terme générique de « thé » a fini par regrouper des plantes dont on fait une infusion.
En revanche, les autres dénominations sont largement convenables :
– Verveine odorante : si on l’oppose à la verveine officinale – quasiment dénuée d’odeur – cet adjectif est parfait.
– Verveine citronnée : ici l’on sait que la verveine est odorante, puisque son parfum rappelle celui du citron.
Par ailleurs, d’autres plantes qui ne sont pas des verveines sont parfois désignées comme tel :
– Verveine indienne : lemongrass (Cymbopogon flexuosus)
– Verveine Yunnan : litsée (Litsea cubeba)
Cela, très certainement, en raison du fait qu’elles présentent de forts points communs avec la verveine citronnée (parfum, propriétés et usages thérapeutiques).
Bien. Ceci étant dit, passons dès à présent à la suite de cet article, dans lequel j’utiliserai le nom de verveine citronnée pour nommer la plante du jour.
La verveine citronnée, originaire d’Amérique du sud (Chili, Pérou, Bolivie…), n’est connue en Europe que depuis le XVIII ème siècle. Sur ses terres natales, elle pousse à haute altitude et naturellement en pleine terre, ce qui n’est pas toujours le cas en Europe. En effet, un climat un peu trop froid peut lui être fatal. Craignant le gel, il faut alors opter pour une plantation en bac que l’on prend soin de mettre à l’abri durant la saison hivernale. Dans le sud de la France, elle peut pousser en pleine terre ; pailler le pied peut parfois lui être profitable.
Cet arbuste, dont la taille varie de un à trois mètres, est pourvu de longues tiges ligneuses qui portent des verticilles de feuilles lancéolées, rugueuses et à la forte odeur de citron lorsqu’on les froisse. Entre juillet et septembre, c’est la période de floraison. Discrète, la verveine se pare de panicules pyramidaux de petites fleurs blanches qui ne fructifient pas en Europe.
Depuis son introduction européenne, on la cultive en Espagne, en Afrique du nord (Maroc, Algérie, Tunisie), ainsi que dans le midi de le France. Afin de répondre à une demande croissante, l’Inde, la Réunion et les Antilles produisent aussi de la verveine citronnée.
La verveine citronnée en aromathérapie
Huile essentielle : description et composition
Très odorante comme l’indique son nom, l’huile essentielle de verveine citronnée développe une caractéristique odeur de citron et de cédrat, mais sans présenter le côté piquant et frais de ces derniers. Ici, c’est plus doux, plus herbeux, floral aussi, rappelant le géranium bourbon. Se dégagent également des relents épicés évoquant de très loin le curcuma. D’incolore à jaunâtre, elle peut légèrement foncer avec le temps. Une tonne de feuilles fraîches est nécessaire pour obtenir un à sept kilogrammes d’huile essentielle de verveine citronnée. Nous avons affaire à un très faible rendement (0,1 à 0,7 %), ce qui explique pourquoi cette huile essentielle est souvent coupée avec d’autres huiles (lemongrass, citronnelle de Java, litsée…).
Les rameaux feuillés, distillés à la vapeur d’eau, produisent une huile essentielle dont la composition biochimique peut évoluer en fonction de la période à laquelle la verveine est récoltée :
- Avant floraison : feuilles vert cendré, parfum subtil et léger.
- Après floraison : feuilles plus riches en huile essentielle, parfum plus prononcé mais moins fin.
On peut tout de même indiquer quelques chiffres :
- Aldéhydes : 20 à 40 %
- Sesquiterpènes : 25 à 30 %
- Monoterpènes : 15 à 20 %
- Monoterpénols : 8 à 15 %
- Sesquiterpénols : 5 %
- Oxydes : 5 %
- Esters : 4 %
Propriétés thérapeutiques
- Anti-infectieuse (plus ou moins variable selon le profil biochimique) : antibactérienne, antivirale, antifongique, antiparasitaire, antiseptique atmosphérique
- Anti-inflammatoire puissante (bien davantage que lemongrass et litsée)
- Antispasmodique
- Stimulante endocrinienne (vésicule biliaire, pancréas, rate, thyroïde, gonades mâles et femelles)
- Stomachique, apéritive, digestive
- Litholytique (qui permet de drainer les lithiases)
- Hypotensive
- Négativante
- Cicatrisante
- Active sur le SNC : sédative puissante, calmante, anxiolytique, neurotonique, antidépressive
Usages thérapeutiques
- Troubles cardiovasculaires : hypertension, tachycardie, extrasystole, fatigue cardiaque, palpitations, coronarite
- Troubles gastro-intestinaux : entérocolite, colite, amibiase, dysenterie amibienne
- Maladies auto-immunes : maladie de Crohn, sclérose en plaques
- Troubles rénaux et urinaires : lithiase rénale et urinaire, inflammation rénale, cystite, cholécystite
- Douleurs articulaires, rhumatismales, névralgiques et tendineuses
- Fatigue et faiblesse oculaire
- Infections parasitaires, fongiques et virales : grippe, herpès labial et génital, leishmaniose, maladie de Chagas, malaria,
- Psoriasis
- Stress, anxiété, angoisse, déprime, dépression, fatigue nerveuse, trouble du sommeil, insomnie, manque de concentration, somnolence, apathie
Modes d’emploi
- Voie orale raisonnée
- Voie cutanée diluée
- Diffusion atmosphérique, olfaction
Précautions d’emploi, autres usages
- En cas d’usage cutané, cette huile essentielle peut occasionner des démangeaisons, des érythèmes avec sensation de chaleur, si elle est utilisée pure ou insuffisamment diluée. De même, la diffusion atmosphérique peut être à l’origine d’une irritation des muqueuses. L’employer en faible quantité accompagnée d’autres huiles essentielles peut être profitable.
- Certains lots d’huile essentielle de verveine citronnée contiennent parfois des furanocoumarines dont la phototoxicité est bien connue. Attention à l’exposition solaire après application cutanée.
- Attention aux contrefaçons. L’huile essentielle de verveine citronnée est rare et chère, donc…
- On évitera l’emploi de cette huile essentielle durant la grossesse.
- En phytothérapie, on retrouve la verveine à l’état de feuilles sèches. Attention de ne pas abuser de son infusion. A hautes doses, la verveine peut irriter les muqueuses stomacales.
- En cuisine, les feuilles, tant fraîches que sèches, aromatisent certaines préparations culinaires : sauces, marinades, gâteaux, glaces, sirops, liqueurs (Verveine du Velay), etc.
- En parfumerie, elle est réservée aux produits de luxe.
© texte : Books of Dante – 2015
© photos : Pescalune Photography
Bonjour et merci pour ce très bel article.
Permettez-moi de vous signaler une petite erreur de calcul.
Si le rendement annoncé est correct, une tonne de feuilles donneront entre 1 à 7 litres d’huile essentielle.
Avec toute ma sympathie et ma gratitude pour cet impressionnant travail,
Philippe
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Bonjour Philippe et merci pour votre enthousiasme, ainsi que d’avoir repéré cette coquille que je m’en vais corriger dans la minute.
Cordialement,
Gilles
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